Krazy Kat

Georges Herriman

 

George Herriman, Krazy & Ignatz, "there is a heppy lend-fur, fur awa-a-ay" The complete full-page comic strips 1925-1926
Fantagraphics books , 2002
ISBN 1-56097-386-2

George Herriman, Krazy & Ignatz, "love letters in ancient brick",continuing the complete full-page comic strips 1927-1928,
Fantagraphics books, 2002
ISBN 1-56097-507-5

George Herriman, Krazy & Ignatz, "A mice, a brick, a lovely night", cataloging the complete full-page comic strip 1929-1930
Fantagraphic books, 2003
ISBN 1-56097-529-6

Pourquoi cet auteur, pourquoi cette série, pourquoi cette édition?

Pourquoi cet auteur? Parce que Herriman est sans doute un des plus grands génies de la bande dessinée. C'est un peu court sans doute. Parce que c'est un dessinateur hors pair, parce qu'il a eu toutes les audaces formelles et graphiques. Parce qu'il y a de la  poésie, de l'humour absurde, une espèce d'alchimie secrète entre culture populaire et intelligence qui font que son travail est sinon intemporel, du moins d'une modernité stupéfiante pour des planches datant de 80 ans.

Pourquoi cette série? Parce que les "sunday pages" de Krazy Kat sont le travail le plus abouti d'Herriman, celui dans lequel il s'est manisfestement le plus investi; et parce qu'elles développent ce qui a fait la réputation de cette série : une souris lance à ce fou de chat une brique sur la tête à chaque épisode, et celui-ci l'interprète comme un acte d'amour. Et la souris se retrouve en prison du fait du brave officier pup qui ne supporte pas qu'on traite ainsi un chat-ou une chatte ?, tout chien qu'il soit. Sur cette trame Herriman bati un univers riche et complexe, et bien que Thierry Groensteen la qualifie de "contrainte molle", on ne peut s'empêcher d'y voir une préfiguration de ce que sera l'art sous contrainte des Ou-X-Po.

Pourquoi cette édition ? Parce que c'est la meilleure tout simplement. Les couvertures sont de Chris Ware, la mise en page aussi, et chaque album contient en outre des articles d'une très belle facture et des documents divers rares et  éclairants. La traduction existante -bien que depuis longtemps épuisée- chez Futuropolis ne peut pas remplacer l'édition originale, tout simplement parce que le langage d'Herriman est intraduisible. Il y mélange l'anglais et l'espagnol ( un peu de français et d'allemand aussi), et  les textes sont truffés d'expressions et de déformations qu'on ne peut absolument pas restituer par une traduction.

L'édition est certes incomplète mais si suffisamment de gens achètent ces merveilles, la publication continuera.

Sans entrer dans des considérations de spécialistes, de sémiotique notamment, il n'en reste pas moins que cette oeuvre constitue une référence pour tout amateur de bande dessinée, voire pour toute personne s'intéressant à l'art.

Cédric Chaigneau