Le rialto

 

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PathalgharDepuis plus de vingt ans, le rythme cardiaque des Bruxellois s'accélère au début du mois de mars. Ce n'est pas uniquement l'approche des jours ensoleillés qui provoque ce phénomène, mais bien un festival des plus politiquement incorrects : le BIFFF (Brussels International Festival of Fantasy Film). Cette structure familiale, créée de toutes pièces par une bande de potes, est devenue un monstre tentaculaire qui attire des hordes de curieux en mal de sensations fortes. Le tout se place dans le coeur de Bruxelles, à deux pas des sentiers pour touristes. En avant pour le (mas)sacre du printemps !

LE (MAS)SACRE DU PRINTEMPS


Fréquenter les alentours du Passage 44 ou du Cinéma Nova (proches de notre célèbre Grand-Place et ses magasins de broderie) en cette période de l'année, permet de croiser des gens d'origines diverses, tentant de parler anglais, histoire de se comprendre. Ils ont en commun des traits tirés, le teint pâle et les yeux bouffis. Autre particularité : un carnet de chasseur d'autographes vissé dans une main tremblotante. Ces symptômes sont ceux des acharnés qui ne vivent durant deux semaines que le soir, le regard rivé sur un écran de cinéma des heures durant. Un geste répété religieusement devant plus de 100 films ! Saluons ces aventuriers en quête de perles cinématographiques rares.

Cette 21ème édition du BIFFF (14 au 29 mars) ne dépareille pas, les gros morceaux sont légion, quel que soit le créneau qui vous intéresse. Jugez plutôt...

Le passage 44 vous propose, entre autres

- Les purs et durs connaissent par coeur Re-Animator et Bride of Re-animator, deux produits gores old-school bourrés d'humour. Au programme: des piqûres au contenu fluo, des morts-vivants pas très jouasses, et bien entendu une dose (non)raisonnable de sang. La suite est enfin arrivée : Beyond Re-Animator. Toujours trash, drôle et avec l'impayable Jeffrey Combs dans le rôle d'un Docteur Herbert West qui continue à mener ses expériences en prison. En gore et encore!

- Le nouveau film de Jaume Balaguero, Darkness, peut s'avérer une bonne surprise (souvenez-vous de The Nameless). Il rejoue la carte de l'étrange, de l'épouvante avec une histoire de maison maudite. Ce film, tout comme Beyond Re-Animator fait partie d'une sélection consacrée à Filmax [ site ] , boîte de production espagnole à garder en vue. D'après les échos du MIFED (marché des producteurs et distributeurs de films indépendants à Milan), Second Name et Thirteen Crimes, autres produits Filmax seraient des plus intéressants.

- Le Danois Thomas "Festen" Vinterberg se fraie également un passage dans les méandres de l'anticipation avec It's All About Love.

- La Marvel n'est pas en reste, Daredevil, le super-héros pourvu d'une canne blanche et d'un beau maillot de corps rouge, viendra défendre la ligue de justiciers de comics. En attendant la sortie de X-Men 2 ou encore The Hulk voici de quoi se faire les crocs. La seule ombre au tableau semble être la volonté des producteurs américains de calquer leurs scénarios de films en films…

- Les trekkies ne manqueront pas la projection de Star-Trek : Nemesis. Pas d'erreur possible : une salle comble et une ambiance de fous furieux sont à prévoir ! Sortez donc vos oreilles pointues en plastique et vos sweat moulants.

- Et puis, voici une poignée de films asiatiques (Japon, Corée, Thaïlande, Indonésie…), une mince sélection parmi une pléthore d'immanquables. Dans le genre déjanté total, Alive et Aragami de Ryuhei Kitamura devraient faire très fort… Souvenez-vous de Versus, fable sur fond de morts-vivants et de yakuzas! Du cinéma japonais au rythme rock'n'roll. Takashi "Audition" Miike ne pouvait être absent. L'année dernière il était présent en chair et… en programmation ! Il revient, uniquement sur pellicule avec Dead or Alive 3. Après un étonnant Bangkok Dangerous, Danny et Oxide Pang nous lancent The Eye. Le [ site officiel ] fait déjà très peur. Autre surprise du festival : Pathalgar de Abhijit Chaudhuri, du Bollywood, du vrai… Attendez-vous à de grands numéros musicaux, on ne sait que dire concernant le reste du film. De bonnes rumeurs précèdent également Three, une histoire de fantômes en 3 sketches provenant de trois pays : Hong Kong, Thaïlande et Corée ; Volcano High, teen-comédie coréenne aux effets spéciaux à la Matrix et à l'univers de manga. Bête mais très drôle et The Grudge/Ju-On, film japonais tournant encore autour de fantômes. Le succès de Ring ne cesse de faire beaucoup (trop) d'émules!

Le Passage 44 c'est également une ambiance très très chaude, soutenue par un public qui n'hésite pas à manifester sans retenue ses émotions (tout peut arriver!) Haine, joie, peur ou simplement bonne humeur sont des plus sonores, voire assorties de projectiles ! De quoi se coller une extinction de voix. Seul bémol, ce déferlement hystérique peut parfois gâcher un film, surtout si vous êtes comme votre serviteur du genre à s'investir entièrement dans l'univers d'un film. Je dois vous avouer qu'il m'est arrivé de quitter la salle…

CypherLe "44" est un haut lieu de rencontres également. Vous aurez peut-être l'occasion de saisir au vol l'un ou l'autre de vos "héros", déambulant en pleine montée alcoolémique. C'est parfois fort drôle! Entre autres invités vous pourrez croiser: Jaume Balaguero, Brian Yuzna, Don Coscarelli, Ryuhei Kitamura, Alejandro Jodorowsky, Vincenzo Natali (réalisateur de l'excellent Cube) qui présentera son nouveau bébé Cypher

N'oublions pas la nuit du festival, avec sa programmation des plus sales, son public hardcore prêt à mettre un souk pas possible. Au menu : Beyond Re-animator (voir plus haut), House of 1000 Corpses [ site ] une film de Rob Zombie à l'esthétique gore cra-cra très 80's, Princess Blade une gaudriollerie asiatique et Wishmaster 4, pas de commentaires…


Le Cinéma Nova ne fera pas non plus pâle figure, jugez plutôt !

Le Mexique sera à l'honneur avec des œuvres d'Alejandro Jodorowsky (Fando y Lis, El topo, Santa Sangre…). Mais le plus fort reste à venir, on retient son souffle un instant. Voilà, allons-y. Vous pourrez voir l'incroyable série de films consacrés aux catcheurs/super-héros les plus improbables de l'histoire du cinéma : El Santo (Santo vs. Las mujeres vampiro), et Neutron (Neutrón contra los Autómatas de la Muerte). Leurs armes secrètes : des muscles, un juste au corps et masque de cuir très S-M [ site ] . On ne vous en dira pas plus si ce n'est que c'est à ne manquer sous aucun prétexte, tant pour les fans de films gros "bis" qui tache que pour les amateurs d'univers décalés à la C.Burns (ben ouais, d'où tient-il son El Borbah, hein dites…) Le reste de la programmation mexicaine (sous le titre générique Mexico Macabro) est simplement à couper le souffle. Les programmateurs se sont grillés les neurones à nous dégotter des petites perles obscures comme Alcuarda et ses méchantes sorcières qui font pisser le sang. El Castillo de la Pureza, l'histoire d'une famille séquestrée par le patriarche pendant 18 ans pour ne pas être contaminé par la crasse du monde extérieur. El Esqueleto de la Signora Morales une fable macabre sur fond de taxidermie. El Vampiro, Dracula s'achète une hacienda (euh… si si faut y aller!).

On s'arrête là, mais sachez que cette liste n'est pas exhaustive. Un conseil, si vous voulez croiser Jodorowsky, plantez-vous durant le second week-end du festival au cinéma Nova…
Il sera dans les parages !

D'autres petites perles étranges et exotiques devraient ravir les plus pointilleux : A Snake of June de l'étourdissant réalisateur et acteur Shinya "Testuo" Tsukamoto [interview]. D'après ses dires on se retrouve une fois de plus dans une sorte de trio amoureux sur fond d'ambiance moite. Il nous réussit cela à chaque coup, pas d'hésitation à avoir! Mais n'oublions pas d'autres merveilles comme Dracula : Pages from a Virgin's Diary le nouveau Guy Maddin l'homme qui conçoit ses films comme des bouboules à neige filmées par un maître expressionniste, Suicide Club et A Forest with no Name (Japon), Old Men in New Cars (Danemark)...

Le Cinéma Nova propose une ambiance plus feutrée dans une salle au look squat assez magnifique, pas de hurlements intempestifs ou de jets de pop-corn. La présentation des films se fait relax, tout comme les rencontres publiques généralement menées autour d'un verre dans le bar au sous-sol. La programmation est des plus pointues, on peut se retrouver médusé devant un film d'auteur parfaitement imbuvable, mais la plupart du temps ce qui est projeté est totalement excellent. Faites un crochet cette année si vous êtes en manque de cinéma "exotique", vous allez devenir accro.

Avant d'aborder la fin du festival, voici encore une liste d'inclassables qui devraient vous permettre une hilarité assortie de nausées.

- Plaga Zombie : Zona Mutante, un film argentin (suite de Plaga Zombie… ben oui), un virus transforme les habitants de Buenos Aires en morts-vivants bouffeurs de chair. Présenté comme fort drôle.

- Cabin Fever, projet de Eli Roth, un passionné de films qui suintent (ami de Lloyd Kaufman) co-produit par David Lynch. Mais attention, plus Troma films que Blue Velvet !

- Bubbah Ho-Tep, nouveau film de Don "Phantasm" Coscarelli… Lisez simplement ces quelques lignes extraites du résumé du dossier de presse : "…mélange entre Straight Story et La Momie, avec Elvis Presley. Ou comment échapper à un monstre quand on est incontinent et qu'on marche avec une tribune?" Ca devrait vous situer le niveau! A noter au passage un Bruce Campbell (série Evil Dead) magnifique dans le rôle du KING.


Quand y en a plus, y en a encore
- Le Bal des vampires marque la fin du festival. Une nuit entière à danser comme des fous au milieu d'une foule déguisée, de manière bien trash of course. Une hallucination totale plus proche de l'esprit grosse déconne que d'une soirée club. Une fois par an ça ne fait pas de mal! Rendez-vous le 29 mars aux Caves de Cureghem (sous les abattoirs d’Anderlecht). Deux "haunted dancefloors" (boom-boom et plus rock) seront à votre disposition, à condition de se faire un déguisement bien crade (de toute façon, il le sera en fin de nuit… ça picole sec pour oublier que la fête est finie !).


Voici quelques petits conseils pour passer un bon festival

> Achetez un maximum de junk food, trouver le temps de cuisiner sera difficile. Choisissez donc ce qui peut se cuire au micro-ondes en un minimum de temps. De la bouffe bien grasse qui une fois ingurgitée vous coupe l'appétit pour le reste de la journée. Un paquet de sodas est indispensable, du sucre et du sucre, de quoi tenir le coup… Attention, ça fait uriner ! Des bonbons, en gros paquets forment un excellent complément nutritionnel.

> Il vous faudra en permanence de quoi écouter de la musique, qui met mal à l'aise de préférence. Deux ou trois exemples:une poignée de B.O. est toujours la bienvenue. On vous conseille, entre autres de petites choses comme : The Wicker Man, Experiment in Terror, The Day the Earth Stood Still, The Trip, Repo Man, Not of This Earth… Bien entendu les joyeuses ambiances de Portishead, Nine Inch Nails, Tricky, Sigur Ross feront aussi l'affaire… Si vous tenez à vous la faire extrême passez par une médiathèque et demandez les fleurons de la musique industrielle, ou les classiques du Death Metal! A vous de voir. Pour préparer les soirées 'visions de films trash, kitsch ou décalés', optez pour Yma Sumac, Les Baxter, Attilio Mineo, 101 Strings ou encore Joe Meek.

> Les vêtements : il vous faudra une bonne veste bien chaude (hé, c'est le mois de mars !), posée sur un simple t-shirt. Fortement recommandé si vous optez pour une intensive au Passage 44, lieu surchauffé. Ne vous fringuez pas comme un pingouin de luxe, vos vêtements vont en prendre un coup. Pas de dress code, vous allez croiser de tout !

> Un peu de monnaie en poche peut vous soulager. Si le Cinéma Nova met à disposition ses toilettes gratos, il n'en est pas de même au Passage 44. Vous aurez soif c'est certain, et au bout d'un moment il vous faudra un passage vide vessie (il faut s'habituer à prendre un rythme qui permet de tenir pendant les films)… Une petite pièce et un sourire vous permettront de passer les hôtesses des pipi rooms. Elles sont sympas, ne les oubliez pas !

> Vu les cernes que vous allez vous payer, garçon ou fille, prévoyez une tonne de maquillage si vous voulez tenter de faire croire que vos retards, -hors festivals- n'ont rien à voir avec ce dernier. Un pieu mensonge bien préparé peut aider également. Le soir par contre, de quoi renforcer votre pâleur sera apprécié par les autres festivaliers.

De notre envoyé spécial à Bruxelles, Gauthier Keyaerts

Renseignements pratiques
Info **32.2.204.00.13. ou www.bifff.org

Pour vous procurer vos tickets dans toutes les FNAC
à l’Adac (Passage 44)
par téléphone au **32.2.218.27.35
par internet sur www.bifff.org

Les lieux du Festival
Auditorium du Passage 44 44 Boulevard du Jardin Botanique, 1000 Bruxelles
Cinéma Nova 3 rue d’Arenberg, 1000 Bruxelles
Actor’s Studio 16 Petite rue des Bouchers, 1000 Bruxelles
KultuurKaffee VUB 2 Avenue de la Plaine, 1050 Bruxelles
Caves de Cureghem 24 rue Ropsy Chaudron, 1070 Bruxelles

[ Brussels International Festifal of Fantasy Film ]