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JadeWeb chroniques #0 /
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Acetate Zero Piece in trouble

Trop fréquemment (quoi que judicieusement) comparé à Hood, ou Pan American, en plus sombre, le groupe développe au long de ces 3 pièces une dose substantielle d’humanité et d’éveil à la pluralité surprenante.
On se laissera séduire par la voix enlevée et vulnérable de cette jeune fille sur Permanent snow, refuge de fraîcheur au sein des vents chauds des sections rythmiques. En fait, ce qui distingue cette formation des autres, c’est ce choix d’un contre-pied permanent entre l’exactitude technique des compositions et une désinvolture humaniste. Une musique attachante, entre résistance et renoncement, soif de hauteur (atmosphérique) et trouble de l’altitude. En plus de ces 3 titres, dans une démarche intelligente, Arbouse rec. a convié quelques convives de choix, majoritairement portés sur la chose électronique, à s’adonner à un exercice de style. On retiendra les déluges de strates à cordes pour une plongée dans le brouillard chez Köhn, les insalubrités rythmiques aphex twinienne d’Eglantine, une ballade dans les early eighties chez Lippok , D. Infusion qui donne une touche Astorienne (lignée Wisdom of Harry) à ce milieu d’opus et un appel aux abonnés (pas vraiment) absents chez Rothko. Des Visées illuminées.
Arbouse rec. démontre une qualité rare : savoir pointer, au-delà des clivages (ici musicaux) le talent là où il se trouve. Décidément, les fruits de cet arbre ont une bien bonne saveur.
JJ.

Acetate Zero Piece in trouble (Arbouse records) www.multimania.com/arbouserecords

 
       
   

Maxime Lavièville/sébastien Eglème monsieur Hiii

Courtisant l’instantané, invitant la mélodie au pied levé, Maxime Lavièville et sébastien Eglème ont confié à Ishtar, chez d’orchestre et promoteur d’un jour, le soin d’exposer cette galerie d’émotions qui se décline sous toutes les phases : le rire, la joie, l’introspection, la rage, l’envie, la surprise. Des situations mélodiques intéressantes, des propositions audacieuses, donnent la cadence à ce projet qui ouvre des voies intéressantes autour du dialogue Organique /machine.
JJ.

Maxime Lavièville/sébastien Eglème monsieur Hiii (Ishtar/Métamkine)

 
       
   

BS 2000 Simply mortified

Autant vous prévenir d’emblée, simply Mortified est une farce de potache éclairé, un réservoir à bonne idée, un défouloir destiné à l’attention de 2 membres des Beastie Boys. En d’autres termes, un sas de dépressurisation rigolo à destination de leurs auteurs, soumis bien malgré eux aux affres du succès (pression médiatique et commerciale). Un bain de jouvence pour l’auditeur, un peu décontenancé, mais dont les pieds apprennent vite à battre la mesure sur le tempo déglingué. Parce que finalement, la musique, c’est du plaisir, un acte de dilettante. Et puis c’est l’album de chevet d’Alec Empire alors… BS 2000 means Beautifull Sounds of 2000.
JJ.

BS 2000 Simply mortified (Grand Royal/Source)

 
       
   

Bip-Hop Generation Vol 2

Ce qui pour beaucoup paraîtrait une œuvre titanesque, de son élaboration à sa mise en place, apparaît pour Philippe Petit, mentor de Bip-Hop, un passe temps où l’intuition et le goût du beau se tirent la manche. Imaginez : réunir en l’espace de 2 volumes (2 autres vont suivre) l’international cliquetant et trébuchant de ce que l’électronica à géométrie variable (voire instable) compte de plus enthousiasmant et ardent, comme autant de concerts rêvés ou de sommaires de fanzines intimement souhaités. Cette chose la, il l’a réalisée.
Ce deuxième volume doit être pris pour ce qu’il est, une exégèse vivante d’une scène en pleine explosion créative, une exhortation à la découverte, également, un recentrage intelligent du savoir-faire électronique sur l’hexagone, surtout. Des protagonistes de choix, de Bernard Fleischmann, fer de lance de Morr et Rhiz, label pointu du collier avec son approche mélodique et sensuelle, les Allemands d’Arovane (disques sur Dim, Morr, vertical Form, CCO), Warmdesk et sa mixture ambiant ant-zennienne. Köhn et son électro brinquebalante un poil Ovalienne ou à base de lourdes infrabass, Wang inc et ses loops furibards déjà diffusés via Fallt et static Caravan, Laurent Pernice, français de l’étape et son électro digitale pas piqués des vers, Köhn et ses albums sur le trop bon label (Kraak)3, etc. Une illusion sonore ? Non, rien moins qu’une réconciliation heureuse avec l’exercice périlleux de la compilation.
JJ.

Bip-Hop Generation Vol 2 (Bleep/La baleine)

 
       
   

Crunch "O"

« Passages, coupes plutôt, et des coupes qui eussent été faites par un homme au comble de l’énervement qui ne peut pas supporter des sons de plus de quinze secondes de suite, mais qui y reviendra souvent, toujours aussi exaspéré, toujours avec le même élan insensé.
Les fragments en étaient si précipités qu’on s’attendait à les entendre hoquetés, mais non, le bourgeonnement bouffon s’accrochait sans une faute, malgré l’invraisemblable vitesse, malgré les déclenchements de notes semblables à des évacuations précipitées semblables à des rafales. Débordante et l’instant d’après arrêtée, la musique de plus en plus allait, contrefaite, déni de musique, déni de mystique. »

Il y avait aussi par moment des échappées, des gamineries, des notes haut perchées, des jumelages ineptes, des frottages musicaux jamais entendus, des abbelimenti outranciers, un divisionnisme fou (…)
Entre cet extrait de texte d’Henri Michaux, et la sortie du « 0 » de Crunch, 40 années se sont passées. Un fossé de temps qui sépare ces deux œuvres, et malgré cela, malgré le temps qui les éloigne, elles semblent se répondre, l’une décrivant l’autre, la dernière se pliant à l’analyse de la première. Ce premier long courrier de Crunch est une démonstration superbe de ce que l’électronique recèle de plus instablement rythmique et symphonique. Les embellies harmoniques, d’une rare beauté sont irrémédiablement perverties par une mécanique de rythmes dévergondés et subversifs (parenté Autechre), des bourrasques de percussions analogiques sans freins. Pour damner le mot à Mikaël Fakesch, il n’est nullement besoin d’analyser une musique lorsqu’elle s’impose à nous avec une telle facilité.
Anecdote s’il en est, les auteurs de cette proposition heureuse se sont entourés de confidentialité, à tel point que personne ne connaît leur identité, ni celle des Graphistes, Restate (Radikal ReZearch) qui développe un design à faire trembler The Designer Republic.
JJ.

Crunch "O" (Musik aus Strom/Chronowax)

 
       
   

Heimelektro Ulm V/a Heimelektro ulm popular 1&2

C’est dans l’émergence d’une scène électronique toujours plus ample, toujours plus avide d’expériences de traverses que ce projet s’est instauré. C’est dans ce contexte que s’impose l’exercice de la compilation, bilan subjectif des innovations et autres prolongements synthétiques d’une activité neuronale rarement en berne. Heimelektro Ulm, avec respectivement 14 et 15 productions a le souhait intime de décloisonner les genres, d’éviter les embranchements et sous-catégorisations qui gangrènent la scène musicale et la réflexion sur le fond. Leur optique semble être de voir cette scène comme un tout cohérent, ou du moins, qui a comme fil d’Ariane l’absence d’appartenance à des écoles ou à des courants et qui de surcroît, a pour parti pris un appétit certain pour le détournement et la déviance de sons.
Une musique très mélodique, douce au toucher, où l’on retrouve NUF (Burnt Friedmann de Flanger, entre autres) et son Nu-Jazz versatile et des très bons artistes tel Hans Platgumer et son morceau Coma qui rappelle du Amon Tobin minimaliste, Lupo Borax et son électro douce-amère, Pimui et ses synthétiseurs Airien, electric Sheep (veine LFO/Console) que l’on retrouvait déjà sur la généralissime Compilation Pop Tics de Bungalow rec. et Hecker, échappé de Mego pour l’occasion qui clos le premier volume par une pièce quasi-environnementaliste. Le second volet est de la même trempe et propose des pièces originales d’ Attention industries, Solvent, Jetzmann, elf attn, suchtrupp, etc. les formations sont aussi brillantes qu’elles sont inconnues, c’est dire leur talent…
JJ.

Heimelektro Ulm V/a Heimelektro ulm popular 1&2 (Heimeelktro/ La Baleine/Ici D’ailleurs VPC)

 
       
   

My Jazzy Child un grand coup de lassitude

Les cinq pièces de My Jazzy Child provoquent une langueur qui entre en résonance avec l’atmosphère du lieu. Pleine d’amplitude, avec une ossature répétitive c’est par paliers successifs, par touches qu’on accède à leur douce torpeur, leurs projets de développement intime. Un étagement raisonné des sensations, nappes vibrantes, fusions aquatiques, échos concrets (champs d’oiseaux), où filtres discrets, grésillement et petits parasitages sonores viennent en flux et reflux comme autant de stimuli réactifs, comme pour montrer un lieu globalement statique mais avec une multitude de détails en mouvement. Une BO imaginaire pour un film d’espace vide.
L’album impose un rythme sourd à notre corps, petit métronome imaginaire donnant la mesure à la respiration et au pouls, guidant le corps d’un état d’excitation à un état de torpeur éclairé. On ne se départit pas si facilement de cet album, si tant est qu’on puisse jamais vraiment en sortir.
JJ.

My Jazzy Child un grand coup de lassitude (Pricilia records)

 
       
   

Antenne #1 - Here to go remixes

Kim Hansen, en vieux routard de la musique industrielle, a su tirer avantage des connaissances acquises au fil de ses diverses formations, de ICI (institute for the Criminal Insane) à Grind, en passant par Armstrong, dont le line-up s’est depuis stabilisé jusqu’à Antenne.
Bâti autour d’une construction élémentaire, une mélodie, une partition de voix, un sample, Hansen développe son savoir donnant forme à la mince ossature. Là où son travail à perdu en puissance, il a gagné en sensualité et en intensité, et paradoxalement, en expérimentation. Une musique alternative à sa propre scène, puisque le ton général de l’album laisse à imaginer la rencontre céleste d’une Beth (Portishead) en accompagnement d’un Goem. Troublant et enchanteresque.
Dans cette foulée, Korm Plastics, en plus de la sortie de #1 d’Antenne offre à la formation l’opportunité d’être remixé. L’occasion pour le groupe de montrer, au-delà de leur talent intrinsèque de musiciens, les fins esthètes/mélomanes qu’ils se révèlent être. On s’offrira de longues plages de plaisir. Full Swing, dont on connaît quelques travaux pour Ritornell/Mille Plateaux (LP sur Orrthlong musork aussi) dans une veine très… Métamatics, filière électronique du prolifique Lee Noris (et son excellent groupe Tone Language) qui creuse un peu plus le sillage de KLF période Chill Out et quelques formations Mille Plateaux , Geiom qu’on a vu tourner autour de Skam ou avec Lee Noris justement (sur un autre projet, Small Medium) et qui développe de délicates intentions et enfin Accelera Deck, dont les albums sur Rocket Racer ont fait quelques dégâts (Warp rencontre Darla rec.). Une réussite.
JJ.

Antenne #1 (Korm Plastics/ Métamkine)
Here to go remixes (Korm Plastics / Métamkine)

 
       
   

Jérome Noetinger/Lionel Marchetti Mort aux vaches

La série Mort aux vaches de Staalplaat se tourne vers Mr Noetinger, l’occasion de faire acte (symbolique) du travail d’un passionné qui œuvre depuis presque 15 ans à offrir de nouvelles voies à la musique électroacoustique/improvisée/concrète au sein de MIMEO ou de la cellule d’intervention Métamkine, de documenter et de diffuser en France les potentialités et l’actualité des musiques de traviole, via Métamkine mail order/Revue et corrigée et les arts contingentés (Littérature, cinéma expérimentale) En résumé, un être attachant et passionnant qui pour l’occasion retrouve son ami de traverse, Lionel Marchetti. Les deux jeunes hommes ont travaillé avec de nombreux musiciens, parmi lesquels, Günter Muller, Jim O’Rourke, Christian Fennesz, Lequan Ninh, Pita, David Grubbs… la liste est vraiment très longue.
Des pièces ingénieuses, construites à partir de microphones, mégaphones, d’électronique de deuxième main, de mécanismes ludiques et d’huile de coude. Un travail essentiellement acoustique ou non amplifié, umplegged, dirait l’autre, un jeu de tension et de distance, de contrepoint, de frictions, de jeux et d’application méthodique. Disque de personnes averties à personnes averties.
JJ.

Jérome Noetinger/Lionel Marchetti Mort aux vaches (Staalplaat/ Métamkine)

 
       
   

General Magic Rechenkönig

General Magic et plus généralement les productions de Mego sont des projets (aussi différent soient-ils) excitants; excitants par les concepts, réflexions et sonorités qu’ils abordent et développent, excitants également parce qu’ils rentrent en conflit avec les vues réactionnaires de la société et du pouvoir établi qui sévit dans leur pays (l’Autriche), où comment voir un label comme une forme auditive de résistance et de militantisme. Rien que pour ses multiples raisons, il est important d’écouter Mego et General Magic, ce qu’ils ont à nous proposer. Cet album est moins esquissé que son prédécesseur, il fouille plus profondément les arcanes du rythme exhumant ici l’héritage de Pan Sonic, ouvrant là des interprétations aventureuses de l’électronique expérimental.
Distorsions, déflocage rythmique, grésillement cathartique, brouillage tendu émaille les compositions de ce second volet. Pas rébarbatif pour un copeck. Un aperçu de la maturité qui s’annonçait déjà dans leurs collaborations annexes. Vive le general Magic et ses troupes, vive Pita, viva la révolutionne, vive cette vision de l’Europe.
JJ.

General Magic Rechenkönig (Mégo/impt/Wave)

 
       
   

Michel Banabila & Hannes & bobby Cards on the tables

Une fois assimilé le nom de la formation qui plutôt que d’adopter un patronyme alambiqué a choisi d’agglomérer leur nom, une fois apprécié les qualités graphiques de la pochette qui se jouent des symbolismes et de la transparence, il nous reste cette musique et ce titre, qui, s’ils apparaissent ludiques, en disent long sur l’idée que les auteurs ont voulu donner à cet album.
Cette rencontre est la conjugaison de 3 artistes qui chacun dans leur coin ont collecté et stocké une somme de sons, sur disques durs sans prendre connaissances des travaux des autres.
Un travail d’autant plus ingénieux qu’à cette dimension d’inconnue se surimpose celle de l’incertitude. Les auteurs recommandent d’utiliser la fonction « Shuffle » afin de livrer à chaque écoute une nouvelle partition en 28 volets. Pour l’avoir testé, les assemblages m’ont donné, tour à tour des passages quasi ambiant, puis de longues embardés rythmiques dans l’esprit des premiers albums du subliminal Kid ; un film sonore qui se nourrit de lui-même et décontenance avec bonheur l’auditeur. L’allégorie n’est pas fortuite, puisqu’il aimerait par la suite donner une forme visuelle à leurs travaux et concepts Pour info, les musiciens sont Architecte, DJ et Poète à la ville et ils ont déjà commis de brillants et éponymes méfaits sur Voiznoiz2 ou Worm. Un jeu de hasards que n’aurait pas renié Paul Auster.
JJ.

Michel Banabila & Hannes & bobby Cards on the tables (Staalplaat/Métamkine)

 
       
   

Scratch Pet Land Solo Soli iii

Scratch Pet Land tiennent leur nom de leur première prestation publique dans un magasin « Pet Land ». Autant dire qu’un malencontreux hasard aurait pu les amener à s’appeler Scratch Castorama ou Scratch Kiloutou. Cette parenthèse close, on s’appuiera sur ce vieil adage qui veut que l’on ne soit jamais mieux servi que par soi-même et lui inclure en guise de conclusion… chez soi ; adage vérifié à l’occasion de la sortie de Solo Soli iii sur Sonig (label de mouse on mars) faisant suite à des maxis et morceaux divers sur Source, Skipp et Grand Royal. Les frères Baudoux, puisqu’ils s’agit d’eux sont belges, et aiment à irriter leur maman en pratiquant au fond du garage leurs assemblages irrévérencieux et inespérés, une alchimie claudicante et merveilleuse. C’est en effet dans la promiscuité de leur chez eux que les 2 frangins, en tongues ou en charentaises, selon la saison, briguent une place au soleil, avec comme voisins de transat, Stock Hausen et Walkman, XpernX et Mouse on Mars. Leur musique est jubilatoire et fraîche, avant-gardiste et méchamment mélodique quoique décousue. On ne saurait trop vous la conseiller.
JJ.

Scratch Pet Land Solo Soli iii (Sonig/Chronowax)

 
       
   

386 DX the best off

Quels résultats pourraient bien offrir la traduction littérale de Standard du Punk rock en point pascal ? C’est en substance la question qu’a dû se poser Alexei Shulgin en 1997, cette même question qu’avait abordé avec talent et espièglerie The Moog Cook Books et ses déviances Pereyienne. Dans les deux cas, ils ont trouvé une réponse. 386 DX est un hurluberlu de talent, qui, par l’intermédiaire d’un programmateur de voix artificielles et d’un software midi compatissant, a consciencieusement transcrit en langage binaire les fondements de la culture Rock : Jumping Jack Flash des Stones, Imagine de Lennon, Smell like teen spirit, etc. Les amateurs des versions originales n’y trouveront que peu leur compte. Le parti-pris de l’ordinateur donne à entendre des versions déshumanisées, affaiblies, amorphes presque sans saveur. Dans le même temps, les titres y gagnent en humour (le contexte de décalage). Vous vous la jouerez donc Buck Rogers à tenter de faire apprécier les traces de votre civilisation passée dans un futur anémié.
JJ.

386 DX the best off (Staalplaat/ Métamkine)

 
   
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