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Entretiens

  JadeWeb chroniques #10
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LES ENTRETIENS
. Bip-Hop .
. Travaux Publics .
. Mathieu Malon .
. Arbouse Rec .
. Active Suspension .

. Osaka .
 

MICHEL & MICHEL S/t (Autoprod./Relax Ay voo) [mèl]
Bien décidé à se jouer de la pesanteur, Michel & Michel édifient à grands appels de samples, de collages, de sections rythmiques un mausolée à la gloire du rapiéçage DIY et du bricolage home made. L’encombrement jouissif de leurs petites nouvelles sonores, la profusion tonale, l’accumulation et les clivages heureux qui s’y créaient interpellent puis séduisent rapidement notre engouement. Une pérégrination farfelue au pays des expérimentateurs.
Les morceaux, avec un aspect cyclique jouent sur la périodicité et la régularité des boucles pour créer une ambiance de songe et de rêverie. Est-on totalement éveillé ou déjà dans un sommeil avancé ? À rapprocher dans ses qualités de Scratch pet land et Palo Alto parmi beaucoup d’autres.
JJ.

 
   
 
   

LA GOUTTE S/t (Relax Ay voo)
La Goutte corrige l’aspect disciplinaire et académique de son be-bop à petits à coup de séquences électroniques et de fragments post-rock.
Même si l’on sait qu’une relation étroite s’est liée entre la scène de Chicago et ce quartet toulousain, on est forcé d’admettre que la filiation est puissante, l’efficacité des passages free jazz-néo rock ne fait qu'amasser le capital sympathie qu’on a à l’égard de ce groupe.
Difficile de ne pas s’humecter les lèvres de cette eau fraîche. Excellent et trop court (comme cette chronique).
JJ.

 
   
 
   

RJD2 Deadringer (Def Jux/chronowax)
RJD2 présente ici son premier album. Cette chronique, même si elle vient en recul par rapport à l’actualité de l’album nous offre l’opportunité d’en dire tout le bien qu’on en pense.
Omettre d’emblée l’aspect commercial de l’étiquetage ou des raccourcis vers DJ Shadow ou Moby, qui vantent les mérites du jeune homme. Certes, on retrouve une rythmique chaude sur laquelle vient se fondre une cantate blues d’avant-guerre, mais ça ne concerne au plus qu’un titre et reste parfaitement intégré à l’album.
On lui pardonnera ce trait de facilité pour s’attacher à l’univers de ce brillant compositeur, qui de John Barry aux séries de télé funky, en passant par la case properlerhead et Harmless galvanise son rap urbain et cinématographique.
Un vrai travail de rupture avec les clichés, même si la pochette ensanglantée évoque sans doute un règlement de compte mafieux, qui a l’intelligence de prendre sa matière sonore et sa source d’inspiration au-delà des portes de la cité.
Des titres compacts, directs qui pourraient trouver un malin plaisir à parer les scénographies étudiés d’un Guy Ritchie. Superbe.
JJ.

 
   
 
   

TUJIKO NORIKO Make me hard (Mego/Chronowax)
Difficile de dissimuler mon admiration pour cette jeune fée aux yeux mi-clos en provenance du Japon. Une voix hors du commun, un appétit pour la déconstruction évident, une grâce enfantine, une beauté espiègle, une insouciance et une désinvolture qui donnent, à l’occasion, vie à des collages loufoques de notre protégée (la tête de Tujiko sur un corps de canard en peluche, etc.) un charme malicieux, voilà de trois phrases résumées ce qu’évoque l’univers de cette jolie et talentueuse Japonaise.
La voix féerique dont elle pare ses petites constructions transparentes de jade et d’opaline, se révèle le plus souvent à nous aux détours d’un souffle, d’une exhalaison à peine audible… rajoutant en timidité et délicatesse à ces frêles édifices.
Rends-moi fort est sans doute un appel à entrer dans l’âge adulte autant qu’une angoisse à quitter l’enfance (le caractère malicieux et enfantin étant largement relayé par sa jacquette, assemblage drôle de photos et de petits croquis). Cependant ce qui fascine plus que tout chez cette jeune femme, c’est sa capacité à faire passer, sous couvert d’une petite trogne spectrale (et d’une voix qui ne l’est pas moins) des compositions extrêmement complexes qu’on croyait seules destinées à Fenn’o berg ou Pita… Majestueux.
JJ.

 
   
 
   

SUPERSOFT [14-18] / ANDY’S CAR CRASH Twin powers 1 (Partycul System/Chronowax)
Supersoft [14-18] inaugure un nouveau format pour une nouvelle série jusqu’ici délaissée par l’écurie Partycul System : le split vinyle (nommé ici Twin Powers). Un objet plat, sillonneux, troué au centre (un disque, en somme) sur lequel se joue la technique de deux groupes. Le premier morceau de Supersoft côtoie les crêtes aiguës de la furie free-rock : guitares triturées, rythmique en fusion, axe de composition portait vers un flot d’expérimentations et de radicalisation ; l’improvisation réalisée pour le compte de Christophe Acker et son film y étant peut être pour beaucoup. Puis, on retrouve les bases des arrangements qui ont fait le charme de l’île continent ; voix féminine exsangue et belle (Valley del Sor), titres post-rock, mélodiques et pastoraux. Décalé et agréable.
Là d’où vient la vraie surprise, c’est le retour d’un groupe vieux comme Hérode, le bien nommé Andy car’s crash, qui s’attache depuis maintenant deux ans à déconstruire dans leur atelier, patiemment le son pour en fouiller la nature profonde. Un titre inquiétant, sombre et hypnotique. Bernard Hermann flirtant avec Alma Fury.
JJ.

 
   
 
   

GEOGRAPHIC V/a You don’t need darkness to do what you think is right (Geographic/Chronowax)
C’est souvent par l’entremise d’une compilation qu’il nous est donné l’occasion de se forger une idée précise de ce qu’a à nous livrer un label.
Geographic, label qui a fait de quatre points septentrionaux son terrain de jeux, a pour ce premier jet décidé de cantonner son attention sur le continent européen en s’octroyant néanmoins un ou deux passe-droits.
D’un point de vue purement formel, le label dans l’esprit évoque bien volontiers la démarche de labels tels que Swim ou Shinkansen, où sous couvert d’une diversité d’approche véritable se cache surtout un attrait commun pour la belle ligne mélodique et l’abstraction électronica-pop.
Le fait que The Pastels ouvre le bal n’est d’ailleurs pas un hasard et donne d’entrée de jeu le ton (calme et exigeant). Se suivent dans un ordre aléatoire les toujours surprenants Futur Pilot Aka (déjà présent sur Sulphur, label de Robin Rimbaud), les excellents International Airport, Bill Wells Octet, Maher Shalal Has Baz, Empresse, Kevin Shields, Telstar Ponies…
V/a redessine la planisphère de nos émotions musicales les plus sobres et les plus mesurées.
JJ.

 
   
 
   

DAYGAL Musa-K & jessitt Kunda (Jungle Rendez-vous record/ import)
Daygal n’est pas le genre d’artiste qu’on à l’habitude de chroniquer. Originaire de Gambie, il nous envoie cette carte postale, composée entre son pays d’origine et son pays d’adoption, l’Angleterre. Sous forme d’un hybride de musique tribalo-traditionelle, de roots-reggae folklorique et de dub harmonique et populaire. L’ensemble sonne par trop commercial/facile d’accès et ne réussit pas à convaincre, sauf à de rares exceptions (Kanube) mais c’est sans doute la distance qui nous sépare de lui autant que le manque d’informations et de connaissances du sujet qui faussent l’objectivité de mon jugement. À noter la présence de David Toop sur deux titres dont celui qui donne son nom à l’album. Dispensable.
JJ.

 
   
 
   

El-P Fandamental remix (Def Jux/Chronowax)
Cette session de remixes, au nombre de six, se veut le relai furieux et urbain, épilogue de choix à l’éclatant album du rappeur hip-hop El-P. Six remixes, donc bâtis autour des originaux que sont Lazerfaces et Squeegee Man Shooting. La sincérité, et la franchise qui émanent de ces titres est à mettre en parallèle avec The Executionners, le Soundbombing crew ou le Sage Francis d’Anticon. Des scratches à la pelle, des lyrics ininterrompus et rageurs pour une musique chaude et émoussée. Indispensable aux aficionados.
JJ.

 
   
 
   

22 PISTERPIRKKO The nature of 22 Pisterpirkko (Clearspot/chronowax)
On est forcément admiratif de voir un groupe prolonger son entente sur plus de deux décennies alors que l’époque est bien davantage tournée vers les collectifs éphémères, les collaborations provisoires et les alliances momentanées. Il y a sans doute à y voir une force de caractère derrière cet état de fait autant qu’une amitié sans faille. Le fait que le groupe n’ait jamais percé à la lumière des médias n’est pas une coïncidence mais un élément (malheureusement pour le groupe) de la cohésion générale de celui-ci.
À vrai dire, le trois membres n’ont pas choisi la facilité en s’accaparant le patrimoine suranné d’une pop-rock énervée aux entournures avec un relent garage hautement perceptible à leurs débuts.
Une bonne manière de revisiter vingt ans de rock indépendant.
JJ.

 
   
 
   

MLADA FRONTA Oxydes (Parametric)
La texture ronde et granuleuse des compositions de Mlada Fronta, le rythme spartiate et métronomique de ses infrabass convergent avec une détermination exceptionnelle vers ce qu’il convient de nommer du genre électro-industriel. Pour autant, ce serait faire un affront à Rémy Pelleschi (par ailleurs dirigeant du label Parametric), que de ne pas voir au-delà des évidences rythmiques, quitte à écailler quelque peu la rouille, un sens aigu de la mise en forme d’abîmes dark-ambient.
Le rythme des morceaux, dénommé par des composants chimiques (C0, H20, Pb0, Li20, etc.) ne trouve d’équilibre que dans la changement constant de cadence, à la manière d’une machine inusitée qu’on ramènerait à la vie après une décennie d’abstinence. L’action, d’abord lente, plus soutenue devient en fin de course irrémédiable, incontrôlable. À rapprocher des créations les plus physiques d’Hymen, quelque part entre Scorn, End, Gom (+ - ~), Roger Rotor.
À signaler également sur le deuxième disque un excellent travail collégial où Gom, justement, Tarmvred, Dither, Mimetic, Data Raper, Milligramme, proposent de très intéressantes relectures de l’univers de Mlada Fronta, dans une gamme plus variées d’ambiances (plus électronique, plus brouillé, plus atmosphérique, plus breakcore : Miligramme).
JJ.

 
   
 
   

NO REWIND V/a (September of mrw 44) (No rewind/import)
Le calme apparent des photos très belles qui ornent la pochette (la rivière Almond et la London Road, semble-t-il) tissent une fausse réalité, puisque les groupes ici présents distillent selon leur influence, une noise émotive, sombre, émaillée, atmosphérique (Opaque) un émo-core racé, tendu, aux guitares parfois stridente (Hex), un hardcore impétueux et strictement instrumental digne du meilleur de chez Dischord, (Milgram) une symphonie bucolique et champêtre, aux consonances country (March of Dimes), du déstructuré façon Albini en moins urgent (Polaris), voir électronique avec Nimrod 33 etc. Amateurs d’émotions et de bruits intelligents, cette compile est la vôtre. Un catalogue aventureux et brillant.
JJ.

 
   
 
   

MILEVA Stories survive sequels (Diesel Combustible rec/Chronowax)
Un duo a cela de pratique qu’il permet accessoirement d’harmoniser les apports dans un rapport équivalent. Ainsi, Mileva a su harmoniser les caractères rémanents de ses géniteurs. Daniel Vujenic, électron libre de la scène contemporaine allemande et accessoirement membre du duo Stale et E-jugend (au côté de Joachim Henn) s’est fait une fierté de séquencer et de mettre en boucle l’intégralité des passages de piano, et des vibrations de violons mis à sa portée. Niko Lazakopoulos, sémillant élément actif du collectif génial Ma chérie for painting se chargeant d’ordonner, d’agencer, d’écraser selon ses propres termes le tout dans un temps record. Cette collaboration croisée donne au final une belle évocation entre le jazz éraflé de Dictaphone, l’atmosphère d’ailleurs de Village of Savoonga, les arrangements de guitares tristes de Thrill Jockey (the sea & the cake), les assemblages électro-concrets tourbillonnants de The Books voire Jon Sheffields et une touche de tristesse pour conclure, histoire de bien nous faire comprendre qu’il n’est ici question d’effleurement de l’âme. Un frère de sang de Fourtet avec un caractère plus expansif. Excellent.
JJ.

 
   
 
   

TRIBECA kate-97 (Labrador/Pop lane)
Tribeca est le genre de groupe-impulsion qu’on aurait aimé créer avec sa bande de copains après l’écoute compulsive et répétitive (pas moins de deux cents fois) du Autobahn de Krafwerk, du X de New Order et d’album de Migala ou Grand Daddy.
Si ces influences sont solidaires, pour ne pas dire indissociables de la musique de Tribeca, c’est pour mieux rebondir sur leurs structures, leur construction pour créer une chimère, un embranchement concerté de cette parentèle (quelquefois un peu encombrante). Lasse Lindh et Claes Bjorklund, les deux Norvégiens derrière l’iceberg Tribeca donnent de la pertinence à ce projet, même si on attendait certainement beaucoup plus d’une collision de styles si harmonieusement choisis.
JJ.

 
   
 
   

DING DAWN V/a Sightseeing (Ding dawn/indé) [mèl]
Le label nantais Ding Dawn nous convie à une visite de courtoisie et de curiosité , échafaudée autour d’entrevues privilégiées avec les protégés de son catalogue.
Cinq artistes se disputent ses faveurs. Dans un premier lieu Audio-room dont les deux morceaux ici présents sont extraits de sa précédente démo, par ailleurs fort réussie. Pneuma(s) et landscape 14 ont peut-être ce défaut d’apparaître parmi les plus impassibles de l’artiste, rappelant par images FSOL. Un très bon artiste tout de même.
Microclimat, pour sa part, défragmente l’héritage de DJ Shadow, mêlant abstract hip-hop, électronica, frère d’armes d’Abstract Keel Agram ; Ino, après quelques errances à installer son camp au chevet d’une minimal techno en prise à des accès de schizophrénie ; Elektiken articule ses compositions autour de l’idée de dancefloor, tout en empruntant à la diction d’old techno de détroit ; quant à Valgum knees, il se fait le défenseur, via l’univers électronique d’un hédonisme bucolique.
En résumé, de beaux efforts parsemés qui trahissent néanmoins un caractère un peu linéaire et par trop homogène.
JJ.

 
   
 
   

SCORN Plan b (hymen/Tripsichord)
Parti il y a de cela dix ans d’une idée floue, héritage brutal d’ambiances tendues et d’entrelacs néo-industriels, proches du Godflesh de Broadwick, Mick Harris a su, à force de travail, de méticulosité et d’un brin d’intuition bâtir un ouvrage ample dont la géométrie n’a de cesse de se déployer. Scorn est à ce titre une formation unique.
Une autre des qualités du projet est la remise en perspective perpétuelle de sa démarche, de ses objectifs "sonores", prenant constamment à contre-pied les attentes et désirs de l’auditeur.
Un mouvement perpétuel qui lui a fait longer nombre des tracés de côte de la musique analogique, de l’ambiant anémique, du dub urbain, des traitements cliniques d’infrabass jusqu’aux lentes montées analogiques vertigineuses en passant par la musique industrielle (nous l’avons dit) et le drum’n bass.
Plan.b est une production érigée sous l’étendard du label d’Hymen (faisant suite à deux maxi et un album), après avoir côtoyé sa structure historique Earache puis Invisible.
Cet album a tous les apparats d’une synthèse de ses précédentes approches, une maturation poussée .de grooves lents et urbains déroulant lentement leur réalité sur l’asphalte de beats lourds, pondéreux et distordus ; quelques apartés de click’n cut viennent agrémenter de leur apparition la trame compositionnelle, oxygénant pour beaucoup les atmosphères (jouissivement) insalubres des lieux.
Une évocation puissante, intense, inflexible d’un savoir-faire toujours en évolution.
JJ.

 
   
 
   

THE WALKMEN Every one who pretended to like me is gone (Talitres rec./Pop Lane)
Les trois petites gueules de terreurs irlandaises donnent d’entrée de jeu la teneur de l’album ; The Walkmen, même s’il pratique avec application et élévation leur musique ne sont pas ici pour rigoler. Les compromis sont gentiment éconduits ; la pratique de leur art passe, transite par l’utilisation d’effets sur les guitares, de tours astucieux sur les rythmes et autres mélodies estropiées. Mais en définitive, c’est surtout la voix profonde, rêche et éraillée d’Hamilton Leithauser qui tiendra notre attention en haleine depuis They’re wining jusqu’au terme (I’m never bored). À découvrir.
JJ.

 
   
 
   

YUNX So what type of music do you make (Yunx recording/import)
L’art d’ériger des instants privilégiés avec des musiques d’ambiance ordinaires est une gageure.
Yunx fluctue dans cette veine tout en privilégiant un académisme house proche de Detroit dans la superposition de ses sons. Un album, concentré de ses précédentes vacations sur Skam, Isophlux ou encore Pitchcadet et Void qui interrogent l’auditeur autant que le concepteur. So what type of music do you make ?  reflète la question récurrente que Yunx a dû essuyer au cours de sa courte existence.
Si l’ossature du concept est nourrie de house, les texture et membrane qui s’y adjoignent accusent un goût certain pour le jazz, pour l’électronica soyeuse façon Black Dog, pour le dub désarticulé , la folk-ambient méditative de Miuna.
Un éventail de choix qui reflète avec exactitude l’esprit d’ouverture qui gouverne le projet.
Une invention intéressante, d’un hybride des Artificial Intelligence compilation, pour les Warp & Skam addict ‘s.
JJ.

 
   
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