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JadeWeb chroniques #0 /
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Chris Clark
Clarence Park

(Warp/source)


Une vindicte musicale, un épanchement constant pour la déstructuration et l'appel au large. Une générosité des sources qui entrent en résonance avec la prolixité des atmosphères ; l'éclectisme est pour Chris Clark un doux euphémisme.
Et pourtant, rien ne semble laissé au hasard. Ainsi dans ce foutraque apparent des compositions se révèle une réalité toute autre, celle de la jeunesse (21 ans) et de la faim créatrice que rien ne vient rassasier, une alchimie sensible, une mixture où alternent les phases atmosphériques et calmes (Reen 1930s, fossil paste) et les embolies électro heavy (The dog) , digressions Plaidiennes (Diesel Roven). Un camaïeux disparate, mais hiérarchisé, une fougue avec en bout de course une constante à la légèreté, un appel à l'enfance et à la candeur qui désamorce toute velléité à la critique. On ressentira l'impétuosité de la jeunesse, le manque de recul (parfois) sur l'enchaînement des morceaux. Un refuge bienheureux cerné par les aspérités de Rephlex et les tentations pop-électro de chez Darla ou (Kraak) 3.
JJ.

 
       
   

Muslimgauze
S/t
(Staalplaat/Metamkine)

Rompu aux arabesques sonores de sa culture d'adoption, Brian Jones. ajoute en ornements et enluminures sonores, en sinuosité également à la grandiose architecture qu'il bâtit depuis vingt ans. La difficulté première étant l'emploi des temps lorsqu'on évoque cet illusionniste de l'instant, mort il y a de cela deux ans, mais qui continue à animer les passions et à grandir le cercle de ses supporters. Un album éponyme sous forme d'entrelacements éloquents où l'électronique se pare d'un visage humain, où la musique traditionnelle trouve un écho moderne. Muslimgauze a troqué le voile pour le linceul, mais donne toujours à entendre une conversation humaniste et passionnée (il a toujours combattu l'arabisme et ses extrémistes) entre un futur incertain et un passé lourd de son histoire. Comme si Virilio embrassait l'œuvre de Messaoudi…
JJ.

 
       
   

Louis Dufort
Connexion

(Empreintes digitales/Metamkine)
Jonty Harrison
évidence matérielle
(Empreintes digitales/Metamkine)

Empreintes digitales est le fer de lance de la musique électro-acoustique au sens où Metamkine pourrait la définir. Dirigé par Jean-François Denis, il est partagé avec SONARt qui lui distingue davantage les créations instrumentales de studio.
Chez Empreintes Digitales, le radicalisme esthétique est une constante, plaçant d'emblée les productions du label au rang d'objet d'art. Un soin apporté aux pochettes et aux disques, qui sonne comme un engagement quasi éthique, si ce n'est idéologique.
Toute cette génération de curieux trouve à présent un réel épanouissement, mûrissement de quelques années de pratiques laborieuses, de doutes successifs, dans le jeu de la construction de leur univers respectif.
On peut ajouter l'influence de l'école Française concrète (Schaeffer) référence évidente et revendiquée, notamment par Jonty Harrison, même s'ils s'inscrivent en réaction à l'académisme, à l'hermétisme et à la doctrine de la technique.
Ces auteurs ont le mérite de considérer l'époque pour elle-même et non à travers des mythologies douteuses ou fantasmées.


Louis Dufort, 31 ans, premier prix du conservatoire de Montréal, compositeur de la compagnie de Marie Chouinard, est un brillant iconoclaste. Il aime ainsi à intégrer des éléments non -musicaux dans sa trame musicale: "Objets, corps, couleurs et anecdotes sonores donnent lieu à des jeux de perception dans lesquelles est immergé l'auditeur. Les matériaux sonores sont ainsi trafiqués pour en soutirer des profils musicaux où poésie et représentation narrative du son servent de balises à l'élaboration de l'œuvre." La limpidité de ses travaux offre un profond vertige soucieux d'allier tradition et modernité. Ses compositions électro-acoustiques et atmosphériques sont empruntes d'angoisse, d'images pesantes et d'accalmies majestueusement fluides et dynamiques dans le même temps. Comme ci Francisco Lopez signé la BO de "la machine molle" sur Ant-Zen. Impressionnant.
Jonty Harrisson, directeur du BEAST, groupe de compositeurs Anglo-Saxon se plait à définir son album comme une flânerie sensorielle, déambulation libre le long d'une avenue idéalisée où les magasins sont autant de tonalités électroniques sur l'asphalte "concret". Une casserole, des déchets de consommation courante, tiges de métal, bruits de forêt, autant de sons bruts, d'objets usuels et d'environnements fréquentés qui prennent une tournure onirique et abstraite dans les mains de cet anglais de génie. Plus intimiste et académique, cet album calme et riche reste éblouissant de maîtrise. Site
JJ.

 
       
   

Phil Von & The Gnawa musicians of Fés
(Lytch/La Baleine)


L'attirance de l'Extrême Orient a toujours été une source insatiable d'inspiration pour les compositeurs Européens. On notera le chemin parcouru depuis Brian Gysin et les Masters musiciens of Joujouka .Dans cette confrontation entre l'électronique et la musique traditionnelle Extrême Orientale, les exigences posées par Bryan Jones (Muslimgauze) ont bien évidemment placé bien haute la barre qualitative.
Phil Von (leader de Von Magnet) s'est adjoint les services des musiciens de Fès à l'occasion d'un concert donné au lieu Unique.
Le plus dur, dans ce genre de performance, reste d'éviter les écueils trop souvent rabattus où Occident rime avec technologie et Maghreb avec traditionalisme.
L'angoisse est dissipée, la critique battue en brèche à la mesure des intelligences développées par les musiciens. Phil Von plutôt que de singer la texture si riche des instruments installe sa machinerie dans la mélodie, aux confins des silences, enroulant les lentes montées de gracilité électronique. La voix de Mohammed Moncef Al Kadiri, compteur d'un soir et son "divan de l'esprit" finisse définitivement de nous séduire.
Cet échange vrai (il n'y a plus ici de confrontation) a le mérite de faire apparaître les beautés cachées de nos deux cultures, leurs points d'ancrage et leur diversité. Une passerelle qui n'a jamais mis si prêt nos deux continents. Envoûtant.
JJ.

 
       
   

SI-CON
remixes the ghosts
(Artefact/chronowax)


SI-CON arrive à point nommé pour évoquer la résurgence de talents qui filtrent des frontières japonaises. La tonalité est clairement annoncée : Abstract Hip Hop japonais. On ne serait mesurer l'influence que la scène New-Yorkaise d' illbient (We, Spooky et consorts) et les déchaînements Hip-hop scratching des X-ecutionners ont apporté aux manipulations post atomiques des DJ japonais, mais l'impact est lourd.
Artefact, avec cette compilation, engage un travail de défrichage prolixe et nous rappelle la diversité heureuse des insulaires du soleil levant.
L'ensemble des formations affiche une prétention aux rythmes pas démentie. HeadRoc, avec son morceau Breakbeat "brand nu rock" impose d'entrée une secousse tellurique à la compilation option " arrachage de plancher ". Les élans rythmiques se calment par la suite et un soucis de moindre impact.
La remise en forme du fond hip-hopesque conduit à revitaliser le style. Ces travaux denses confèrent à l'ensemble un aspect expérimental (léger) et scratchant (prononcé). On laissera de côté les morceaux pour clubbers et les notes de piano qui se perdent en échos.
Après l'écurie Shi-Ranui, le trip-hop de Nigo, les sets furieux d' Ill Young Kim, j'en passe et j'en oublie, Artefact donne le ton juste d'une maîtrise sonore ès pacifique.
JJ.

 
       
   

Reznicek/Kubin/Mancha ipsonat/Legrand
(Disaster Area/Metamkine)


L'histoire ne dit pas si l'on doit interpréter le titre comme un hommage au plus lounge des compositeurs Français 60'….
Ce 10' se découvre avec une pièce lente, bâtie comme un morceau de Gorecki, par répétition lente et fluctuante, par addition succincte de sons, qui, graduellement, pesamment, imprime tension et puissance, jusqu'à la libération totale, où la boîte à rythme déchire l'opacité grondante, la texture lourde du morceau. L'utilisation de cloches d'église en introduction de Face B n'est pas sans souligner l'aspect liturgique qu'ils souhaitent imprimer aux morceaux. On a bien du mal à reconnaître le Kubin de A_musik (Klankrieg, Felix Knoth à l'état civil) qui nous faisait onduler du bassin, moulé dans des chemises marron cintrées. Il est accompagné ici de Guenter Reznicek (Nova Huta, Hammond pop) et de Mark Mancha (amoud Jacobs)
Une série de 3 10' (dont celui ci est le premier) verront se succéder Nocturnal Emissions avec "imaginary 99" puis Delphiums "self Vs self". Des morceaux qui recommandent une écoute prolongée pour vraiment s'en imprégner pleinement. Veuillez consulter la notice avant toute utilisation.
JJ.

 
       
   

Man
man
(DSA Mèl/Tripsichord)


Une tradition orale tenace voue à Man, groupe Nantais, un certain prestige, dû dans une large mesure à la qualité de leur prestation scénique. Ajoutez à cela l'attente et sa sœur d'arme l'impatience et vous vous retrouverez vite dans un état d'esprit euphorique à l'idée de partager quelques moments rares en leur compagnie. DSA, inquiet de voir l'album si mal distribué, a repris le flambeau en rééditant cet album sous ses armoiries.
Sage décision, à l'écoute de ces 10 pièces élégantes, nocturnes et fébriles, figures libres, créations d'un jet entremêlant free-jazz, avant rock et accords feutrés.
Le champs large des instruments employés (piano, rhodes, guitares, mélodica, basse, bruitage), les manipulations fortuites et l'instabilité calculée des compositions confèrent à cet album des atmosphères bancales et amples, en prise à l'hésitation, où l'humanité, la sincérité et l'humilité se dévoilent en filigrane. On s'imagine volontiers une nuit en voiture dans une ville américaine à regarder les lumières des boulevards défiler sous ses yeux. Etonnement, certains morceaux m'évoquent le "Lushlife " de Bowery electric, dans une version épurée.(#4), mais aussi Les Rachels, Shazam, Tiersen, Klimperei (la petite valse) et quelques repères cinématographiques.
François Biyikli et Charles-Eric Charrier, ainsi que Lara Moulny (violoncelle) et Pierrick Coheleach (leur contribution est merveilleuse) excitent notre attention et notre amour pour la musique, caressent notre sensibilité dans leur quête brillante de musicalité et de beauté.
JJ.

 
       
   

Paul Dutton
Mouth pieces
(OHM/avatar/Metamkine)


Pour être sincère, je ne connaissais pas ou peu Paul Dutton. Dès les premières expirations verbales, on sait qu'on a à faire à un maître. La virtuosité de sa syntaxe, la distorsion de sa glotte, les vacations et fébrilités de son larynx font glisser délicieusement ma mémoire vers d'autres adeptes de ce sport à risque : Joël Hubaut, Jaap Blonk, Christian Pringent, principalement.
Paul Dutton déploie ici un éventail de techniques (Percussions buccales, air forcé, inspiration soufflée) qui nous mènent vers des instants de transe quasi chamaniques, puis à des évocations-suffocations calmes. Une des singularités de sa technique est la place qu'il accorde à ses mains pour accentuer sur la résonance de sa voix, la guider vers des champs du chant vierges d'exploitation.
Un véritable art oral, où spasmes et borborygmes, grincements et harmoniques se côtoient sans se faire ombre.
Une œuvre de tout premier plan, où la gamme polyphonique des sons est passée au crible. Un album qui nous rappelle, une fois n'est pas coutume, que la voix (du moins sa voix) est de loin, le plus bel instrument mis à notre portée. Eblouissant. JJ.

 
       
   

Richard DEVINE
L.I.P.S.W.I.T.C.H.
(Warp/Source)


Richard DEVINE avec cet album, renforce notre perception du son Warp ; Il expose sans mesure un son classique, rythmiques hachées de ce qu'est le label Mancusien alors même que celui ci diversifie son catalogue de références.
Dans un souci de totale objectivité, il convient de noter le peu de recul que la musique de Devine prend avec le son customisé de la machinerie Warp. Souci de briser les rythmes… faculté à dissoudre les structures mélodiques trop établies, cut-up dansant, très réussi comme de bien entendu, mais qui ne laisse aucune surprise quant à son balisage de références musicales.
Là ou l'anglais tire son épingle du jeu, c'est dans l'alternance de phases rythmiques (l'abrasif et sémillant Kepter) et de plages très étudiées, plus proches de l'œil que de l'oreille. Des morceaux emprunts d'électroacoustisme (Ressource, increment Swap) qui nous prend à revers, nous obligeant à suivre le rythme de ses variations. La où un dilemme aurait pu naître, une certaine osmose se crée, chaque thème développé offrant un pied d'appel à l'autre.
JJ.

 
       
   

I'm Half Divine
Winter Class
(Onival/autoprod)


I'm Half Divine est une ballade irlandaise sans Irlande, un retrait doux au monde. De lentes mélopées pop-abstraites, de cette pop douce et délétère qui affûte la bonne humeur lorsque les beaux jours reviennent, qui donne à entendre de jolis textes, une voix sensuelle et expressive. Le chant en Anglais est divin. L'amertume est en liberté. Thibault Losson décline son monde et ceux qui l'entourent par la petite lorgnette de sa glotte. On ne manquera pas d'évoquer l'influence qu'a du avoir un Dominique A, des mélodies à la PAPA M, un peu de l'amertume d'Amber #2 et de Will Holdman. Une largesse de sentiments qui se combine ma foi plutôt bien avec la petitesse des moyens engagés. Et de déplorer une fois encore que des artistes aussi talentueux en soit résolu à sortir leur propre disque par eux-mêmes. Une école de la vie qui portera sans doute ses fruits dans le cas présent.
JJ.

 
       
   

Formanex
treatise-Cornelius Cardew/live in Extrapool
(Fibrr rec/Metamkine)


La musique de Formanex est à la fois figure libre et marquage imposé. Elle s'imprègne des nécessités techniques de l'architecture fonctionnelle tout en laissant libre champs aux formes les plus abstraites de l'édifice. Elle existe dans un équilibre exigu entre musique non-directive et écrite. Tout d'abord préciser le contenu: Formanex, petit collectif de 4 musiciens, se réapproprie le temps d'un concert donné à Extrapool, en Hollande, les compositions subtiles de C. Cardew, agitateur (piano, violoncelle) au sein du collectif AMM, première période mais aussi du Scratch Orchestra. L'interprétation des 4 pièces est commise avec un grand sens de la nuance, une grande dose d'intelligence eu égards aux aspects complexes qu'on y décèle (Cardew a été assistant de Stockhausen). Les instruments utilisés (saxo, guitares, basses, électroniques, percussion, électroacoustique), leur hiérarchisation dans leur entrée-sortie de scène, leur cohérence dans la structure du morceau, offre une appropriation bienvenue, originale, souvent détentrice d'atmosphères eidétiques fortes. On appréciera sans discernement la connivence étroite qui anime chacun des participants (avec en contre jour l'ombre de Keith Roth, peut-être) et l'esprit alerte de cette nouvelle structure, qui comme peu d'autres, n'a pas peur de poser un regard curieux (mais aussi critique), tantôt atmosphérique, tantôt bruitiste, tantôt expérimental sur toutes les formes d'expressions musicales et surtout de les faire siennes. A noter que cet album est la deuxième production du label Fibrr, qui doit être affilié (plus ou moins ) à l'asso APO33 de Nantes, et que ce premier prévoit un digital live radio session courant septembre, soit la 3ème signature. Très bon. Mèl
JJ.

 
       
   

Autechre
LED
(Warp/source)


L'éveil des sens aux musiques électroniques doit beaucoup à Autechre. Tant dans les franges du public que dans celles des concepteurs/créateurs. Pas étonnant, au demeurant. Rares sont les groupes à avoir su créer tensions, ferveurs, attentes, frénésies, consensus total, créant en l'espace d'une décennie un univers clos (car unique) et ouvert (à la multiplicité des champs de l'expérimentation), offerts aux changements. Autechre, ou les chantres modernes de la dodécaphonie Schonbergienne, perturbateurs d'équilibre. Les séquelles pressenties de ce groupe, pour peu qu'on aime la prospective pouvaient laisser présager une dérive salutaire vers l'abstraction, démarche logique d'une musique toujours plus déconstruite, toujours plus ciselée et inféodée à l'incertitude rythmique.
Le premier titre de L.E.D. semble nous donner raison , tant il porte en lui le germe d'une certaine forme de minimalisme, érigé au rang de science par Raster/Noton, Microwave ou les Material Series de Staalplaat.
Puis, sûrement, le rythme et la patte d'Autechre reprend ses droits avec des points d'orgues géniaux, Pen Expers, en étant un très judicieux exemple. Des contrastes, qui donnent à cet album une touche d'éclectisme et un peu de la vivacité perdue sur les précédents albums. Impressionnant.
JJ.

 
       
   

Herbert
bodily functions
(K7!/PIAS)


Bien davantage que les qualités musicales de ses albums, ce qui détermine sans doute le plus radicalement Matthew Herbert, c'est ce code moral qui sillonne en parallèle à ses compositions, à son parcours, qu'il se matérialise sous la forme des refus d'offres alléchantes ou bien sous les traits de sa charte déontologique, dogma intime, manifeste interne d'une rigueur personnelle jamais démentie (comprenant notamment l'interdiction d'user des fonctions des sampleurs préétablies industriellement, ou le plagiat de sources externes…) Bref, Herbert, qu'on l'aime ou pas, fait preuve d'un caractère fort, exigeant pour lui-même et ses contemporains.
De ce constat découle une vision plus en profondeur et en nuances de sa musique, de la house où le Jazz prend ses repères, qui brille de ces emprunts concrets et électroacoustiques. De même que Matmos use des sons "réels" dans leur post-électronica débridée, Herbert ré-intronise "l'intelligentsia house", harmonisant les rythmes chaloupés du Jazz avec une introspection de l'anatomie humaine. Le piano, son instrument de base/prédilection vient ici se réchauffer auprès des petites sonorités délicates et des timbres omniprésents de Dani Siciliano, avec des incursions de Luca Santucci (officiant également pour Leila) ou encore Shingei Shoniwa.
La messe est une nouvelle fois donnée: plus feutrée et clair-obscur que Around the House, la musique d'Herbert, transporte, davantage à la manière d'un transbordeur que d'un pont, nous laissant dans une position statique tout en nous offrant le privilège de contempler le fil du fleuve.
JJ.

 
       
   

Slam/Society Suckers
united on the Marpatk

(Peace Off)

Rendue évidente par la tension et l'urgence qui s'exercent sur nos rythmes de vies, Slam et le Society suckers crew refrènent notre goût à la monotonie et déchargent le surplus d'énergie contenu dans nos veines.
Comme en d'autres temps, les sports de contact permettaient un défoulement d'Adrénaline en règle, le Breakbeat-harsh-noise du collectif Peace off est un heureux palliatif, dérivatif. Il pousse l'acte musical dans son dernier retranchement, visualisant sans le perdre de vue la limite au-delà de laquelle nos pieds ne pourraient plus suivre la cadence…pour ma part, j'adore…ou quand DJ Grazhoppa rencontre Merzbow…
JJ.

 
       
   

Marc Sens
(Shambala Rec/Métamkine)


Le rapport de forces qui s'exerce entre une main et une corde est un phénomène étrange qui se soustrait bien souvent à l'analyse. D'où la faiblesse des thèses musicologiques en ce domaine. Si la potentialité technique d'un instrument et de celui qui le dirige est une chose qu'on ne peut omettre, la part d'humanité qu'on recherche, sans forcément se l'avouer, réside ailleurs. Shambala le sait et Marc Sens le fait…C'est dans ce contexte que le label a laissé un champ libre au guitariste pour improviser et apprivoiser sa guitare. Le cadre intime dans lequel le compositeur entrevoit sa musique nous est révélé au long de ces 10 déclinaisons. Pas de figures pompeuses, ni d'onanisme technique, tout ici est question de nécessité, de survie, d'honnêteté. On a du mal à croire certains passages tant ils semblent désincarnés de cet instrument au demeurant classique. Les ondes sonores sur "petite loop" sont prodigieuses, me rappelant un peu des effets d' Alan Lamb, moments de sérénité au milieu des strates vibrantes et des grésillements soniques tels que Plus loin, pluie Noire (Qui lorgne vers le bruit blanc à la fin). On notera pour l'anecdote la présence de Serge Teyssot Gay, membre de Noir Désir qui vient prêter main forte à Sens sur un titre, mais en avait-il seulement besoin? Beau, vibrant et introspectif.
JJ.

 
       
   

Home Made
V/a

(Home made/ mezig@37.com)


Sur les conseils avisés de JP (le talentueux et adorable patron de l'excellent Tek-Off) et de Mathieu (mon Grand ami), j'ai acquis la compilation home Made, fruit du labeur studieux d'un collectif ou d'une seule personne (mystère?) et qui décline en 10 titres et 5 formations l'idée élémentaire de ce qu'est la musique électronique tout pedigree en 2001. Ainsi, vous passerez de la jungle easy listening cheap et glamour de Iam mad vs Big Dill (avec un formidable sample d'Amicalement Votre) à Brad Pich, le chéri de ces dames avec une reprise éclairée et belle du Velvet (The Gift), plutôt dans une tendance abstract électro-hop superbe. Digne d'un DJ Spooky / David Shea. Puis Was'omatic all Stars et son Hip-hop bigbeat sauce Pharoah Sanders (le somptueux War theme) sympathique….Elena Cortes et sa voix ensorcelante et effacée ; enfin Stigmat (un petit breakcore basique et ludique). Difficile en faite de cerner chacun des artistes tant ils se frottent aux styles avec un talent scandaleux…Après Rubin Steiner et Volvo Traxx, la Touraine épate son monde en sublimant nos oreilles. on adore!
JJ.

 
       
   

Amp
Saint Cecila Sinsemilla

(Space Age recording/import)


Richard Walker est un architecte. Un architecte au sens où il compose à la manière d'un maître d'œuvre, en adjoignant dans un déroulement précis et logique chaque sonorités, chaque strates vibrantes, pour donner en fin de course une cohérence et une assise à l'édifice. Pas de divagation ni de parenthèse dans la musique d'AMP, juste ce qu'il faut d'humanité pour exister et de fonctionnalisme pour tourner. Les sons se propagent comme les ondes le feraient à la surface de l'eau, sans dommage ni obstacle, si ce n'est l'exigence de leur auteur et concepteur. La musique de Amp n'est ni dansante ni méditative, elle n'ouvre à aucun des sentiments classique de la gamme (dégoût, adoration, surprise).Cette musique capte l'air et la lumière et l'absorbe sans complaisance, juste parce qu'il fallait le faire. Space Age Recording est de la veine de ces labels discrets qui sillonnent avec élégance et dans la durée, la sphère des musiques vibrantes et évanescentes. Au rang de ses productions, mon préféré : Octal.
Amp sur Space Age? , peu surprenant en définitif, quant on connaît la ligne musicale du label, dont JB André à fait les beaux jours dans les colonnes d'Octopus. La ligne musicale, disais-je , entretient une petite parenthèse charnelle d'avec Ochre, Enraptured ou Kranky: loops agonisants et en perpétuelles mutations, détails fugaces de sonorités acoustiques, filtres et résonances.
Ce nouvel album, Saint Cecilia Sinsemilla est en résumé une suite heureuse à Astralboombeanprojections et à Stenorette (produit par Robert Hampson (Main-Loop) rappelons le), qui plane au dessus du sol davantage à la manière de la brume que du brouillard, trop volatile pour être sublimée, trop pondérale et présente pour s'élever dans les strates supérieures. Une musique ample et pourtant difficile à pénétrer qui s'autorise l'amertume comme ultime compliment.


JJ.

 
       
   

Le Hammond Inferno
my first political dance album
(Bungalow/labels)

En offrant un pied d'appel électronique à l'easy listening, Bungalow a su sortir de son ghetto capitonné d'initiés, ce style longtemps dévoyé par la critique mais ô combien chaleureux et chatoyant.
Sans se farder d'un historique, rappelons quelques grands moments de ce label, qui de la compilation Pop Tics (génialissime) aux révoltes pilleuses des Sushi V/a compilations qui auront offert aux torses des jeunes hommes un prétexte à se faire parcourir par des mains attentionnés. Le Hammond inferno assume cette paternité avec une fine aisance. Ils ont d'ailleurs participé à ces compilations d'artistes entre un défilé pour Vivienne Westwood, Un live act à Moscou, des tournées au Japon (6, plus que Scorpion!!!) une pub pour Nike ("Easy listening superstar") et une tonne de remixes (Jim avignon, Die Sterne, Fantastic Plastic Machine, Experimental Pop Band, Baxendale, Blochin 81, Gautsch, etc…) Sans crier pour autant au génie, on sirotera les 9 titres de cet album, comme autant de "Créole Crème" aux olives s'entrechoquant. Et annoncé un 12' avec "Move your MP3" et des remixes par Adamski et FPM.
Le Hammond Inferno, Soit Holger et Marcus est un concentré de Funk, groove, disco, hip hop et pop. Musique estivale, quand tu nous tiens…

JJ.

 
       
   

Jon Sheffield
it's been so long since i've seen
the ocean
(tomlab/Ici d'ailleurs)


Aux premiers abords, Jon Sheffield s'offre à l'écoute comme un écho des vues esthétiques et musicales de Sonig.
On est environné sur ce petit album par les sons et les divines irrégularités sautillantes, petites mélodies du dimanche. Paradoxalement, les créations ont une virulente maturité. La pochette, irruption contrôlée de néo pop-art où les pastilles colorées se superposent aux dessins faussement naïf est un prolongement réfléchi des morceaux.
Rapprochement de genres réussi, ,John Sheffield louvoie parmi les grandes pointures de ce style, écart facial entre Scratch Pet Land, Stock Hausen & Walkman et la tristesse harmonieuse d'un pierre Bastien. Les époques se mélangent (Moderne et traditionnel), les états d'âme également (joyeux et un peu splénique). Déconstruit et mélodique, cet album, comme les plaisirs simples de la vie (écailler la peinture d'un porte, fendre l'opercule d'un pot de Nutella avec un couteau) à une relation fugace au plaisir, raison de plus pour le répéter en boucle sur notre platine.

JJ.

 
       
   

GOM
(+- )
(RP/ La baleine)


Gom, en "Bat-Cav" reconverti (ex-Corpus delicti) a gardé de cette période, n'ont pas les petits chaussons de lutin à grelot, mais un certain savoir faire pour les atmosphères tendues et oppressives. Seulement, Death In June ne suffisant plus à son appétit musical, il a intégré sans relâche des perspectives sonores nouvelles. Des atmosphères de films noirs parcours les traverses d'usines désaffectées. Le tout auréolé d'une qualité d'agencement évident, quelques splendides passages digne d'un Nocturnal Emission ou des protégés de Prikosnovénie. C'est très bon.
JJ.

 
   
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