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JadeWeb chroniques #3 /
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V/a CAVAGE 6
Par tous les trous nécessaires
(Cavage rec) mèl

Cavage est la référence obligée d’une scène qui choisit le conflit sonore comme champ de bataille, comme pied d’appel à l’abstraction bruitiste. La pléthore d’artistes présents a une réalité assez directe, assez abrasive avec l’univers qui les entoure. Pour autant, on trouve sur ce disque une musique réfléchie, assez sereine, voire étonnamment ludique (L’abstract calypso façon Robert Mitchum de White Mellow Bean en est une preuve) ; des musiciens qui cherchent dans l’expérimentation une alternative à la rythmique binaire et (trop) efficace qui marque généralement le genre. Les ajouts de sons extérieurs, de glitch et de délits sonores perturbent et enrichissent les mélodies.
Lolita Killa donne ainsi dans l’ill-dub asphodelien, Ann’so & saoulaterre dans la cold-électro , Somatic Reponse dans l’agressivité breakcore cadencée …Avec aussi DXMedia, Nomex, Nayad, Metatron, Pisstank Vs Saoulaterre, Explore-toi, La Peste, Daempe, etc. CAVAGE 6, ou un triple pontage coronarien sur fond de musique de chambre.
JJ.

 
   
 

Philipp Scheffner
Fon ( Pong /Ici d'ailleurs)

Philipp Scheffner a un réel sens de la mélodie et de ce qui façonne le rythme, éléments qui font quelquefois défaut à d’autres membres de sa confrérie (si tant est qu’il se sente attaché à de quelconques courants). L’approche de cet Allemand, pour classique qu’elle soit, n’enlève pas la surprise et le plaisir que l’on prend à écouter ces morceaux.
En quelques tours de mains, il fustige un patrimoine riche où il n’est habituellement pas rare de voir l’apathie conceptuelle se disputer à l’anomie créative.
Nous viennent spontanément des noms et des exemples de travaux divers. Le tempo dub lourd et oppressant mêlé aux voix scannés n’est pas étranger à l’univers de DJ Spooky ; le goût du télescopage, de la scarification des infrabass lui donne un aspect imprévisible et maladif qui ne dépareillerait pas chez Wordsound.
Il honnit au passage certaines règles de convenance, dépréciant un peu la matrice " Ambiant - Atmosphérique " hérité d’Eno et de Toop, pervertissant ses courtes plages d’accalmie de champs jonchés d’infrabass, (nous l’avons dit) mais aussi d’éclats électroniques, de déchets rythmiques chers à Rephlex .On pense à The Weakener (Mick Harris) qui aurait bouffé l’écurie sonig au petit déj, à Shudo, à Richard D James sur Selected Ambiant Works… à plein de choses et à rien de précis dans le même temps. Très bon.
JJ.

 
   
 

René Lussier
Déboutonné (OHM / Avatar/ Métamkine)

René Lussier fait partie de ces hommes aux rêves simples et.a œuvré sa vie durant à les concrétiser.
Un sentiment mêlé de désir et d’angoisse surplombe cet album ; l’angoisse d’avoir à régler son pas sur les traces d’illustres prédécesseurs (de Frith à Hendrix en passant par Sonny Sharrock, Adrian Belew, John Fahey ou Robert Fripp), le désir de fouiller au plus profond de lui-même et de transcrire la sincérité en notes, en situations.
Un système des plus rudimentaires, la volonté de rendre sa création d’un jet brutal, un trait de fusain direct, et ce, via une guitare sèche, acoustique du dedans, avec un mode d’enregistrement spartiate, prolongeant l’idée de l’auteur à savoir " respecter l’intégrité du geste ". Un journal intime et sonore, une sorte d’exploration intérieure et de mise à plat de sa pratique, une entreprise qui met à nu René Lussier au long de ses 13 bornes.
Ce disque sous-tend également, l’aspect inutile et dérisoire de son acte, refuge d’humanité et de sincérité du geste, âpre et direct, aride avec de douces incursions mélodiques. Pourtant ce travail n’est pas vain et semble accompagner cette jolie phrase de Raimond Boni : " si on me coupe les mains, je continuerai à jouer de la guitare, parce que la musique, elle ne vient pas de là, elle vient du cœur".
JJ.

 
     
   

Electro : Lux 
L’île aux lézards (Microsphere rec)

La quiétude et le perfectionnement qui caractérise cette Île aux lézards, sont le fait du label Microsphère rec. On pourrait tout aussi bien concevoir cette île aux lézards comme une lente déambulation le long d’un fleuve, une chasse au trésor imaginaire ponctuée de lieux forts, de paysages sonores et d’essences exotiques. Un groupe qui a déjà fait ses armes (Ultracortex) aux côtés de Max Bodson (Patton) à la production, et quelques concerts clairsemés avec Movietone, Calc, Piano Magic, Fly panam, 22 pisterpirko. Un processus de composition limpide, encadré entre la torpeur incandescente de Tortoise, la tension fébrile de Bastard et un dosage aérien d’électronique feutré (Isan?FSOL?) et de samples cinématographiques désincarnés (toujours présents pour rehausser la musique). Un album d’apparence simple, mais qui se dévoile somptueux à la deuxième écoute.
JJ.

 
     
   

Enihcam
La grande photolase (Hod/Prikosnovénie/ La Baleine)

Issu d’un néologisme probablement emprunté au vocabulaire de la biochimie pour indiquer la décomposition par la lumière (photolyse) Enihcam veut signifier, par ce titre les évolutions riches et les changements d’orientations prises par le groupe.
Un travail de textures, où les filtres électroniques, la scansion des voix, la détermination des textes, travestis en souffrance par le biais de filtres analogiques, interdisent toute écoute lascive. Une traduction contemporaine des premiers Neubeuten, une approche un peu dadaïste (Tristan Tzara, est-tu là ?) où le phrasé est haché, amplifié, scarifié jusqu’à être dissous dans la mélodie. Une voie stridente parasitée par l’électronique et le collage. L’ambiance n’est pas avenante, elle irrite nos sens. Les cinq premiers titres me laissent un peu perplexe. Le radicalisme du chant indispose, une forme de souffrance qu’on a du mal à accepter. On peut y entendre une accointance marquée avec Braaxtaal (le très bon groupe de Jaap Blonk ), notamment sur le quatrième morceau.
Dès le huitième, l’accalmie reprend ses droits et se déroule alors le story board d’un court métrage post-rock où la rythmique répétitive vient réchauffer notre isolement sensoriel. Un album avec de belles atmosphères mais quelque peu en dents de scie.
JJ.

 
     
   

Martin Meilleur
Tango (OHM/ Avatar)

L’ubiquité est un des éléments de la déité. En infiltrant le territoire des ondes courtes, Martin Meilleur  prend à bras le corps les vestiges de la communication mondiale, ceux de l’ère hertzienne. Une capture spartiate et brute, au microphone, éphémère, une accumulation de sources où les interférences ; vents solaires, champs magnétiques viennent modifier les ondes où se confondent discours politiques, cantates, musique javanaise, rapport de guerre, brouillage, paroles et voix en perdition. Une compression d’informations pour tenter d’en comprendre le sens, un décryptage artistique, témoin d’un monde mouvant et en mutation. Une superposition des mondes, de cultures, qui provoque un sentiment d’ubiquité (nous y voilà) et d’universalité. Une utilisation rationnelle et méthodique, centrée sur les ondes courtes, un passo doble entre cultures et continents, temps et lieux dans un pendant calme et minimaliste d’un Ground Zero.
JJ.

 
     
   

Bobby Conn 
The golden Age (Thrill Jockey/ PIAS)

Bobby Conn n’est pas la moitié d’un musicien. Comme si Mark Bollan avait dérapé volontairement sur l’asphalte humide du Glam, de Captain Beefheart, du Velvet et de Billy Joel en passant par le bas côté herbeux où des restes de Prince, de Supertramp et de Zappa terminent la chute. On glisse sur pas mal de styles, reconnus et prônés dès les premiers accords de cordes et de cuivres. C’est grandiloquent et symphonique, lo-fi et grésillant comme sur un autoradio. L’iconographie et le graphisme assument et honorent la paternité de David Bowie / Ziggy Stardust.
The Golden Age, c’est un peu ces sales habitudes qui gouvernent notre quotidien et dont on aimerait bien se débarrasser, ou au moins passer sous silence… mais qui invariablement reviennent par la grande porte. Ces musiques honteuses qui hantent nos têtes, du saut du lit à la dernière douche. Un malstrom un peu inclassable, souvent inconsistant, atemporel, petite musique de chambre du pauvre, bidouillage mental de compiles glanées dans les bacs à solde, fréquence hertziennes parasitées.
Comme pour conforter nos angoisses, l’ami Bobby, s’est adjoint l’aide d’autres amateurs de second degré, parmi lesquels Glen Kotche (Wilco), Josh Abrams (Town & Country), Thymme Jones (cheer accident, brise glace), Jim O’Rourke, John Mc Entire, Fred Lonberg-Holm, Jed Bishop… Une façon de nous dire que même si l’ensemble sonne un peu kitch et ringard, c’est avant tout truffé de bonnes idées, bien placé pour devenir un fondement de la musique populaire hertzienne grand public / underground.
JJ.

 
     
   

Olivia Block 
Mobius fuse (sedimental/import)

La part d’improvisation qui gouverne les travaux d’Olivia Block est sans commune mesure avec l’instinct qui guide ses compositions.
Après avoir gratté le manche dans The Marble Index, elle s’est aventurée dans l’interprétation des champs sonores. Loin de désirer la marginalisation, elle se considère comme une généraliste, s’évertuant à joindre et relier espaces et sons en une entité commune, cohérente, identifiable.
Un premier album comme une balise perdue au milieu de la brume, repère évanescent coincé entre Star of the lid, Low et Francisco Lopez (qui encense d’ailleurs cet album).
L’approche conceptuelle qui anime cette jeune femme tient autant des orientations minimalistes de Bernard Günter que de la quête environnementaliste poursuivie par Francisco Lopez.
Segments courts d’espace nocturne, champs magnétiques, instruments acoustiques, composants électroniques, tout concorde ici pour distancer le monde de la présence humaine, et caresser du doigt les faux silences de ce qu’on croit être la nature. Un jeu de faux-semblants, un trompe l’oreille brillant et extrême. On pense au Outside the circle of fire de Chris Watson (Touch rec.) sur le premier morceau; Le second, plus mélodique, où les trombones prennent le relais des crépitements, évoque un chant de mort nocturne où la mélancolie des travaux de Pauline Oliveros sur Table of the element n’est jamais loin.
JJ.

 
     
   

Phonophani
Genetic engineering (Rune Gramophon/Universal)

Genetic engineering se dépeint comme une lente circonvolution atmosphérique où les délicats arpèges de filtres égrainés à la face d’un vent doux et caressant se chargent dans leur lente montée de fines aspérités volatiles. Les crépitements se font rythme, les soupirs vocodés se font chants, les alcôves sonores minimalistes se font symphonies du dedans.
Un album fait de bribes de peu de choses, de samples transfigurés et de collages minimalistes éclatants. On pense aux constructions opaques d’Encre dont les sections à cordes se seraient égarées au milieu de la Toundra, à la plénitude Scornienne, aux travaux steppique de Penumbra rehaussé d’humanité et de panache électronique, à la clarté acoustique de The Marilyn decade, également.
La musique d’Espen Sommer Eide est un micro-organisme invisible qui contamine notre inhibition par sa propre inhibition et dont les particules pondéreuses, la pesanteur et la beauté étouffante tendent à nous asphyxier, à notre corps défendant, pas si défendant que ça, d’ailleurs…
JJ.

 
     
   

Gotan project
S/t (Ya Basta ! / discograph)

C’est aux confins de l’Amérique du sud que s’est développée cette danse suave aux rythmes lents et chaloupés, le tango. Gotan Project se réapproprie le temps d’un album (et de quelques maxis) cet héritage lourd d’histoire. En intégrant à ces mélodies argentine (rappelant quelquefois le Milonga ou la Habanera), des gimmick house… Ils ont su conquérir l’attention d’un gotha de DJ parmi lesquels Gilles Peterson, Thievery Corporation, Peter Kruder, Rainer Trüby, Jazzonova, Herbert, Mr Scruff… Le ton est empreint de nostalgie, de spiritualité et d’énergie contenue… les amateurs curieux de house y trouveront sans conteste leur compte… Rien ne nous dit, par contre, si les amateurs de tango en auront pour leur argent.
JJ.

 
     
   

TV Pow
Mort aux vaches : being nice is funny (staalplaat/ metamkine)

TV POW est un trio d’improvisation qui s’est structuré, dans un premier temps, autour de Michael Hartman et Brent Gutzeit, auxquels est venu s’adjoindre par la suite Todd Carter. Ils ont déjà enregistré sur Gentle Giant Records, Box Media, Fire Inc ou Erstwhile records.
La création pure qui se dégage de leur performance doit autant à la filiation incertaine qu’ils provoquent entre les objets sonores : samples, électro-computer, tourne-disques trafiqués, micro capteurs boucles, magnétophone, percussions, qu’à leur propre souci de détourner ces sources primaires par l’ajout ou le retrait d’éléments, en vue de réinventer un univers sonore inconnu ou du moins de coller au plus près à leur attente. Cet album, issu de leur première tournée européenne de 1999 est à mettre en filiation avec l’école électronique minimaliste, dans un créneau proche de Björgulfsson, Thilges 3, Inada, Massimo, voire Goem. Une musique de paysage sans fin, où les drones atmosphériques et les boucles cinématiques roulent sur la terre battue à la manière de ces boules de branchages dans le désert. Un univers angoissant, fait de crépitements et d’instants raffinés et méditatifs, capturés au vent et qui aura su charmer en d’autres temps des performeurs tels que Otomo Yoshihide, Erik M, John Butcher, Town and Country, James Plotkin, Stilluppsteypa (Björgulfsson), ou encore Taku Sugimoto.
JJ.

 
     
   

Ambient aero Jam & loop bbo
(Rien à foutre rec.)

Cette compilation, partie comme une blague, donne une assez tangible perception du panorama souterrain des musiques post-industrielle et pro-atmosphérique / électronique. Et de même qu’un engrenage en entraîne irrémédiablement un autre, chacun des morceaux décline avec goût un thème poétique et contemplatif d’une variation qui se crée sous nos yeux, au fil de ces neuf morceaux.
Parmi eux, certains ont déjà contribué à l’essor et à la bonne tenue de la scène hexagonale. De Piccolo Saxo et ses ambiances tendues et spatiales à son alter ego Finalcut (et une recherche qui convie Scanner et David Shea) à Liquid Sphère, avec un morceau teinté de Muslimgauze urbain qui tranche avec l’excellent album paru chez Shambala rec. ; Gasp moitié de Baka ! avec deux morceaux splendides de limpidité et de quiétude dignes du meilleur de Fridge ; Jean Louis Prades sous son projet solo Imagho (autre membre de Baka !) avec un When I dream of David Ardell, plus abrasif et répétitif qu’à l’accoutumé ; Rigel, et un casparian strip méditatif et environnementaliste (un peu de Aube dans tout cela, mais pas que) et enfin Tempus Fugit clôt cette session et nous rappelle avec agilité et intelligence, à la manière de Silksaw que l’électronique névrotique a aussi son mot à dire. Cet album aurait tout aussi bien pu faire figure d’additif au très brillant fanzine Feardrop. À tous ceux pour qui les noms de James Plotkin, Troum, Origami Republika, Sonar, Scorn, Ab Ovo, Tribe of Neurot, Monolake, Denis Frajerman, etc. signifient quelque chose…
JJ.

 
     
   

Two lone swordsmen 
Further reminders (warp / Source)

Après deux albums chez Emissions Audio Output (le très bon Stockwell steppas, notamment), aux connotations électro-dub ambient, trois albums chez Warp dont le splendide et incontournable Stay Done et le dernier et turbulent Tiny Reminders, revoilà les deux compères Tenniswood et Weatherall dans la course, à l’occasion d’une relecture publique d’extrait du Tiny reminders, confiée à des personnages décalés et inattendus… Une approche originale, puisqu’on retrouve pêle-mêle des habitués de dancefloor tel que Villalobos dans un pendant techno brut ; Cause est un Rotting Hill Carnival tonitruant mais classique ; dry & Heavy dans une version Shermanienne de Neuflex, et des structures plus pop telles que Lali Puna ou Calexico. Comme à l’habitude, même si l’idée de remixes est louable, voire ludique pour les intervenants, il n’en demeure qu’elle laisse souvent un goût d’inachevé et de décousu (les titres présents n’ont pas l’unité de l’album). Et même si Decal, Klart puis Calexico et Lali Puna tirent leur épingle du jeu dans ce contexte imposé… On reste un peu sur sa faim, d’autant que ne figure pas Machine maid, que la curiosité m’aurait bien poussé à entendre remixé. Un bon album mais qui manque d’unité sur la longueur.
JJ.

 
     
   

Kozo Inada
c[ ] (Selektion/ Métamkine)

À l’exclusion de c, voilà qui ferait un judicieux sous-titre thématique dans l’œuvre naissante de ce Japonais, conduit par une philosophie où l’attrait pour le subconscient voisine avec la recherche harmonique d’un silence inorganique. Autant dire que la mélodie n’a ici pas voix au chapitre, même si les harmonies déployées ne sont pas sans une certaine élégance vibratoire. En un mot résumé, Kozo Inada égrène l’espace, délite les strates du champ solaire et tente de qualifier avec humilité mais détermination ce que pourrait être la sonorité du vide. Difficile quand on connaît la difficulté (doux euphémisme) du son à se propager sans air.
C’est un peu de cette difficulté qu’il faut faire sienne au long de ce disque, ingénieux raccourci entre les thèses de Ryoji Ikeda (effet cabinet d’orthophonie) et les propositions théoriques d’Hazard (qui passe ici pour un joueur de vielle médiévale) ou des labels raster/noton même. Étrangement, c’est pourtant quand le silence se fait qu’on a du mal à taire un sentiment confus où la douleur est indicible.
JJ.

 
     
   

Thilges 3
Mak (Thilges/ wave)

Sous un malstrom sonore incandescent, un déluge électronique futuriste et vindicatif, les membres de Thilges 3 ont convié l’orchestre militaire autrichien à contraster ce trop-plein d’électronique en jouant une pièce d’Ali Schindloffsky, Logos, œuvre néo-classique proche de Gorecky (l’attaque par nappes successives) ou des Rachel’s. Un instant de raffinement enclavé, qui évoque des images de détresse folle et de poésie suspendue entre deux tirs d’artillerie (le troisième morceau rappelant La chevauchée des walkyries sous acide).
Cette pièce, mak est une composante, la sixième à ce jour, d’une performance (paradoxe) donnée à Vienne au Museum für angewandte Kunst (littéralement Musée des arts appliqués). Elle fait ainsi suite dans cette série à Hackerbrücke, Dr.Kern, saumarkt, vekks et rosner.
Ceux qui ont découvert Thilges 3 via la material serie de Staalplaat ne doivent pas s’attendre à la magnifique maîtrise analogique présente sur Polka ; tout au plus doivent-ils imaginer un frère de sang plus chahuteur et imprévisible.
Un aspect complémentaire du travail de ces Autrichiens, décidément foutrement talentueux et surprenants.
JJ.

 
     
   

Prefuse 73
Vocal studies and Uprock Narratives (Warp / Source)

Nous vous en avions déjà parlé dans un précédent numéro de Jade, l’album de Prefuse 73 est une pure merveille d’antagonisme musical et de collision rythmique. Tendu et feutré, Scott Herren (M. Savath & savalas entre autres) offre au monde un album splendide et sans égal… Ou quand la musique se suffit à elle-même…. À se procurer absolument.
JJ.

 
     
   

Maschinenschlosser
Orange Noise (dbeltime/import/ mdos.at)

Même si l’évocation d’Orange noise n’évoque rien en votre for intérieur, Christian Stefaner n’a pas attendu l’année 2001 pour exprimer en musique ce que l’absence de vocabulaire lui interdisait jusque là. Sa discographie, loin d’être pléthorique nous rappelle que depuis neuf ans, et sous trois patronymes distincts (Neat, Persuaders et Maschinenschlosser), cet Allemand a cherché à illustrer (par touches succinctes et attentionnées) puis détailler les nuances existantes au sein de la musique électronique à filiation ambiante. Dès les premières mesures, on pense avoir affaire à un amateur zélé de Brian Eno avec quelques dérives synthétique à la Steve Hillage (!!!) Puis Onda 1 et les titres suivants nous rassurent quant à l’éthique expérimentale qui planait sur l’album. (Un rioji Ikeda qui aurait mangé du plomb) Onda 4 est à ce titre flagrant. On pense aussi à Disinformation et fabt sur Touch. Puis on dérive subrepticement vers des dérapages contrôlés assez violents à la Farmer Manuals, quelques drones et feedback plus tard, un Funky ericsson assez drôle dans la vue, on clôt le voyage avec la internacional, moment d’accalmie (mérité) en forme de comptine pour enfant fatigué.
JJ.

 
     
   

Plaid 
Double figure (Warp/ Source)

Le RestProof Clockwork était déjà à placer auprès de ces albums multidimensionnels qu’on écoute en toutes circonstances, par tous les temps et en toute compagnie. On peut y ajouter le Music has the right to children de Boards of Canada et le Stay Down des Two Lone Swordmen. Ce Double figure, sorti cet été, n’a pas de grandes difficultés à joindre ce trio de tête.
Ed Handley et Andy Turner ont décidé, à la manière de Dorian Gray, d’établir un contrat tacite avec le diable, en échange de quoi leur sont offert la facilité d’écriture et un sens de la mélodie sans mesure. Si Trainer avait surpris (les débuts de Plaid étant beaucoup moins orgiaques en mélodie accrocheuse, plus directs, en somme), Double figure conforte l’inclinaison au bon goût, l’esprit alerte et l’intuition qui siéent si bien aux chercheurs. Un arbre mélodique et structuré qui ne doit pas cacher la forêt d’expérimentation sur la fluctuation du son, par exemple. Double figure doit certainement être interprété comme un volet, le dernier du triptyque.
Cet album est exsangue de compromis ou de forme musicale pompeuse et affadie. Quand rien ne vient masquer le soleil plaid.
JJ.

 
     
   

Le Népalais
Bons baisers de nulle part (Partycul system)

De la chanson à texte avec des prises de son brutes. Assez nostalgique, les compositions empreints de Georges Brassens et les textes de Bobby Lapointe et de Julien Baer sont tour à tour mi-humoristiques, mi-poétiques. Un album étrange, frais, se jouant des mots avec beaucoup de dextérité, mais qu’on n’écoutera pas non plus en boucle même si Picasso niet, Dalida reste un must. C’est une production Partycul system, le label de Rroselicoeur et d’autres brillants groupes que je vous invite prestement à acheter.
JJ.

 
   
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