SOMMAIRE

ENTRETIENS


A LA LOUPE
Le label SOFTL
Le label V/VM
Le label Z & Zoé

Chroniques de
Julien Jaffré

[Contact]

CHRONIQUES 19

CHRONIQUES 18
13 & GOD.WORLD STANDARD. TROY VON BALTHAZAR. VLAD. L.PIERRE. THE REMOTE VIEWER. Robin FOX. FS BLUMM. POPULOUS. THE GASMAN. SINISTRI. Keith FULLERTON WHITMAN/ greg DAVIS. PXP. THE KONKI DUET. LAUTER. MARGO. JASMIN01. Alexander PETERHAENSEL. Dino FELIPE. V/a RONDA. TARAB. LOOPER. Masha QRELLA. COLEMAN/ HAUTZINGER/SACHIKO M/YOSHIHIDE. Jon MUELLER. The CHOPSTICK SISTERS. The WILD BUD. The DAYS. ELEKTROPHONVINTAGE. ROOM 204. OBADIA. Ben GIBBARD/Andrew KENNY.Ronnie SUNDIN. Xabier ERKIZIA. PASTACAS. LOUIS. ROOTS MANUVA. THEODORE. ENON. SETTLFISH. THE THING. V/a TOYTRONIC . OCHRE. 3PCONCEPTS. ABRAXAS PROJECT. SHANE COUGH. NAVEL. MLADA FRONTA. John CONVERTINO. AMON TOBIN. STUNTMAN 5. SKUGGE & STRAVOSTRAND.FENIN. ECHO DEPTH FINDERS. IGNATUS. COLLEEN. PERCEVAL MUSIC. SPRINGINT GUT. SNA-FU. V/a TALES OF THE UNREST.Michael GALASSO.Johzn SKUGGE. BUSDRIVER. INNOCENT X. SUPERCILIOUS. THE PREFECTS. RUBIN STEINER.

CHRONIQUES 17
John ZORN . KAADA / PATTON . THE BERG SANS NIPPLE . KILN . SOLVENT . PAN/TONE . Alexander RISHAUG . BLACK EYES COUGH . Damien MINGUS . Stepahn MICUS. Q AND NOT U . STYROFOAM . DANA HILLIOT . O.BLAAT . PROPERGOL Y COLARGOL . Vitor JOAQUIM . PSYKICK LYRIKHAH . KAMMERFLIMMER KOLLEKTIEF . BJORGULFSSON/ PIMMON /THORSSON . HANALEI . TETRAULT/ OTOMO . THE PATRIOTIC SUNDAY . MORCEAUX DE MACHINES . POLA . AUTODIGEST . DIE WELTTRAUMFORSCHER . GOO . PATRICK WOLF . STATE RIVER WIDENING . WILLIT/ DEUPREE . MARCLAY . MOUSE ON MARS . GRAILS . SUN PLEXUS . EPSYLON ZYGMA CLUB . FRANCESCO ARENA . LUDMILA . Michaela MELIAN . FS BLUMM . HENKE . ENCRE . V/a NOISE &THE CITY . V/a NEUROT . FORMANEX . REUBER . TILIA . INFANT . ENABLERS . ILIOS . V/a MONIKA FORCE . TREVOR DUNN S TRIO . SUSANNA & THE MAGICAL ORCHESTRA . ISIS . MILGRAM. SKOLTZ KOLGEN . V/a PORC EPIC . ARMAND MELIES . RD16 . KREIDLER . BLOOD AND TIME . MARSEN JULES . AETHER . NIMP . SUPERCILIOUS . TOOG . RUBIN STEINER . MATTIN/ WORKMAN . ICHLIEBELOVE . PRINCESSE ROTATIVE . STAFOENN HAKON . CANCEL N. PARESSANT . THE SOFT RIDER. KAMIDO TU . MALAUSSENE Vs BANGA . JAMES T COTTON . ANA . GREG HEADLEY . NOWHERE . SOFUS FORSBERG. OBNY . LOSOUL . OHM EDITIONS/ AVATAR . KOTRA . BORISOB/ NIKKILA.

2004
CHRONIQUES 16

COBRA KILLER . TRAVAUX PUBLICS . V/a STAUBGOLD . KARATE .. LALI PUNA . KERRIER DISTRICT . STRATEGY . Pascal SCHÄFER . V/a Antologia de musica electronica portuguesa . FIRE WERE SHOT . SWOD . PATERAS/ BAXTER/BROWN . SCHURER .. @C . ADAM WILTZIE . RAN SLAVIN . THE ETERNALS . CHILDRENS OF MU . MAX EASTLEY/ DAVID TOOP . CHARALAMBIDES . ANGIL . BIP-HOP VOLUME 7 . EYVIND KANG . COCOON . VENETIANS SNARES . LULLATONE . Corker Conboy . POST INDUSTIAL BOYS .. STEPHAN WITTWER . GROWING . ILIOS . YANNIS KYRIAKIDES/VEENFABRIEK . MINIT . THE GO-FIND . MICHAEL J SCHUMACHER . MILOSCH

CHRONIQUES #15
BATHYSCAPHE . TRAVAUX-PUBLICS . SPEKTRUM . LUNT . BAKA ! .. V/a MUSIK EXPERIENCE . LANGUAGE COMPUTER . AGF . Tô .. TRICATEL . MEN’S BEST FRIEND . MAX HAIVEN/JON VAUGHN . V/a List . RYOICHI KUROKAWA . SKETCHES OF PAIN . MINOTAURE SCHOCK . Z_E_L_L_E . V/a Rural Psychogeography . MARGO . FORMA. 2.03 . FAUST Vs DALEK . MANITOBA . COURTIS / MARHAUG . LUCKY R’ . EXPLOSIONS IN THE SKY . REMARC . JOSH RITTER . GROWING . CHRISTIAN RENOU/ANEMONE TUBE . BREEZY TEMPLE . GUINEA PIG . V/A Kraakgeluiden doc1 1999-2003 . DIRGE . ATONE . HARPAGES . DEPTH AFFECT . REBECCA . JONO EL GRANDE . SKYPHONE . PUYO PUYO . MEAT BEAT MANIFESTO . WESCHEL GARLAND AND WORLD STANDARD . BRAILLE . HAMLET . O.Lamm & Sutekh . V/A HAUNTED WEATHER . MITCHELL AKIYAMA . ALEX GARRACOTCHE & STEPHAN KRIEGER . FUNKSTORUNG . HELIOGABALE .. THE SIDE OF JORDAN . FROM:/TO:  . RAUD & HOLLAND .. EXCAVATION SONORE . HYPO . THE LOOP ORCHESTRA . CLOUDHEAD . PAULO RAPOSO & MARS BEHRENS . V/A Nothing but a Funk Thang . Jorg PIRINGER . KID SPATULA . AIRPORT CITY EXPRESS . EPSYLUN ZYGMA CLUB . SUGAR PLUM FAIRY . Jean Luc Guionnet & Eric La Casa . CM VON HAUSSWOLFF . JOHN BUTCHER . YEYE . Pierre BONDU . MINIMALISTIC SWEDEN . BABY FORD . DJ DAMAGE . FLUNK . ALCAHA SOUNDSYSTEM . DAY &TAXI . PHI LIFE CYPHER . NHX . 90 DAY MEN . Fort Laudendale . Le POP 2 . PERLON . TBA . TANDY . WHOPPER . Villalobos . LUNGFISH . TWERK . MICHAEL YONKERS BAND . Andrew Thomas . SERGEJ MOHNTAU . The Limps Twins . ABSiNTHE (PROVISOIRE) . Gustavo Lamas . SETH P BRUNDEL . The Sound Of Warhammer . BEXAR BEXAR . Active Suspension at Vooruit, GENT . PLANETALDOL .. FEIST . THE SHINS . Arman MELIES . GREENBANK . ROSIE THOMAS . V/A STEREO DELUXE . JASCH . KAMIDO . ARMAND-FLORIAND DIDIER . TANTE HORTENSE . METAMATICS . HELLFIRE . Laurent PLESSIET . ISO 68 . BMB Con . CARLO FASHION . JAS

CHRONIQUES #14
EXTENSIONS . LEFT / MIDDLE / RIGHT . BERNARD FLEISCHMANN . CHARALAMBIDES . KAFFE  MATTEWS . TRIOSK MEETS JAN JELINEK . NAO TOKUI . FANTOMAS . DEAN ROBERTS . CINELUX . FUTURE PILOT AKA . KAT COSM . OLAF HUND & HIS ORCHESTRE TOUT JUSTE . FORMANEX/AMM . PLURAMON . V/A LOST IN TRANSLATION .. KID 606 . THOMAS MERY . PAUL WIRKUS . POLMO POLPO . NITRADA . MELODIUM . DUDLEY . BIAS . HANS JOAQUIM  IRMLER . ENCRE . KHANATE . ADVENTURE TIMES . V/a CIRQUE . PIANO MAGIC . THE HIGH LLAMAS . THE BOOKS . REFREE . XANOPTICON . GRIDLOCK . WILLIAM ELLIOT WHITEMORE DIM MAK . PARADISE ISLAND . DANCE DISASTER MOOVEMENT . EKKEHARD EHLERS / JOSEPH SUCHY / FRANZ  HAUTZINGER . OKKERVIL RIVER . ANTIFROST . THE PAPER CHASES . THE SILVER mt ZION MEMORIAL ORCHESTRA & TRA-LA-LA BAND WITH CHOIR . RED SNAPPER . AUTODIGEST . SUMUGAN SIVANESAW / DURAN VAZQUEZ .LEE VAN DOWSKI .WE GOT MONKEYS . RAINIER LERICOLAIS . GRASSKIRT . ANABEL’S POPPY DAYS . FABRIQUE DE COULEURS . METAXU . XIU XIU . NOVEL 23 . ERIK FRIEDLANDER .. DICKY BIRD . SANTA CRUZ . PW LONG . DO MAKE SAY THINK . CHICA & THE FOLDER 42 . CLEAR HORIZON . TELEFON TEL AVIV . Ms JOHN SODA . Phrênésie #2 . EINOMA . BRUNO DESCOUT . J XAVERRE

 

Chroniques 2004
chroniques archives


LA DEMOTHEQUE #1
LA DEMOTHEQUE #2

 
CHRONIQUES #20

MAN Helping Hand
(Man music/ Sub Rosa)
Eric Charrier et François Rasim Biyikli n'ont que faire des étiquettes. Leur musique est une fragilité en marche qui agrée au fur et à mesure des rencontres et du temps, les courants, les genres, nourrissant leur curiosité musicale au détour de leurs instruments : Piano, Rhodes, mélodica, guitares, petits bruitages aériens, basses, guitares, jouets. Man adopte sans relâche de nouvelles formes, de nouveaux principes de fonctionnement. Ce caractère mouvant, ces recherches introspectives se lisent jusque dans les références citées en exemple pour dépeindre leurs univers…Debussy, Keith Jarret, Arvo Part, Pascal Comelade, Labradford, Talktalk, Suicide, GSYBE, Brian Eno, Ennio Morricone, Tiersen, Tortoise.. Man s'offre un luxe suprême, le choix de ne pas avoir à choisir, fuyant les convenances, les consensus mous ; préférant laisser aux vents le soin d'ordonner leurs climats Des atmosphères, plus que des compositions à cheval sur le jazz (drifting), sur des prospectives ill-bient nocturnes (Maiomie), des carrefours de free, d'expérimentations et de ritournelles sans âges, de bricoles à la Comelade-Bastien, de gymnopédies classiques, de sound fields urbains et soniques. La maîtrise des silences à la beauté apaisante de l'album de Mark Hollis, la chaleur sourde et dramatique du Surrogate cities d'Heinner Goebbels, les égarements pastoraux d'un Godspeed ou d'un Ennio Morriconne. En soi, cette signature sur Sub Rosa est un aboutissement, tant le label belge a toujours su faire front contre la normalisation.. la pluralité, la différence comme rempart à l'ignorance et au monolithisme culturel. Cet album est une pure merveille, Helping hand tutoie la beauté sombre de l'obscurité.

BOOGERS in your heads
(Travaux Publics/ www.travauxpublics.org )
Tout à commencé, comme bien souvent par des K7 " autoproduites, auto-enregistrées et auto-éditées " ; des démos échangées sous le manteau, des morceaux pour lesquels le terme lo-fi signifie quelque chose; des pochettes reproduites à l'arrache, sans fioritures pour des compositions pleines d'une saine énergie, plutôt orientées Lo-fi-folk dans le prolongement d'un Lou Barlow/ Daniel Jonshton adolescent. Voilà pour la genèse de Boogers. A la recherche de nouvelles sonorités, le jeune homme s'essaie aux platines, apprivoise les machines, se laisse gagner aux joies du sampling et découvre les sons cheap et inusités des jouets pour enfants (depuis le Kazoo au synthé, en passant par le saxo bontempi). Un one Man show qui l'entraîne dans le sillage du label Travaux-Publics en divers lieux et compagnies. Il est rejoint dans sa formule live en 2003 par Oliv'yeah et Alain. Stéphane Charasse, de son vrai patronyme, a été vu au préalable dans diverses formations ; batteur au sein des Concrete Idea (Hardcore mélodique), manager et membre du collectif punk ska (Booby Watch), et enfin incorporé au quartet de Rubin Steiner, le Neue Band, ou aux côtés de Supercilious avec le Annilenox, mais aussi Les Playboys. Dans ces multiples projets, il a toujours su faire montre d'un état d'esprit indépendant. Avec In Your heads, Boogers voit enfin se formaliser sur support plusieurs années de pérégrinations internes, d'expérimentations enjouées, de blagues potaches et de mélodies bien senties. Ceux qui connaissent le personnage savent à quel point il est exubérant, extraverti et attachant. L'album concentre toutes ces caractéristiques tout en affichant un net penchant pour la schizophrénie, In your head développe en parallèle un appétit sans limite pour l'énergie sale du punk-rock,un amour sans pareil pour les mélodies classes et une sensibilité pour les rythmiques souples et enthousiastes. Sur les premiers morceaux, on sent une proximité d'esprit avec son comparse Rubin Steiner (qu'on retrouve à la production de l'album); Imprégnés d'un traitement du son embrasé, torride et un peu bancal, les titres s'enchaînent avec une rare cohérence, Something for you, Turtle, Takata, Jacomo.. , une succession d'instantanés dont la mélodie, en deux temps trois mouvements s'ancrent à l'esprit pour ne plus le lâcher. L'attitude des morceaux est une habile synthèse sonore où se côtoient sonorités absurdes et surprenantes, bruits non inventoriés d'harmonica, de jouets pour enfants, spoken words décalés, sur fonds de groove percutants et de combinaisons accrocheuses ; tout ce qui fait en fait la marque de fabrique (l'efficacité) et le charme de ses lives. On redécouvre au passage son tube revisité - Treat me like a dog- dans une version non stoogienne ; A partir de ce morceau, l'album prend l'oblique est va fouiller dans un patrimoine punk-rock plus ancré sur la guitare sans toutefois mettre à la marge les machines. L'excellentisime You/You, End of the summer, Sad Vocoder, My Heroin, le sublissime Ashtray, etc… On savait le garçon capable de nous faire rire ou battre la mesure par ses pitreries, on lui découvre un penchant pour la tristesse et la grâce mélodique qui nous font osciller entre le respect profond et l'émoi. Un esprit libre qui ne se prend pas au sérieux . Du talent sans œillères. Très bon.

[1] KILO OF A BLACK BONDAGE Fear the Windows
(Ronda-label/ www.ronda-label.com)
Derrière le patronyme énigmatique et clandestin [1] Kilo of a Black Bondage se dissimulent quelques pourvoyeurs éclairés de la scène culturelle du milieu des années 90. Outre la présence tutélaire de Black Sifichi, vieil expérimentateur devant l'éternel (depuis les Spoken Word au microphone), on retrouve au sein de ce collectif Nicolas Marmin, issu d'Osaka Bondage [aka_bondage] et qui a depuis enrichi des ses schismes rythmiques et sonores les line-up de Colder, French Doctors ou encore Damo Suzuki's network [CAN pour les néophytes] et Somes Kilos, soit Hugues O., rédac chef de feu l'excellent fanzine 18 jardins et membre du défunt My own et actuel membre de " 2 kilos & more ", sans omettre Norscq à la production ou Jérôme Lori Schön Berg (1/2 de Berg Sans Nipple) en Guest. Un collectif qui a les atours d'une fédération de compagnons dont l'intérêt et les compétences en matière de musique contemporaine et de recherches sonores n'est plus à débattre. La genèse du projet est à porter au crédit du festival IDEAL, qui en mars 2003, dans la salle obscure de l'étage du lieu unique à vu naître les accouplements de textures de Black Sifichi et d'Aka Bondage. Le projet, en maturation constante en fédérant de nouvelles recrues a amplifié dans le même temps son horizon. Empruntant au domaine du Hip-hop, du dub, de l'électronica, d'assemblage rock, l'ensemble des morceaux se révèle plus proche d'un road movie, où sont davantage privilégiés les textures, les espaces et les paysages abstraits comme fil conducteur. Des instants oniriques, des climats enjoués ou phtisiques, c'est selon jalonnent l'écoute de ce Fear of a Black Windows, (Public Enemy, es-tu là ?) signé sur Ronda, mais qui aurait tout aussi bien pu figurer en bonne place au catalogue de Sub Rosa ou d'un Wordsound excentrique. Quelque part entre les structures savantes et jazzy d'Orchestre 33 1/3, Les vacations urbaines d'un DJ Spooky période Necropolis et des spoken words façon Burroughs [dont la pochette entretient une étrange parenté avec l'esprit du Festin Nu du même Burroughs (le feutre en trompe l'œil )]. Totalement recommandé.

YANNIS KYRIAKIDES The Buffer Zone
(UNSOUNDS/ METAMKINE)
Le musicien et dramaturge chypriote est un habitué des bancs d'Unsounds puisqu'il signe avec the Buffer zone sa troisième collaboration effective. En soit, The buffer Zone est un prolongement de son précédent opus, Conspiracy cantata, canalisant des thèmes récurrents dans l'œuvre et les sonorités de Kyriakides, tel que la promiscuité avec le théâtre ou la recherche de climats spatiaux, de No man's land acoustique sur fond de trame électro-acoustique. Bâti autour de recueil d'interviews et d'enregistrements d'un soldat de l'ONU (interprété par TIDO VEISER), en base à Chypre, The buffer zone, la zone tampon/ frontière, se propose d'explorer les thèmes du déracinement, le contexte et les effets particuliers qu'induit cette frontière entre deux lieux, deux cultures, deux peuples, grecs et turcs. The Buffer Zone est la bande son de cette réflexion, matérialisée dans un enivrant et profond travail de landscapes, de recherches harmoniques (le piano), de scories concrètes, entremêlées d'acoustique (Marc Reichow au piano ; Nikos Veliotis au Cello, Tido Visser à la voix). Une étonnante œuvre contemporaine, personnelle et universelle dans le même temps.

FENTON Pup
(Plop/ Mochi Mochi) www.inpartmaint.com/plop
Si Dan Abrams privilégie une approche plus électronique sous son projet Shuttle 358 (récent album sur 12K [Chessa], mais aussi sur Mille-Plateaux, 5 LP au total), il met bien davantage à contribution les arpèges de sa guitare sous son side -Project Fenton. La posture reste minimaliste. Les micro-sons qui environnent ses travaux prennent ici une tournure " pop ", dans le sens où les mélodies qu'il tisse se laissent volontiers caresser par l'esprit. L'idée est le fruit d'un constat, de l'observation simple de son existence ; Dan est un amoureux de la mélodie. Pour autant, son esprit n'assimile (comme le notre bien souvent) que le refrain, l'introduction ou la conclusion. Pup, pas dénué d'un certain esprit ludique se propose de condenser ses moments, ses émois, éclats de vies, segments et sections de mélodies pour en faire un cheminement propre. Une quête sonore, jamais éloignée des pèlerinages en mer intérieure de Labradford, d'éléments de folk, de bruissements minimalistes ou environnementaux, où la guitare est balayée par les embruns d'effets divers et le silence comme ponctuation… Le résultat est une exploration lactescente entre gestuelles délicates, postures contemplatives et douces méditations oniriques.

COBRA KILLER & KAPAJKOS Das Mandolineorchester
(Monika Enterprise/ La Baleine)
Les deux berlinoises de Cobra Killer, Anika Line et Gina V D'Orios ont choisi de s'associer pour cette nouvelle production à l'orchestre Kapajkos. La fresque sonore qui en découle est audacieuse et intrigante. Elle s'articule non plus autour des samples surannés et de l'électro dégingandée qui ont fait leur succès par le passé mais s'attache, à la faveur d'une instrumentation classique type orchestre klezmer/tzigane [ 3 mandolines, une basse, des clefs…] à réinterpréter leurs précédents albums, depuis 76/77 (Monika) à Third Armpit (Valve) voir Cobra Killer sur DHR. La traduction est vraiment intéressante. Comme si les Taraf des Haïdouk réinvestissait l'univers tordu de LE TIGRE ou l'héritage punk-no wave de la jonction 70'/80. Le décalage est excellent, créant une distance entre les morceaux originaux et les nouvelles pièces. Un grand écart audacieux, inventif et réussi dans l'esprit vicié d'un Bunrt Friedman, qui en changeant de contenant n'en change pas pour autant la qualité du contenu. A découvrir.

SOVACUSA Centrepoint
(Expanding records/ Chronowax) www.expandingrecords.com

La genèse du projet Sovacusa n'est pas que le fruit d'un exercice de style artificiel ou d'une feuille de route imposée à deux artistes. La réunion de Tim Martin (Maps+ Diagrams) et Steve Davis (Broca) est le fruit d'une amitié de 20 longues années faite de fous rires, de coups de gueule, de maux et de joies de l'existence, de filles et de projets avortés. Quelque chose qui ne se contracte pas en quelques lignes… Cette envie de créer ensemble les a amenés par le passé à engendrer leur propre structure, Cactus Island, label qui leur a permis de sortir leur première production sous leur patronyme respectif parmi d'autres artistes ? (SENSE, EU, VESSEL, etc.…) De l'ombre à la lumière, il n'y a qu'un pas qu'ils ont franchi à l'occasion de ce projet Sovacusa, sorti sur le label Expanding. (dont le design rappelle terriblement celui de feu -Time.rec) Evoluant dans des entrelacs d'électronique, d'atmosphères dénaturées et contemplatives, agencées de fréquences ambiantes, de décharges quantiques et de micro mélodies/.. On navigue dans des micro-sonorités familières, proches de certaines explorations immatérielles de chez CCO. On ressent cette imbrication dès les premières séquences de décodage de ce génome sonore. Un projet humain intéressant dès lors que les rythmiques s'installent même si les ondes sinusoïdales d'ambiantes lénifiantes ont quelquefois le don d'ennuyer..

GUIDO MÖBIUS Dishoek
(Dekorder/ Metamkine) www.dekorder.com
La structure Dekorder a su fertiliser au long de ses productions, l'alchimie intense et instable de ses artistes, naviguant en eaux troubles, quelque part entre mélodies narratives abstraites, prises de risque free et expérimentations déviantes.Un caddie renversé dans l'herbe, Lassie Marhaug, etc.… Guido Möbius est un homme qui a fait de la musique son métier, son environnement, sa niche; Associé au sein d'un office à la distribution et à la promotion de labels tels que Sonig, Smalltown Supersound ou Klangbad ; fondateur du label Emphase recording, guest sur divers projets d'artistes (Anne Laplantine, Mouse on mars entre autres..), il délaisse un temps ces " à cotés ", pour revenir sur les pas de sa passion originelle : la création. Dishoek fait suite à Klisten, son aîné de deux ans, sur lequel son acolyte Alexej Gottchau (Basse) avait déjà pas mal contribué. Sous le vernis complexe et craquant d'un assemblage baroque de sources acoustiques (clarinette, violon, guitare, cornet) et d'apports électriques et analogiques (basse, guitare, synthétiseur) Guido Möbius livre un album dont les lignes mélodiques sont d'une simplicité déconcertante, d'une aménité à fleur de peau. Ni pédant, ni pompier, pas plus académique, Dishoek est une flânerie pleine d'onirisme et de beauté abstraite. Il revisite dans ce malicieux succédané son patrimoine musical intime : un peu de sa culture nationale en ré-intronisant le Krautrock de ses aïeuls (Amon Dull/Can/Tangerine Machine), un peu du folk d'Amérique du nord, de l'électronica intimiste européenne à la mouse on mars, du psychédélisme en menuet, mécanisme de l'enfance, jouets cassés, électronique en sursis.. Mais aussi de la littérature, du cinéma…un fourre-tout élégant, qui ne livre pourtant aucun cliché des genres précités, laissant la part belle aux vacations introspectives. Dans une lignée de disques sortis chez CCO ou Staubgold. A noter la présence de FS BLUMM et le sage design orchestré par Marc Richter.Un instant délicieux pour un disque, sans doute le plus accessible du catalogue Dekorder, qui paradoxalement se révèle le plus riche à explorer.

COLUMN ONE Dream Time - an anthology of selected public and private materials (1994-2004)
90%Wasser records/ Nuit et Brouillard)
Plutôt que de célébrer pompeusement dix années de création intense, le duo éclairé allemand formé de René Lamp et de Robert Schalinski devenu Septet pour l'heure, s'investit corps et âme dans une relecture de son patrimoine culturel, tout en gansant son projet d'un caractère hautement conceptuel. Ce qui me plait dans l'œuvre du collectif Column One, c'est ce goût absurde pour le décalage visuel entre un esthétisme naïf (les colombes dans la neige, des jeunes filles en fleur) tout en gardant ce côté déroutant, provoquant, ambiguë qui sied si bien à ces groupes post punk néo-industriels des 80'(P16 D4..) Le propos à cheval entre manipulations visuelles autour de la sexualité et cut-up sonores, est une diatribe lancée à la face du libéralisme et de ses corollaires, la surconsommation de masse, le matraquage médiatique… Une satire bâtie autour de l'utilisation abusive des corps dans la propagande libérale, sans point de vue moraliste, exclusivement construite à partir de slogans, d'images et de sons détournés, de matériaux télévisuels fragmentés, re-compartimentés. On traverse avec une curiosité aiguisée les compositions, assemblage de lentes mélopées nostalgiques, de samples de films érotiques italiens, d'extraits de leçons sexuelles en allemand, de voix lascives de femmes, etc.…Echantillonnage, cut-up, figure artistique, plunderphonique, tout cela à la fois, Les membres fondateurs de Column One , se sont adjoint le temps de ce disque les talents (vocaux, notamment) de Doreen Kutzke, Justine Electra, , Rotraut Z mais aussi Eyn Lump, Jurgen Eckloff, Andrew Loadman . Les compositions de Column One sont ici moins prétextes à l'engourdissement ; les horizons sonores grisés, les accidents mécaniques, les lentes montées défaillantes qui ont fait leur succès sont ici évacués pour laisser place à des univers complexes, syncopées, fragmentés. On est enseveli sous un amas de réclames, phrases percussives vantant les mérites de tel produit, slogan louant les bienfaits de tel autre sur fond d'univers oniriques colorés et fragmentaires. Déroutant.

V/A RICHARD CHARTIER Re'post'postfabricated
(DSP recording/ Import) www.dsprecs.com

Comment résister au line-up de cette double compilation, la crème des musiciens mondiaux au service d'un projet original, jugez plutot : Coh, Vend, Asmus Tietchens, Frank Bretschneider, Richard Chartier, Goem, Taylor Deupree, Alva Noto, Freiband, Sogar, Byetone, Matmos, Steve Roden !!! La genèse de cette compilation est des plus complexes. Ce Re PostFabricated est une émanation du Postfabricated du compositeur R. Chartier, édité en 1999 sous l'égide de Microwave sur CDR (label de Roel Meelkop et Frans de Waard, ndlr) Le premier " long métrage " de Richard Chartier, conçu avec les moyens de l'époque : minidisc, connections analogiques, remasterisation en studio, avait alors les qualités de ses défauts…Ainsi, les limites techniques d'enregistrement de l'époque, si elles offraient une forme de radicalisme, de nécessité aux morceaux, restaient pourtant éloignées des vues et des attentes de son auteur. En empruntant l'analogie avec la restauration appliquée d'ouvrages anciens, DSP recording offre six ans après l'occasion à Chartier de réhabiliter cette œuvre, en restituant la profondeur voulue aux micros sonorités, à l'époque voilée. Allant au-delà du simple dépoussiérage, le compositeur américain a ré-édifié son œuvre (d'où le Re devant le Post), à partir de notes, de diagrammes, d'archives, conservant autant que possible la structure de base, l'esprit des morceaux comme fil conducteur, tout en remaniant l'ensemble par le biais digital. La mise en parallèle des deux œuvres est réellement instructive. Finalement, on reste assez charmé par le premier jet dont les restrictions techniques lui donne un supplément d'âme. Alors que le second volet nous plonge dans un océan de micro-détails, de bas reliefs de compositions qui bien que passionnants nous font quelque peu oublier l'armature de base. Dans cette mise en abîme subtile, prenant au pied de la lettre une réflexion/ suggestion de Roel Meelkop paru dans Vital Weekly vantant les mérites potentiels de PostFabricated comme base d'un travail de remixes, Richard Chartier a convié sa bande de compagnons/ artistes attenants à son univers, à revisiter à leur tour ce nouvel opus. Un bien agréable moyen de découvrir, préambule original, l'œuvre exemplaire et riche de Richard Chartier.

AUDIOPIXEL Memento Rumori
(Effervescence/ differ-ant)
Son pseudonyme résume à lui seul toute la fragile et numérique démarche de sa musique. On est vraiment content de voir enfin aboutir sur un long -courrier, celui, qui a offert une myriade de " live " aux 4 coins de l'Europe, des poignées de compositions livrées sur des labels en pointe (Grain Of sound, Effervescence) et tout autant de remixes. Memento Rumori n'est pas un disque fait à l'emporte pièce(s), sur le coin d'une table ; il est le fruit de 3 années de réflexions, de maturations lentes du travail de l'imaginaire, d'inflexions mélodiques ténues, de rigueur compositionnelles, de spontanéité ancrée dans la recherche sonore. A l'instar de Dan Brahams (Shuttle 358) et son side projet Fenton, voué à la guitare ; Miguel Constantino, jeune ingénieur du son Franco-Portugais, par ailleurs producteur des récents albums de Stuntman 5, The Patriotic Sundays ou Argument, a choisi de recentrer son étude, son analyse sur l'usage exclusif de la guitare. Pour autant, la posture n'est pas académique, elle laisse deviner une astucieuse approche où les arpèges semblent pervertis à la faveur d'un traitement numérique. Memento Rumori n'est pas pour autant une étude appliquée de l'instrument à cordes. Il est enrichi d'une manne d'éléments annexes qui donnent ce caractère tellement vivant, humain, fragile à sa musique. Dans les faits, ça se traduit par quelques gymnopédies de piano, le chant chinois déracinant de Shuang Song, le soutien logistique heureux de Domotic (Sébastien Laporte), des interventions diverses et variées à la batterie (P.A. Parois) à la basse, au violon (Carla Pallone), etc…Le tout sustenté de soundfields, de fragments de sons concrets, ajouts de bandes et autres petits instants sonores volés au quotidien. Le fait que les morceaux aient était enregistrés en live en différant lieux et places ( depuis Lisbonne jusqu'à la Bretagne) ajoute en dépaysement sans toutefois trahir l'unité d'ensemble de l'album. Des rumeurs d'une grâce et d'une fragilité mystérieuses et belles. Très bon.

EZEKIEL HONIG & MORGAN PACKARD Early Morning Migration
(Microcosm Music/ Venus)
Early Morning Migration est une discussion chaleureuse; la rencontre de deux humanités, de deux esprits, deux manières d'envisager l'espace et de le remplir. Ezekiel Honig, partisan d'une certaine forme de méthodisme, d'ordonnancement logique de son approche, symbolise au travers de cette œuvre la structure, l'ossature sur laquelle peuvent venir s'amarrer ou virevolter les sons plus libres et inféodés de son acolyte. Morgan Packward, justement, dont l'esprit intuitif est ici mis à l'honneur. Un jeu subtil de cutting, de mises en perspective des sonorités par un habile travail de restructuration, de montage. Du minimalisme de la pochette (Aesthetic Race) à la limpidité de la musique, il n'y a qu'une onde..Early Morning Migration est une conversation intime, une relation secrète qui se noue, s'instaure. Une discussion faite de fragments de couleurs, d'impressions diffuses, de textures diluées, de couleurs délayées, de motifs abstraits. Une chaleur peu commune environne ce disque…. de la retenue ? de la timidité ? Qui sait… Une fragilité bienveillante teintée de micro-rythmes environne ce disque pour des instantanés de nostalgie, d'aménité où s'entremêlent des multitudes de parenthèses mélancoliques. Frais comme une pluie d'été dans la chaleur de la nuit ; Bon comme le doux ressac d'une mer tiède sur le sable. Sublime de retenue.

HANNA HARTMAN Longitude/Cratere
(Komplott/ Import)
Longitude 013° 26' E et Cratère sont les deux compositions uniques de cet album, réalisé pour le compte de la SBC [Swedish Broadcasting Corporation], radio suédoise, un peu à la manière de la VPRO pour Staalplaat. Le Label Komplott a pris l'initiative de les diffuser, profondément impressionné par la portée de ces 2 morceaux. Longitude nous entraîne dans des climats concrets plus humanisés, aux frontières des musiques concrètes et environnementales. Une habile refonte de climats fluides, liquoreux. Les titres, sans fioritures sont d'une belle simplicité, mettant simplement en avant le fond/ ou le contexte d'enregistrement de ces 2 titres Concrets. Le premier, Longitude 013° 26' E a pour lieu un bateau, naviguant en mer baltique. L'approche du morceau tente de dresser des ponts, jeter des frontières sur la relation ambiguë entre cartographie et terrain, virtualité et réalité, électro-acoustisme (La présence d'Annette Krebs à la guitare préparée et de Robert G Patterson à l'Horn, ni étant pas étrangère)/ sons concrets ou environnementaux.. Par analogie, la réflexion chemine sur les points d'ancrage entre origine des sons et leur traduction dans une forme musicale. On navigue, pareil à cette coque, frappé par le ressac, tourmenté par le roulis, engourdi par le bourdonnement entêtant des abysses... avec toujours en point de mire, la ligne de flottaison. Les climats aquatiques, leur mystère nous rappellent par effet d'écho les autres climats abyssaux, ceux des astres.. Cratère, pour sa part, enregistré sur le mont Etna dérive de ce même reflet de la pensée. La sensation que procure ses pièces ne laisse pas indemne. Cratère met en relief avec beaucoup de discernement les sourds mouvements telluriques, l'impulsion lente des profondeurs mais aussi les mouvements frêles et volatiles, inféodés du vent... l'idée de Continents à la dérive comme dirait Russel Banks

GREG DAVIS/ SEBASTIEN ROUX Paquet Surprise
(Carpark/ Chronowax
)
Avant de psalmodier sur ces deux brillants stakhanovistes de la forme sonore, quelle que soit d'ailleurs la forme de leurs compositions ( droniennes, concrètes, électroniques, voir environnementales) ,laissons nous enivrer par la superbe pochette, sorte de collage exquis d'un monde animal et végétal compacté, sortant d'un vieux carton, figure inaccoutumée de corne d'abondance. Pour autant la symbolique est bien trouvée. Ce paquet surprise est une véritable mine d'or, fourre-tout génial, miscellanés de toutes les interrogations, pistes de réflexions, échos d'idées, stratégies avortées dans le cadre confiné de 2 ordinateurs reliés chacun l'un à l'autre à plusieurs milliers de kilomètres de distance. Sébastien Roux, Paris, employé à l'IRCAM, compositeur de 2 longs courriers paru chez Pricilia . Greg Davis, Vermont, habitué de chez Carpark, explore avec beaucoup de spontanéité, de décontraction et de savoir-faire les marges multiples des musiques indépendantes. On l'a vu récemment aux côtés de Keith Fullerton Whitman, Animal Collective, Marumari, ou Mark Nelson (Pan-American) Paquet Surprise est un condensé de vie, une ode à la diversité, une compression par deux amoureux du son d'un concentré presque surnaturel des genres et courants qui ont jalonné leur existence. Bien que relativement rock dans sa forme générale, cet album accepte sans vergogne différents niveaux de lecture, laissant l'auditeur découvrir ici une niche de sons concrets, là un abécédaire de déclinaisons électroniques. Le projet était sur le papier ambitieux, voire casse gueule, mais se révèle à l'écoute d'une majesté réelle, d'autant plus agréable à entendre qu'elle reste profondément intuitive, libérée des connaissances théoriques des compositeurs. Très bon.

FILFLA Frame (Plop/ Mochi Mochi)
www.inpartmaint.com/plop
La volonté de décliner sous autant de pseudonymes (hétéronymes dirait Pessoa) qu'il est possible les multiples facettes de son travail n'est pas en soit un fait récent. De nombreux exemples émaillent les mémoires de la musique. Pour autant, il s'est à notre époque généralisé au point de devenir un quasi-usage chez nombre de compositeurs contemporains. Les racines sont sans doute à rechercher dans un goût pour l'anonymat davantage que dans une soif de schizophrénie. Ainsi, Keiichi Sugimoto ( boss du label Cubic rec., pas de lien de parenté avec Taku ) compte pas moins de 5 identités distinctes dans lesquelles il place ses petits univers oniriques, ses petits travaux à tendance minimaliste. Fourcolor , Fonica, Minamo, Installing and Good Music, signés sur autant de labels divers (12K, Apestaartje, Tomlab) …et à présent.. FILFLA sur Plop. Ici, il y a un désir plus grand, c'est perceptible dès les premiers morceaux, d'intriguer le rythme dans les morceaux. On retrouve bien sûr des éléments épars de sa discographie, les assemblages folk-pastels et électronica de Fonica, les micro-environnements atmosphériques en filigrane de Fourcolor. La différence est que là, Keiichi Sugimoto y incorpore un panel de microBeats, d'effets de coupures de rythmes, de séquençages de l'espace qui traverse avec la fulgurance d'un orage ses paysages embrumés. Ça pourrait s'apparenter à un travail de remixages d'artistes tels que Sogar sur l'œuvre de Fonica, mais c'est pourtant bien le même auteur. L'évidence est là ; pourquoi confier à quelqu'un d'autre ce qu'on est en mesure de réaliser seul. Pour l'anecdote, Filfla est un îlot inhabité au large de Malte... limpide.

VELMA La pointe Farinet, 2949m.
(Monopsone/ Chronowax)
Tout commence par un concert, un remix (Supercilious, viva el protocol my friend, monopsone), la certitude de tenir un groupe unique sous la main, un single sur le label Lykill, un split avec Dalëk, des points de vue âme sœur, de l'enthousiasme, quelques bières, l'amour de la mise en scène, la chaleur de la nuit… Faisant suite à Ludwig (Zeal records) et Cyclique (Emperor Norton), et ce maxi No risk to be taken (Lykill rec), VELMA revient dans une charge symphonique a l'abordage avec La pointe Farinet, 2949 m. La production a été confiée au grand Mark Van Hoen, figure emblématique de la scène indépendante (Locust, Seefeel, Mojave 3, Scala) l'album est à la hauteur de son illustre invité. Un album captivant de bout en bout. La démarche, plurielle, convoque diverses unions, depuis la chaleur syncopée du post-rock, l'intimité du folk jusqu'aux vibrations savantes de l'électronica. Un magistral vertigo, qui chemine au milieu de chœurs lancinants et répétitifs, d'apnées d'arpèges, à la fois brûlant, plein de torpeur, presque jazz par certains angles. Velma met en boucle ses drones cinématiques, vertiges sonores, donnant à cet album, la couleur de l'ivresse.Splendide.

SOFTLAND War Against Error
(Spezial Material/ Toolbox)
Christof Steinmann , artiste Laptopien suisse, en villégiature à Zurick a su en seulement 2 albums, bousculer ( faire vaciller !) l'équilibre fragile entre pop et électronica édicté par Morr, CCO ou encore Vertical Form. En incorporant des structures issues du jazz, de recherches expérimentales ou de sons concrets (perceuse sur please confirm the world pour l'exemple), War against Error est une sorte de recueil de cartes postales sonores en 22 épîtres/ compositions Pop-Song expérimentales à la silhouette lo-fi-jazzy, agrémentée d'électronica cristalline. L'outrageuse combinaison à laquelle se prête C. Steinmann, ouvre un peu plus encore que son prédécesseur One is a very small Crowd le spectre des possibles, (le très wendy carlosien moiré ) laissant s'entrecroiser micro-miniatures minimalistes, folk lumineuse du petit matin, Soundfield du crépuscule, petites structures avant-gardistes de l'aube. Des harmonies complexes qui servent une écriture limpide, aérienne. Un équilibre fragile pour un milieu délicat, entre apport acoustique (Double Bass/harmonium/enregistrement/voix) et sources synthétiques (Analogiques ou digitales, c'est selon) Il est ici question d'harmonies, de timbres, de structures, d'alchimie des sons de nappes, de paysages. Des opportunités, des questionnements, des sources de propositions qui fluctuent entre pop-song cérebrales et fragiles apports électro-organiques.. Un moment de sérénité maîtrisée, pour une musique déviante, sensuelle et forcement belle, puisque faillible.

TAYLOR DEUPREE + EISI Every Still Day
(
Noble Rec/import)
Le New Yorkais Taylor Deupree s'accorde une petite infidélité, délaissant un temps ses labels 12K, Line et Happy. pour s'investir dans un travail studieux de reconstruction. La reconstruction/reconstitution minutieuse d'un album, Awaawa (accessoirement 7éme référence du catalogue Noble) signé par EISI, trio japonais composé de Mujika Easel/Tustoma Kobori et masaaki Morita La musique d'EISI est belle, sorte de folk distendue sans âge, comme l'affectionne David Grubbs, entre autres. Taylor Deupree, chantre du minimalisme new-yorkais se meut avec une aisance non feinte dans ce manifeste lo-fi pour instrumentation acoustique à base de guitares voire de quelques synthétiseurs. Le savoir-faire de maître verrier, sa connaissance des structures translucides se marient à ravir avec la mélancolie de surface du trio. Comme son prédécesseur, Every still Day est un album d'une quiétude extrême, porté par la voix d'éther de Mujika Easel. Il est ici question de goût, de passion, d'amitié également (Christophe Willit étant venu enrichir les compositions de ses Cornes de Brume). Deupree appose ses délicates couches digitales, ses spectres de mélodies, esprit d'une no-folk perturbée de procédés électroniques, nourris de charge émotive. D'une grâce envoûtante.

TU M' Just One Night
(Dekorder 012/ dekorder.com)
Duo italien composé de Rossano Polidoro et Emiliano Romanelli, TU M' est originaire d'un village retiré de la tourmente du monde, "CITTÀ SANT' ANGELO ", preuve s'il en est une fois encore que la création naît partout et nulle part. Clin d'œil à Marcel DUCHAMP, génie de fausse nonchalance et de surréalisme associé, le duo a déjà fait connaître ses talents sur quelques labels et pas des moindres, s'il vous plait, parmi eux, Staalplaat, Box Media, Phtalo, ERS, FÄllt, etc.…et un morceau présent sur la prochaine compile de Wire. Ultra actifs, ils dirigent également le label Mr Mutt en même temps qu'un site de téléchargement MP3 de mixes en guise d'illustrations sonores aux travaux de webcam de Chris Cutler, Donna Summer, Dalek, Noël Akchote, feu-Voice crack, Farmers Manuals, Voks, Un caddie renversé dans l'herbe, Black To comm, A. Linch, et David Grubbs ! En sus, ils conduisent le projet STENO en compagnie de Frank Metzger d'Oval sans oublier Steve Roden et Simon Fisher Turner ! Voici les présentations faites ! Just one night à l'image de leur background est une synthèse, une combinaison heureuse de leurs amours respectifs pour les belles mélodies, des montages abstraits, d'improvisations fluides, de sonorités sournoises, d'habiles bouts de vies, de fields recordings, d'harmonies de flugelhorn, de nappes synthétiques… Collages de voix, échos de timbres en ricochet, ambiant. musique nocturne, sonorités filles de la pénombre ; accidentologie cardiovasculaire du numérique, folk évanescente (John Fahey ?), post rock désertique, chorus d'orchestre pris de crise spasmodique, jazz enfumé, ambiant arctique, électronica boréale, Just one night est tout cela et rien à la fois, se révélant être au final un petit bréviaire de l'humanité climatique, nocturne et fragile, de ce qu'on souhaiterait emporter une dernière nuit avec soi. Indéfinissable et magistral. www.dekorder.com Nota bene : On retrouve Marcus Schmickler (Pluramon/ Mimeo) à la production, grand monsieur s'il en est (surtout au regard de ce travail d'orfèvre).

ARDEN Conceal (Still001/import)
www.still.org
Sobrement intitulé Arden (Ardennes) en référence au lieu d'enregistrement, ce projet collectif correspond à la rencontre improbable (mais pourtant réelle) de musiciens d'exception. Cet album marie, dans une alchimie incertaine et pourtant prévisible, les six savoir-faire de musiciens d'exception. Incertaine, car on ne peut jamais prévaloir de la réussite, d'autant quand autant d'intervenants, aussi talentueux soient-ils, sont investis dans l'aventure. Une palette de couleurs/ sonorités où se côtoient musique atmosphérique, sensibilité post-rock instrumental, électronique minimale liée à un souci commun d'improvisation et d'élégance de forme. Comprendre la musique d'Arden, c'est comprendre les gens qui l'habitent au titre desquels Mitchell Akiyama (boss d'Intr_version, ½ de Désormais, albums sur Raster, Sub Rosa, Alien 8) ; Jurgen Heckel, le jeune homme derrière Sogar (12K, List) qui apprivoisent ici les geignements de guitare. Jerôme Denson (Intr_version) délesté pour l'heure de son alter-ego Alain Lefebvre ; Sébastien Roux (12 K, Apestaarje, Carpark avec Greg Davis récemment) dont la saveur du dosage minimaliste en électro n'est plus à démontrer. Et enfin deux autres compatriotes belges de Denson, Christophe Bailleau (Le cri de la harpe) et Jeuc Dietriech dont la pratique est passée à maintes reprises par le cinéma. Le résultat est une forme onirique de métissage ou la solitude d'une Colleen rencontre la beauté d'un Gel, jusqu'aux errances atmosphérico-expérimentales d'un Tu M', Labradford, GSYBE… On part dans une puissante descente dans les abîmes, ou l'on entrevoit l'importance du lieu, l'isolement comme vecteur de la création (Popol Vuh, es-tu là), de l'intimité, du retour sur soi . Les morceaux convoquent une multitude de sensations, tantôt on découvre un parterre de petits échos, dyslexie numérique, montées d'orgues sur fond de syntés nuageux puis c'est la montée en tension rock avec Smashed Computer, magnifique traité de strates bruitistes sur fond de cornemuse écossaise. Suivent des instants prélevés à la nature folk -post rock tel que Sleeping in a strange bed, Ne se soucier de rien (Constellation meet Table of The element) Des petits moments névralgiques ou nerveux, d'une intensité (trop) rarement atteinte de nos jours. Un album Splendide.

PIERS WHYTE s/t
(Ache/import)
La musique de Piers Whyte appelle à un effort, necessite de tailler les épaisses broussailles, épineuses, tortueuses en lisière de forêt pour pénétrer plus en avant, et accéder à ses sous-bois ombragés, à ses clairières lumineuses. Une fois cisaillé ce forest fire démo, massif de hautes fréquences disruptives, machines rayées dense, semblant fuir à travers l'espace comme des photons [et le sentiment d'inachèvement/ inconfort qu'il suscite], on chemine sous une nuit étoilée, au milieu des sons nocturnes, angoissants ou apaisants. Springs mélange ainsi une multitude de sources : chœurs roumains, éléments empruntés à la nature, chants d'oiseaux, grondements sourds de l'orage en contrepoint, reliefs accidentés du rythme. Un voyage initiatique, une rencontre autour de l'environnement, avec sa beauté fragile, avec sa rudesse et sa cruauté. Une musique qui révèle une gamme étagée de sentiments, depuis la quiétude aux déchirements ou la rage contenue. Un trait gris clair qui file sur un horizon blanc, vertigineux d'horizontalité. Une tempête de neige vue dans l'intimité d'une alcôve réconfortante, quelque part entre Francisco Lopez, Ryoji Ikeda, Oval et Thomas Koner.

WAHRNEHMUNGEN V/a
KOSMONAUTENTRAUM Ungehortes/ Unerhortes
DIE TODLICHE DORIS welten -Worlds-Ohontasa'shon :a
(Vinyl On Demand/ Nuit et Brouillard)
VINYL ON DEMAND nous propose un véritable cours de rattrapage historique. C'est à la genèse de SELEKTION mené par Ralf Wehowsky, membre à part entière de P16 D4 ,que nous convie ici cette compilation. Wahrnehmungen est en fait le prologue du label SELEKTION et du collectif PD devenu P16D4, projet expérimental non répertorié dans la table des matières. Début 1980-81, le label édite une vingtaine de K7 dans une diffusion hiératique, qualité défiant la fidélité de toute chaîne hi-fi de salon. L'urgence du Punk, l'exigence de l'expérimentation noyée dans un contexte post-punk néo-industriel qui auront vu naître ce groupe, ses variations ainsi que d'autres ténors, tels que SPK ou TG, proches d'un imaginaire situationniste/ lettriste. Des compositions oubliées, ou mutilées par les âges, perdues voire pour certaines virtuelles (car jamais éditées). Des groupes mythiques ou disparus parmi lesquels, Ertrinken, Vakuum : Kurzschluss, LLL, Permutative, Distorsion, Der Apathische, Alptraum, P16D4… Le dynamisme et l'essor d'une jeunesse allemande alors en recherche de rupture s'appuyant pour certains sur les legs de ses pairs les plus audacieux (FAUST) ou rejetant les affects planants des autres (Popol Vuh). Des moments de feed backs de répétitions sans fin, de collages surréalistes, de second degré de folk distordu, quelques sons de machines rouillées pour une superbe carte postale sonore, perdue durant 30 ans. Un magnifique témoignage d'une époque révolue. Dans cette même logique, Vinyl On Demand nous propose une mise en abîme dans l'univers enrichi de Michael Jarick, Kosmonnautentraum une sorte de musique environnementale industrielle, où les sonneries de cloches d'écoles, les bruits d'usines, les discours politisés, la frappe des machines à écrire se superposent dans un malstrom hystérique, d'électronique primaire, de sons in-inventoriés. Une sorte de manifeste socio-politique 20 ans avant la clique DHR (Alec Empire, lui doit sans doute beaucoup) Une revue de détails composés de multiples 7 ' construit autour des années 1980'. Die Todliche Doris, enfin, avatar oublié entre Negativland et les délires orchestrés du collectif V/VM...fanfare grippée, chaos mélodique, musique industrielle ulcérées/filtres déformants.. Un travail conceptuel de Gerry Beltz (Die Todliche Doris) pour un projet sonore qui intègre de manière audacieuse une multitude d'univers distincts, issu de l'underground Berlinois. Un réel devoir de mémoire.

LOKAI 7 millions
(Mosz/ Metamkine)
Où comment inviter à sa table les 2 instruments, l'un acoustique, l'autre numérique, certainement les plus maniés et pratiqués de ces dernières décennies. 7 millions, n'est pas la promesse d'une humanité toujours plus large, toujours plus variées. Prenant à bras le corps les attentes d'un Christian Fennesz, l'ambition est de faire converger la pratique aérienne de la guitare et l'usage flottant et ludique du lap top, de l'électronique. Finalement, la genèse est peut-être à rechercher dans les albums de Brian Eno/bill Frisell ou dans les compositions d'Heldon, mélange de sons synthétiques et analogiques, de structures et de textures folk, de sons et de bruits non narratifs. " tunes and tones merge and diverge " pourrait résumer en un sous-titre ce disque où l'on retrouve Stefan Nemeth et Florian Kmet ; Un travail d'atomisation de la mélodie, des arpèges par l'entre fait de l'électronique, qui s'il donne un caractère parfois affecté aux compositions, démultiplie les profondeurs d'écoutes et les niveaux d'analyses de ce disque. On passe de climats odieusement denses, saturés, à des phases de pleine accalmie. Une entrée en matière intéressante même si on reste assez peu surpris du résultat…

DABRYE Additional productions Vol.1
(Ghostly rec/ La Baleine)
Tadd Mullinix est un petit génie de l'ombre, en marge de la notoriété, ayant préféré taire sa voix et contraindre son talent à s'exprimer sur les seules berges de l'instrumentale. Découvert deux ans plus tot sur le maxi Instrmntal paru chez Eastern Developements, il a auparavant sorti un album courant 2001 (One/three), déroutant dosage (déjà à l'époque) d'instrumentaux hip-hop passés à la moulinette du numérique. Puis Game Over sur Ghostly, featuring Jay Dee and Phat Kat Ici Dabrye s'attache à remixer, ou plutôt réinventer, en gardant l'ossature et le style de chaque artiste, une série de compositions qui si elles tranchent par leur diversité n'en donnent pas moins l'occasion de saisir la diversité de son talent. T. Raumschmiere, Trans Am, Nomo, Bus, Ill Sueno mais aussi Dabrye lui-même se sont prêtés à la révérence du remix Les titres s'enchaînent dans une folle embellie, entraînant le pied à battre la mesure et la tête à marquer le rythme. La signature de Dabrye a des proximités de vues avec les fonds instrumentaux de Prefuse 73, ou d'un Daedalus, une sorte de click-hop confiné, festif, remanié, rapiécé auquel on aurait adjoint la chaleur de mélopées Jazz, la distance du Vocodeur, l'énergie rythmique et le sens de la mélodie d'un AfriKa Baambataa…. Si le premier album (One/three) montrait tardivement son talent ( à partir du 7ème morceau), Additional Productions, cadré par un prestigieux pré-carré d'invités (Beans d'antipop Consortium/ Bus/MC Soon-T/ Vast Aire (Cannibal Ox)/Big Tone (ABB) balance une énergie et une vivacité dès les premiers titres, rarement atteintes par un album de ce genre. Une merveille de rythmes

ANGIL Matter 3 '
(Unique records/ La Baleine)
ANGIL Beginning of the fall/ my time wainting/if i stumbled
(Unique records/Megaphone)
Défendu depuis les premières heures de l'aube par Jade Web, la carrière du jeune stéphanois Michael Mottet, ou Angil pour les moins intimes a pris un envol plus que mérité sous l'impulsion de forces vives, depuis Unique records, Magic, en passant par les Inrocks. Pourtant le seul qui puisse réellement savourer ce succès d'estime grandissantest Angil , qui à la faveur d'un travail acharné, une remise à plat de ses compositions, leur relecture sous format quartet avec The Hiddentracks ( Saxophone, Flute, Circus bands, Guitar et samples) aura su réinventer et élargir les murs folk Lo-fi des premières heures. La superbe voix rêche, fébrile et désabusée d'Angil est toujours présente, faisant le lien entre chaque composition. 2 maxis dont un sorti par l'entremise de Megaphone en Angleterre + un cd 3 pouces où l'on redécouvre les incontournables du jeune homme pour une poignée d'instants réconfortants. L'insoutenable légèreté du mal-être. Splendide.

TONY itinerances
(Moulin010/ autresdirections)
MELODIUM hum hum & blabla
(Moulin014/ autresdirections)
Pareille à un Don Quichotte étiolé par l'effort consenti, la multiplication des moulins d'Autres Directions oblige à une discipline et une hygiène de vie totale pour qui veut étreindre leur beauté. 2 maxis dont la durée n'excède pas les 20 minutes pour une poignée de titres qui volent à la face du vent. Tony avec son Itinerances, joli néologisme entremêlant itinéraires et errances pour des morceaux imprégnés de déracinements, du goût de l'ailleurs. Un lent travelling en balayage (à la manière du clip en visuel sur le site d'autres directions), composé d'accidents du détail, de catastrophes intimes, de perturbations introspectives où apparaissent, au fur à mesure de cette fuite latérale, dans les cadres, quelques arpèges de guitares ici, des bribes de lap-top là. Un voyage initiatique pour l'auditeur autant qu'une quête intérieure pour le créateur. Des environnements sonores qui évoluent depuis les climats d'un François Bayle (le 3) aux ambiances folk perturbées, de chorus symphoniques, de désunions, de fragiles ruptures, de boucles lancinantes, de musiques traditionnelles d'extrême orient, d'arpèges d'une beauté sombre et envoûtante (les titres d'ouvertures). Magnifique. Melodium, pour sa part, dont on avait entrevu tout le talent à l'occasion de la sortie récente de son merveilleux la tête qui flotte, livre ici une forme de post-face intuitive, belle, équilibrée dans son déséquilibre, dont les racines trouvent toujours le chemin dans cet assemblage inconscient d'électronique nocturne et de song-writing de l'aurore. Viennent s'y adjoindre les remixes vraiment réussis de 3 incontournables , Hellomusic, Interlude pour dépressifs et la fin de Tout respectivement réorchestrés avec beauté et justesse par Ochre (Toytronic Records - Ang), Audioroom (Arbouse Recordings - Fr )et Marsen Jules (Autoplate, City-Centre-Offices - All). Un maxi à l'élégance folle qui donne envie de se replonger dans l'album. Incontournable.

EXILE Pro Agonist
(Planet Mu/ LA Baleine)
Difficile de faire abstraction du label de Mike Paradinas, tant celui-ci a contribué à renforcer la ferveur et l'impact du genre électronique, à l'instar de Warp Ou de Rephlex. Planet Mu s'est attaché durant plusieurs années à référencer, inventorier, réhabiliter la rupture de rythme comme art sonore, au travers du spectre de la musique électronique récente. Initiés dès son plus jeune âge aux rythmes rompus, cet amour ne l'a dès lors plus quitté. Dans cette quête éperdue, il a progressivement aggloméré de nouveaux horizons, l'inspiration venant aussi bien des médias que de partitions orchestrales surannées. Aussi versatiles que schizophrènes, les univers multiples du jeune homme l'ont amené à être édité sur Moving Shadow, Beta, Renegade Harware, Mosquito (Cristian Vogel) et Planet Mu. Amateur de collaborations croisées (DJ, MC Temper), il a su créer des univers addictifs, tempétueux radicaux et tendu. Pro Agonist, même avec son côté un peu désuet est une charge Drum'n Bass, pleine de fluctuations dissonantes, de fragrances mélodiques désœuvrées et malsaines à la Aphex Twin (Open Mikes), de modulations extra-terrestres ludiques et festives. La charge héroïque mutilée de l'ère Post Atomique

RM74 Exkursion
(Doc Rec./ Import)

RM 74, après un très honorable coup d'essai expérimental à base de Glitchs, de cliquetis dénaturés et de nappes insalubres sur Domizil en 2002 (mikrosport), et Instabil où il oeuvrait à l'atonalité, Reto Mäder revient sur le devant de la scène, tiré de sa léthargie (?) par l'artiste PURE, via son label Doc rec On retrouve cette même appétence pour la saturation (Flax), cette faim de bruit blanc, de bourdonnement dronien nihiliste…pourtant Exkursion, comme il l'indique s'octroit une ouverture d'esprit que n'avait pas son aîné. Une fois passé le second degré introductif (une fanfare de province) on plonge dans les entrelacs digitaux opaques qui laissent pourtant éclore des clairières de folk song (si, si ) des séquences environnementales ou cinétiques (Knarpfen). Un album exigeant dont la ligne directrice reste implacable. Un digipack esthétique, filigrane sur fond gris, prompt à la métaphore sur l'éclosion.

HALF ASLEEP (we are now) seated in profile
(Unique records/ La Baleine)
C'est sans doute un écueil, un de plus, pourtant la douceur qui nous enveloppe à l'écoute d'un album d'Half Aslleep n'est sans doute pas totalement étrangère à la grâce et la fragilité de ses interprètes. Après une tournée européenne aux côtés de Colleen, avec laquelle elles partagent d'autres points communs dont notamment le génialissime graphiste italien Iker Spozio (que j'adore) résident en Espagne [dont le ligne se situe dans un croisement entre l'art nouveau et les affects graphiques des 70'] ;Half Asleep sort son nouvel album, le second à ce jour sur Unique records, label au nez fin qui multiplie ces temps ci, après Angil, les incursions dans le song-writing-folk-pop avec une justesse indéniable. Après un "Palms & Plums" honteusement passé sous silence en 2002-2003 (sorti sur Another record ) les deux sœurs, Valérie et Oriane reviennent aux détours de ce projet bâti autour de consonances minimalistes, de paroles chuchotées, d'âme sombre des matins gris. Un song writing d'une extrême justesse, qui dans son équilibre entre les silences et les notes me rappelle la beauté d'un Mark Hollis. On pense en outre à Beth Gibbons, à Yann Tiersen ou parfois à Michael Nyman pour la mécanique répétitive des harmonies de piano. A écouter en compagnie de la lecture d'un Pessoa. Un des albums de 2005.

VEX'D Degenerate 2CD
(Planet Mu/ La Baleine)
Difficile de jouer sur le registre de l'étonnement ou de la surprise avec cette nouvelle production du label Planet Mu tant le duo composé de deux jeunes anglais (Jami et Robi) jouent le jeu dangereux de la révérence à un genre ( Hardcore break beat) maintes fois fouléau cours du milieu des années 1990 sans ici vraiment nourrir d'originalité leurs morceaux. C'est excessivement efficace : les déflagrations de bass, les nappes phtisiques, climats moites sont parfaitement agencés sous couvert d'une ligne esthétique néo-industrielle, mais finalement fortement datés dans la décennie passée. Le service minimum, c'est bien dirait l'autre, mais parfois ça ne suffit pas…

DMW CREW wave :cd
(Rephlex/ LA Baleine)
Avec plus de 8 maxi-lp à son actif et autant de traces sur compilations pour le label Rephlex, Ed DMX fait partie des meubles de la maison Rephlex [ fondée en 1991 par Grant Wilson Claridge et Richard David James] ; un label aux avant-postes d'une musique artificielle hédoniste mais intelligente (à l'usage du cerveau et des pieds, cqfd) Pour l'heure, mister DMX a mis entre parenthèses son label Breakin' records et ses projets annexes (computer rockers/EDMX/ Bass Potato/ eddmx) pour se replonger dans l'histoire de la musique électronique. Amateur impénitent du vocodeur, il creuse une période charnière entre la fin 70' et le milieu des années 80', avec un mélange d'électronique naïve, d'EBM binaire et spartiate et de disgressions vers une sorte de proto-eurodance (FISCHER SPOONNER lui a tout pris) auquel il adjoint ses épreuves miniatures et autres petits effets personnels : micro glitch, ghost sound, sons de synthétiseurs analogiques pourraves , etc… Le côté cheap de ses sonorités, le rythme lent du développement des morceaux tranchent foncièrement avec la folle embellie de notre époque. Ça frise parfois la caricature, s'induisant même dans le design (ah la belle pochette à la Roberto Armani !) Difficile de se trémousser sur cet album de DMX crew ( se serait-il assagi ?) autant [ il faut l'avouer] que d'être surpris, même s'il révèle à l'occasion des petites perles tel que Echelon, 17 Ways to break my heart, You Can't hide Your Dub Beaucoup d'inédits sur le second cd -previously unreleased- souvent plus drôles et détachés que les compositions retenues du premier disque. Un album attachant et cohérent dans la perspective de l'œuvre du musicien, pas toujours bouleversant, mais bon, ça reste du pur DMX crew !

SZ home recordings
SZ live recordings
(Drunk dog/ www.drunkdog.com)

SZ dont on ne connaît réellement la signification cachée, est un projet solo mené par Franck Litzler. Une fois assimilée la magnifique pochette de l'album, on se recentre sur l'écoute de ce double album, réparti sur un travail soigné de studio d'une part et d'autre part, abordant les aspects du live (accompagné de son frère Damien à la batterie). Home recordings est la quintessence de 8 morceaux instrumentaux aux arrangements limpides, laissant entrevoir chaque texture, celle des cordes et leurs mélodies dans un jeu de rupture constant mais doux. Des mélodies construites qui portent avec une pesanteur maîtrisée les constructions obliques et complexes vers des climats instables où la batterie s'emballe (Mona) La chaleur des sonorités, la teinte des gammes, les apports épars de petits sons et bruits accumulés des années durant rappellent évidemment certains artistes nord-américains issus de cette scène post-rock sans frontière…On retrouve la chaleur d'un Tortoise, la légèreté d'arpèges d'un Sea & the Cake, le sens de la fragilité mélodique de L'Altra. Le live sur le deuxième cd, enregistré en 2004 à Grenoble livre, dans le prolongement de l'enregistrement studio, une facette plus énergique, plus brute aussi où les arrangements semblent dénués de tous artifices, fard ou maquillage dans la simple beauté de leur nature. Très bon.

VANISHING BREED between arrival and departure
PINGIPUNG PLAYS the piano
(Pingipung 06/ La Baleine)
Le label allemand revient sur le devant de la scène avec 2 nouvelles productions de belle tenue. Alexander Holmes, en premier lieu, échappé des très bons They Came From The Stars, I Saw Them, sous son projet Vanishing Breed. Il a été aperçu auparavant sur 4 maxis autour d'un projet sur les saisons à base de petites mélodies sautillantes, de sons surannés de boite à musique, de riff léger de guitares, ritournelle naïve d'électronica cheap. Le musicien investit à chaque nouveau projet un concept, ici celui du dépaysement, du voyage, du départ, laissant s'affirmer avec des nuances contenues ses influences pop-folk électronica. Les remerciements à Joseph Conrad autant que la pochette en disent long sur l'idée de voyage. On navigue d'île en île, visitant des no man's land, découvrant ici un vendredi en proie au bricolage électronica, là des ritournelles exotiques, caribéennes à la façon d'un Harry Bellafonte…un mélange étrange, naïf, souvent déroutant, parfois lumineux qui reste un ovni dans le paysage pop-électronica européen. Pingipung plays the piano, comme l'avait fait l'excellent label Travaux Publics en son temps (même si le dogme est ici moins sévère) s'accorde à fixer aux hôtes qu'il accueille le soin de réaliser une pièce avec le Piano comme armature centrale de la composition… Même si l'utilisation qui en est faite reste profondément " romantique ", le recours au piano prend ici des chemins de traverse, jouant tours à tour sur la répétition, le minimalisme, l'énergie, le romantisme, le sacré, le fun, le solennel… assortissant généralement le tout de petites sonorités ou nappes numériques volatiles. Loin d'être répétitive ou linéaire, cette compilation recèle quelques arabesques sonores de premier ordre.. avec Hauschka, Peter Presto, DJ Nalesniki, Coloma, Guido Mobius, Spinning tap, Lawrence, Florian grote, Springintgut, Adam Butler, Barbara Morgenstern & Robert Lippok, Egobird….De l'originalité et un savoir-faire qui renouvelle un peu les perspectives de la sphère pop-électronica.

EXPLOSION IN THE SKY
(The Temporary Residence/ Differ-Ant)
L'observation de phénomènes climatiques à la beauté surréaliste - mirages réfractés des déserts, aurores boréales des pôles- semble imperceptible hors de leur contexte géographique. Pourtant, en capturant un peu de la solitude et de la lumière de ces événements, Explosions in the Sky a su fertiliser dessus une musique instrumentale, sans ornementations pompeuses ; une lente dérive de sonorités où les arpèges de guitares bourdonnantes s'amplifient, semblent percer la glace pour enfin trouver la lumière (Magic Hours) Quelques noms reviennent souvent à leur propos, GSYBE, And you will Know Us by The Trail of Dead, Souvaris…Pourtant peut-on comparer 2 personnes qu'on a aimés, y-a t'il réellement sous le vernis des similitudes une logique de points d'attaches ? Non, évidemment. Il nous reste à entrer dans leur musique, belle d'une tension sourde, de mélodies tournoyantes du clair-obscur, de moments de silences absolus. A l'heure des bilans, Explosions In Sky nous laisse seul avec nous mêmes, dans le simple dénuement de notre âme. Splendide.

ANTONELLI the blackout Quintet
(Italic/ La Baleine)
En provenance de Cologne, dirigé par Mark Knauer, le label Italic, laisse dériver au fil de ses parutions une certaine idée de la techno, à la fois pragmatique, dansante, mais également anti-conformiste ou trans-genre. Malgré une production relativement axée sur le clubbing, on trouve à l'occasion quelques OVNI attachants tel que ce Antonelli [émanations ou variations c'est selon d' Antonelli Electr.et A rocket in Dub de l'artiste Stefan Schwander]. Prenant tour à tour le pas d'un électronique Click n' cut, d'une techno au rythme spartiate, ou d'arcane sonore house minimaliste…il arrive à nouveau à nous surprendre. The Blackout Quintet est une litanie nocturne d'une grande quiétude, une constellation ambiante traversée d'étoiles filantes, de micro-rythmes, de nova lointaine, de tonalités de synthétiseurs, qui lui confère une proximité de vue avec certaines productions de chez CCO-Morr, voire même Intr_version pour les aspects les plus engagés. Pas bouleversant, mais relativement bien construit.

WHITE HOLE pink Album
(Kyo/ LA BALEINE)
Avec un humour second degré irrésistible (qui en trompera plus d'un), White Hole présente son album Pink Album (numéro 1 des ventes aux USA et en Angleterre annonce le sticker..) sous couvert d'une pochette outrageusement aguicheuse.. L'art de la duperie est ici flagrant (peut-être une manière de tester les journalistes mous du genou qui s'arrêtent souvent à la pochette pour bâtir une chronique) quand on sait qui se cache derrière le projet. Hanno Leichtmann, le monsieur derrière Static (album sur CCO) qui travaille régulièrement avec Justine Electra, Valérie Trebeljahr (Lali Puna), Ronald Lippok (To Rococo Rot), Stefan Schneider (Mapstation) et Nicholas Bussman joueur de violoncelle chevronné et adepte d'électronique, partenaire de Toshimaru Nakamura, membre de Beige Oscillator , Kapital Band et Ich Schwitze Nie) Ces 2 hommes composent les 2 membranes de ce White Hole. Là où la surprise est de taille, c'est quand on regarde les guests, musiciens venus apporter un semblant de souffle acoustique aux constructions électro-numérique du duo ; Puisqu'on y trouve Martin Siewert (guitare) et Boris Hauf (Saxo tenor), 2 pontes de la musique improvisée, respectivement membres et collaborateurs de Trapist , EFZEG, My Kingdom for a lullaby, Melt et Komfort 2000 (Albums sur Thrill Jockey, Erstwhile et évidemment Charhizma, Grob, Durian) pour le premier et Efzeg, TVPOW, Lozenge (albums sur grob, durian, mego, extraplatte, boxmedia, en/of, crank satori, cheap, lbt, staalplaat, timesup, zomba, sickroomrecords, iftaf, charhizma, hathut, mosz, sijis ...) pour le second. Autant dire 2 figures incontournables (malgré leur jeune âge) de la scène électroacoustique mondiale. Ok, d'accord, joli background, mais la musique de White Hole dans tout ça ? Une croisade de genres , crossover de style Dub, électronica, Click'n pop, folk-numérique qui s'il met du temps à démarrer, révèle d'excellents titres dans une lignée chère à SONIG ou SKIP rec. (Galaxy, Piano Again, We should stay at home tonight) Du seconde degré et de la bonne musique, que demande le people (peuple) ?

V/a RX : TX Dis_patched [live recordings from belgrades's di-patch festival [2002-2004]
( rx:tx 009/ import)
A ceux qui ont perdu la foi en l'humanité, qui ont laissé dans le fossé l'espérance et l'espoir ; RX :TX envoie cette carte postale. D'un pays Meurtri par des années de guerre, recouvert d'un permafrost compact de haine du prochain, de violence du quotidien, a émergé une fleur fragile, qui pareille à un perce-neige a su trouver le chemin de la lumière. Dis-patched, avec sa troisième édition, n'est pas un festival de plus comme Sonar, Pauze ou Mutek. En sus de la musique, il est porteur d'espoir et à un sens profond pour l'existence et la reconnaissance culturelle d'un pays encore fragile, la Slovénie. Cette double compilation est d'une hétérogénéité absolue, proposant en 2 longues plages de 11 compositions d'artistes chacune, l'ensemble des facettes de sa programmation. On débute avec le folk intrusif et les climats acoustiques de Marc Marcovic, Davide Balula et Colleen (qui nous recouvre de ses sons d'accordéon bourdonnant) Ensuite Icarus laisse dévier le propos vers une électronique infra-organique teintée de particules mélodiques frugales ; Tujiko Noriko, égérie d'un folk-lap-top onirique délivre un live tout en belles nuances.. puis c'est au tour d'AGF, à l'honneur de 2 titres avec ses climats spectraux si particuliers alors que Tarwater lance à la face du vent son tube Tesla. Suivront Radian , Dictaphone , Belgradeyard sound system et le Chicago Underground Trio dans leurs styles respectifs soit expérimental/pop-électronique/ Jazzy -façon Cinematic orchestra/tipsy) et Post-rock qui ne laissent jamais retomber la tension superbe . Le seconde volet ; plus exigeant, fais la part belle aux euphonies et ambiances tantôt électroniques, bruitistes, environnementales, expérimentales voire quelquefois mélodiques de Rechenzentrum, Aoki Takamasa, Pita, Information, Monolake, Murcof, POS, Wang.I.N.C, , Luomo et AGF.. Un sans faute total pour une série de lives qui laissent déjà entrevoir les merveilles intrinsèques de la prochaine édition.

APSCI Thanks for the Asking
(Quannum Project / Differ-ant)

APSCI, prononcé [APSAYE] (APplied SCIence) est une bombe à déflagration, un mécanisme explosif complexe au minutage parfait, diamant à fractales multiples, prenant ici au Booty Sound, là au R'nB, à la soulbeat, ou au hip-hop déviant, Scratch Mutant et polyvalent, métamorphosés en un malstrom sensationnel. Issu du terreau New-Yorkais et des banlieues de Sydney, Ra et Dana, mariés à l'état civil, confortés par DJ Big Wiz développent un hip-hop électro dancefloor non-conformiste et enjoué. La voix de Dana module sans timidité laissant les lyriques prendre des chemins insoupçonnés. Pour le reste, la saveur des schémas Hip-hop, pervertis de sons du quotidien, de bleeps n' cuts et d'infra-bass tonitruants rendent l'ensemble des plus attrayants. On pense à la rencontre improbable de Buckfunk 3000, Roots Manuva pour la tension et Gonzales pour la déconne.. Des raccourcis qui ne dévoilent qu'avec partialité la réelle intégrité de leur musique. Une union sacrée qui trouve sa concertation dans nos oreilles..

ROB SWIFT Wargames
(Coup de Grace/ Differ-Ant)
L'œil et la main, la main et l'œil, voilà sans doute les 2 armes (3 si on y ajoute son cerveau) de prédilection de Rob Swift, l'œil pour surveiller la révolution du disque sur la platine, la main pour freiner le courant de l'histoire, l'amener à stopper sa course, repartir vers le passé. Armé d'une réputation implacable, maître incontesté des platines, chef de files des X-ecutionners, collectifs de Scratcheurs-Turntablist new-yorkais sauvages, repéré une poignée d'années en arrière par Asphodel, Rob Swift est auréolé d'un savoir-faire inné dans le domaine des platines et d'un sens de la mise en scène musicale radicale et fulgurante. Faisant suite à "Sound Event", Wargame ne fait pas offense à son prédécesseur… Pourtant cette fois, les thèmes de la guerre contre le terrorisme, George Bush viennent ici voler la vedette aux artistes invités (en vrac : Breez Evahflowin, The Large Professor, DJ Quest & bob james, DJ meloD, Ricci Ricker & Toadstyle, Dave McMurray….) Une réflexion autour de l'attaque et de la réplique mise en marche après le 11 septembre 2001.Une volonté d'objectivité où Bush et ses sbires ne sont que rarement épargnés. L'ouverture d'esprit du jeune homme n'est plus à faire, après 2 albums pour les X-ecutionners, 3 albums solos dont des albums de démonstration de Scratchs (Who scratch this ? et le projet OUMUPO (ici d'ailleurs) en compagnie du dessinateur Etienne Lecroart ("Cercle vicieux", "Le Cycle"). War Games nous plonge dans des climats saumâtres et brûlants du métro New-yorkais, jungle urbaine où Rob Swift s'est frayé une voie unique via sa machette-platine. En un sens, il se rapproche des ambiances de labels tels que Wordsound ou plus certainement DJ Spooky pour ce mélange de sources disturbées, d'ambiances urbaines mêlées de Jazz, de sensualité, de violence et de discours et dialogues en échos. Le disque est accompagné d'un DVD où l'on retrouve le premier clip issu de l'album ainsi qu'un live impressionnant, des archives de ses premières interventions dans le monde du Hip-hop et des cours de scratch, histoire de nous rappeler qu'il fut enseignant dans ce domaine quelques années plutôt. D'une efficacité redoutable. Incontournable !

 
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