chroniques 2001
Entretiens

  JadeWeb chroniques #9
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LES ENTRETIENS
. Bip-Hop .
. Travaux Publics .
. Mathieu Malon .
. Arbouse Rec .
. Active Suspension .

. Osaka .

CHRONIQUES 2002
jadeweb #8
FLIM . THE BOOKS . FOLIE . LISPECTOR . DREY . THE REMOTE VIEWER . SPUNK . CUJO . JOSHUA ABRAHAM . STEINBRUCHEL . ELK CITY . DESTROYER . L’ODYSSÉE . BRICOPHENIA . GEL . A PLACE FOR PARKS . HANS APPLEQVIST . WINDSOR FOR THE DERBY . FOG . NITRADA . TOSHIYA TSUNODA . TRAM . ASPIC . THILGES 3 . PONY . MEZIG . ŒUF KORRECKT . PICCOLO SAXO . FINAL CUT . AUDIENCE . TV LA SUN OR . DÉSORMAIS . MARCUS MAEDER . POOR RICH ONE . SISTER SONNY . TELEFORM . AUSTRIAN AUDIENCE . CANDIDATE . INTOXYGENE . PIERRE ANDRÉ ARCAND . ISAN . ÉRIC DE LA CASA / SLAVEK KWI .

jadeweb #7
ULTRA RED / ANNA PLANETA . XINLI SUPREME . ROLF JULIUS . VESTIGE VERTICAL . SAMPLING RAGE . WERNER DURAND . DIED 13 / KAHN / MÜLLER . CASIATONE FOR THE PAINFULLY ALONE . FOR FRIENDS . ELECTRIC LIGHT . QUATERMASS VS KITTY-YO . LAUDANUM . DOMOTIC . ALOG . ARVE HENRIKSEN . TRANSBEAUCE . RETABANKA . AFRICA RAPS . VIKTER DUPLAIX . MAXIMILIAN HECKER . ASLHEY SLATER'S . THE LAND OF NOD . MONOLIGHT . PRO BONO PUBLICO . SND . OPTIATE . L’ALTRA . STATIC . PAN AMERICAN . DEZ WILLIAMS . ANDY MOOR / KAFFE MATTEWS . MOLR DRAMMAZ . GUIMO . O LAMM . PHONEM . JAMES ECK RIPPIE / COLIN A. SHEFFIELD . AIRPORT CITY EXPRESS . DA CAPO . DRONAEMENT VS RABBIT'S SORROW . JIMMY T . FALCON PROLEGOMENE . CHRIS DOOKS . HONS . VIRGA . MERZBOW . GEORGES AZZARIA . THE SOFT RIDER . CHROME 40 .

jadeweb#6
SAVOY . MOTION . ALEJANDRA ET AERON . OLAF HUND . OCTET . DJ LUL . CRAY . GISCARD LE SURVIVANT . SOL/t.einfeldt . BETH HIRSCH . LYS . BLUE BABOON . SAYAG JAZZ MACHINE . TAAPET . MARINA ROSENFELD . AAMUS TIETCHENS / DAVID LEE MYERS . ANDREAS BERTHLING . Unattainable Texts, A Precis . LAMBENT / DUODECIMO . LE CUBE . DIGITALE LIVE RADIO SESSION . 90° SOUTH . ULF LOHMANN . PYLONE . TOMMY GUERRERO . ANTI-POP CONSORTIUM . CYLOB . ESSA . DIAGONALE STABLE . OSAKA THREE ORCHESTRA . Petite musique de Chambre . RUBIN STEINER . HUGO ROUSSEL Jr / NORMAN D. MAYER . LIQUID SPHÈRE . PARTICUL SYSTEM . JONATHAN COE . SYMPHONY . CONSOLE .

jadeweb#5
YVES DAOUST . AKI ONDA . BLACK FICTION . FRANSISCO LOPEZ / JOE COLLEY . COMAE . OH ! HENRY . TLONE . BATHYSCAPHE . YELLOW 6 . ANGIL . MELATONINE . ACTIVE SUSPENSION . SISDEL ENDRESEN . V/vm . LOUISE VERTIGO . CARTOUCHE . FRAGILE / IMAGHO . VELO . MONOGRAM . ULTRA RED . MASSIMO . ANDRE POPP . MONEY MARK . BOVINE LIFE . A.F.R.I. STUDIO . SI-CUT.db . BIP-HOP Vol.4 . DON NINO . BEULAH . AEROSPACE SOUNDWISE . BERTRAND BURGALAT MEETS A.S. DRAGON . PULP FUSION . ALC LEVORA / SCHnEIDER TM . TOM SWEETLOVE . EASTERN CONFERENCE . KEEP PUNCHING .

  A la loupe MEGO
... On ne saurait réellement discerner l’impact que peut avoir un label tel que Mego dans les méandres des musiques électroniques actuelles. L’estime qui entoure cette jeune structure (4/5 ans) est en passe de déborder les frontières étroites du cercle d’initiés constituant jusqu’à présent le noyau des fidèles... (Lire la suite) >
 
 
 
 

TRAVAUX PUBLICS V/a Chantier 8 : Piano Solo
(Travaux Publics 1/11) [interview]

Si tant est qu’on puisse un jour théoriser les motivations qui animent un label, on se retrouvera devant un cas d’école lorsqu’on portera son dévolu et sa plus fine analyse sur l’entité Travaux Publics.
Un consortium discret de charme, de talent et d’efficacité et une esthétique irréprochable prédispose le directoire de ce label où se dessine un constat simple et ô combien d’actualité, résumé au détour de leur slogan : la musique va mal, il faut la sauver.
La musique va mal parce qu’on n’en crée plus, elle se recycle depuis quelques années d’elle-même, en auto-survie, puisant dans son héritage et ses ressources passées bien plus que dans de nouvelles formes d’approche. Le cut-up, le Djing, les selected works, tous ces procédés de jeunes participent de cet état de fait dans le même temps où ils creusent à petit feu la mort des chapelles.
Récusant cette démarche, Travaux publics part à l’assaut des faux-semblants et des lieux communs et prouve qu’il n’est pas nécessaire d’être né au XVIIIe en Autriche ou de mesurer un mètre trente bien tassé pour s’escrimer sur ce bel instrument qu’est le piano. Et pour corser un peu la chose, le label, pour cette première production s’octroie le talent d’un panel large de la scène électronique, histoire de faire contre-emploi, histoire aussi de montrer que sous les computers sommeille le virtuose qui s’ignore. Dans cet opus, Ben’symphonic orchestra & notre dame, Bosco, Boogers, Charlie O., Pouic Pouic, Rubin Steiner, Chazam, Team Tendo, Ko Mo Ri, Nicolas Errèra, etc. L’œuvre est belle, sensitive, engagée voire hilarante et distille sur le ton le moins académique du marché, vingt compositions de premier ordre, avec en parrain de circonstance Arthur H.ypnotiseur.
Ce chantier Piano solo (1 piano, 1 enregistreur) est le premier d’une longue liste, dont la prochaine tranche portera sur la musique punk garage (1 bière, 1 guitare). Le régal de cet été en attendant le tonitruant et incontournable mini-lp de Camping Car.

JJ.

 
 
 
 

DELAROSA & ASORA Crush the sight-seers
(Hefty/Chronowax)

La sortie d’un maxi ne soulève jamais autant le cœur et fait dérailler le pouls que lorsqu’il s’agit d’un projet attenant de Scott Herren.
Après avoir mis à sac le hip-hop conventionnel à grandes lampées de cut-up sur Prefuse 73 (album sur Warp en 2001), le seigneur des platines redonne un peu de sens à l’histoire en rééditant cet ep mythique, épuisé dès sa sortie en 99. On y entrevoit déjà, avec une clarté lumineuse les thèmes de prédilection, les textures multiples de ses approches et autres riddims magnifiés sur ses projets parallèles : Savath + savalas et Prefuse 73.
Pour tout dire, Delarosa & Asora oscille librement entre ces deux orientations de travail, prétextes à de douces syncopes électroniques mâtinées de jazz et de hip-hop down tempo. (VS.Boah*)
Le marquage au sol n’étant sans doute plus suffisamment voyant, voire explicite, Scott Herren a choisi de clore sa contribution à ce projet, préférant affirmer tantôt ses penchants atmosphériques et calmes (Savath & Savalas), tantôt son appétit pour les déviances rythmiques (Prefuse 73).
Toujours est-il que ce disque témoigne de l’imperturbable capacité de mutation de l'anthropopithèque Herren et des possibilités sans bornes de sa musique. Une pure merveille pour les sens sous influence et licence de Pearineel records.
JJ.

 
 
 
 

SINK Usual cerex
(Arbouse recordings/Chronowax)

Il est communément admis qu’on ne voit jamais le bonheur à sa porte, préférant rejeter au loin nos attentes et nos désirs. Ce que les tourments du cœur admettent, les perturbations de la musique l’acceptent pareillement.
Pas besoin de pavoiser pour vous présenter cet album : il est incontournable. C’est ce qu’on pourrait nommer un mètre étalon dans son domaine. Lorsqu’une mélodie dépaysante vient se glisser sous des scories de rythmes, on obtient une pâle idée de ce qu’est en mesure de produire Sink.
Si l’on s’attache volontiers à plonger en compagnie de ce jeune Français, c’est en acceptant en retour la violence intérieure de ses courants, leur impérieuse vitalité, sombre et dynamique, enjouée et spartiate. Sink a choisi comme plus petit dénominateur commun le rythme, dans sa forme la plus concise et lapidaire. En guise de liminaire, l’album développe des angles de vue dépaysants, introduisant ça et là des éléments empreints de bossa, de détails exotiques, proches de Senor Coconuts ou Amon Tobin (Hermann Bosleigh). À cela, il adjoint une construction rythmique complexe qui anticipe autant les conclusions d’Aphex Twin que celles de VLAd, Console ou Two Lone Swordmen (le splendide Cantina Droids).
Mon disque de la rentrée.
JJ.

 
 
 
 

EfZEG Boogie (dedicated to John Lee Hooker)
(GROB/ Metamkine)

En l’espace de quelques années, le Turntablist a pris un ascendant majeur dans les confrontations électro-acoustiques. Sans doute doit-on cet intérêt au format même de l’instrument, médium électro-acoustique par excellence, permettant aussi bien la diffusion de canons médiévaux que de sessions hip-hop ou de disques de musique concrète.
L précédent album d’Efzeg avait permis une attention toute particulière sur ce genre rare : le quatuor revient, cette fois, avec dans les bagages cette même intransigeance de la diction musicale qui faisait le charme de Grain (sur Durian).
Boris Hauf, Burkhard Stangl, Dieb 13 et Martin Siewert, qu’on avait pu entre-temps apercevoir aux côtés de Gunter Muller et sur For 4 Ears érigent ici une œuvre belle et sans complaisance. Les instruments diffusent des plages sensuelles, boucles de grésillements cycliques, feedback, erratum mélodique.
On se fait transporter dans autant d’endroits, autant d’ambiances, piste d’atterrissage, forêts nocturnes, ondes chaotiques qui fondent une sorte de landscape saturée de bourdonnements et de crissements où l’on entrevoit ça et là le spectre de Fennesz et autres formations de grande qualité.
JJ.

 
 
 
 

CASIATONE FOR THE PAINFULLY ALONE Answering machine music
(Tomlab/ Chronowax)
www.tomlab.de
Answering machine music n’est rien moins que la genèse intellectuelle et musicale de ce qu’allait dessiner deux années plus tard l’acclamé Pocket symphonies in lonesome. Un song-writer impénitent, Owen Ashworth, quelques consoles pourraves, une voix à rayer du marbre et pas mal d’amertume, voilà ce qui aura concouru à l’émergence de ce premier album réédité par Tomlab pour cause de sortie préliminaire confidentielle.
Une bien heureuse initiative lorsqu’on sait à quel point les compositions fébriles de ce jeune Allemand laissent comme vide à la fin de chaque écoute. Comparé à juste titre à quelques artistes majeurs, de Montain Goats à Will Oldham, en passant par Silver Jew, il injecte à ses home-writing des sonorités de son enfance : train électrique, boîte à musique dans la même insouciance qu’un artiste comme Anderson ; la (non) maîtrise présente sur cet album conjugue à la fois les limites de l’album et sa richesse d’ouverture. Écouter Casiotone, c’est admettre un temps le monde pour ce qu’il est : havre de tristesse et de mélancolie, lieu de bonheur fugace et d’éclairs de joie.
Casiotone effleure les compartiments les plus intimes de notre enfance, privilégiant une approche tantôt onirique, tantôt mélancolique à ses litanies désœuvrées.
En bonus, Tomlab a adjoint à la première œuvre d’Owen les titres de son premier 7’ totalement épuisé ainsi que le morceau de la B.O Scumrock.

JJ.

 
 
 
 

VLAD Ep
(Angström)
www.angstrom-records.net
À l’instar d’un Stanley Kubrick, VLAD compose son œuvre à raison d’un maxi par année bissextile. Un rythme vertigineux de sorties, bien en retrait des calculs d’apothicaires, au sein d’une chapelle musicale pourtant féroce et cannibale. Un comportement qui tranche d’autant plus qu’il est en totale opposition avec la cadence dévastatrice qui émane de ses productions, brûlots électroniques taillés à la sueur et aux coups de reins.
Pour appuyer un peu plus nos dires, le jeune homme, après la voie royale ouverte par Warp en sortant il y a deux ans, son précédent maxi, a préféré confier les violentes émanations rythmiques de son subconscient à un label discret, Angström, et ce plutôt que de conquérir les charts internationaux.
Bien louable démarche dans cette période, où le discrédit et le manque de convictions vont bon train.
Sa musique, elle, continue à graviter dans les hautes sphères de la décadence atonale et numérique et se résume à un florilège splendide d’accélérations, de déprises et de sursauts violents et joyeux. À n’en pas douter le maxi de l’été, à faire pâlir de honte les premiers Aphex Twin… On adore.
JJ.

 
 
 
 

MORCEAUX DE MACHINES Liberum arbitrium
(No TYPE/Metamkine)
www.notype.com
Comment ne pas s’intéresser à deux jeunes artistes dont le premier groupe avait eu la pertinence de se baptiser Napalm Jazz, (également émission de radios), échos lointains des Naked City côtoyant les assauts digitaux de Merzbow.
Morceaux de Machines se fait un malin plaisir à brouiller les pistes, à tel point qu’on ne sait vraiment plus si ils ajoutent du bruit à la mélodie ou si ils restreignent le bruit à la mélodie.
Acharné de l’improvisation, le duo canadien se lâche volontiers, citant au passage l’Art du bruit de Luigi Russolo ou Anthony Burgess (Orange mécanique) pour soutenir leur discours, leur évocation libre de la création artistique. À cheval entre l’ambient, le jazz, le hip-hop baclé et le bruit blanc, Morceaux de Machines tisse des atmosphères tendues, catharsis numérique de processeurs furibonds et de lignes de programmation effrénées. Paradoxalement, leur musique n’est pas sans évoquer les productions de Deathprod sur Biosphère ou d’un Stock, hausen & walkman remixé par Kevin Drum… Dontigny et Dorion se détachent de ces références en gardant une spontanéité et un abandon de soi à leur art. Ou une manière habile de garder le sourire en se bouchant les oreilles.
JJ.

 
 
 
 

TETINE vs SOPHIE CALLE Samba de monalisa
(Sulphur rec.)

Quelle dénomination insolite que Tétine pour stigmatiser un travail autour des musiques atmosphérico-ambient. Nul doute que les consonances exotiques de ce mot auront dû plaire à leurs oreilles, séduit leur goût de culture française.
En réalité, cette quatrième production du label Sulphur, label de Robin Rimbaud est la réunion de deux travaux pré-existants dont il se sera fait le médiateur pour en faire la synthèse.
Sophie Calle, devient de manière consentante l'émissaire de charme d’une culture contemporaine où se brassent tous les supports, tout les médiums… Paul Auster en avait déjà fait l’égérie d’une de ses nouvelles avant qu’elle le réinjecte, par un jeu de mise en abîme dans une de ses expériences invraisemblables.
Dans une pure tradition de Spoken Word, Tetine met en relief certains des journaux de bord les plus connus de l’artiste, de No sexe last night jusqu’à la traque éperdue d’un amant imaginaire de Paris à Venise. La gravité des textes est en plein décalage avec le farniente et la douce candeur de ces sonorités subtropicales ou sombres, évocations des Tipsy d’asphodel du Mort aux vaches de scanner, autant que des divagations électro cheap de Camping Car sur Travaux Publics.
Et puis c’est rassurant de voir qu’on est pas le seul à parler l’anglais avec un accent à écorcher les coudes. Très agréable.
JJ.

 
   
 
   

DABRYE Instrmntl
(Eastern Developments /import)

La musique de Dabrye est une synthèse absolue, une équation irraisonnée d’une collision improbable de genres et d’atmosphères admirables, d’apparence inconciliables.
À bien y réfléchir, seul un Américain, et au demeurant un citoyen de Detroit, pouvait réussir ce genre de grand écart sans y risquer sa réputation et son équilibre. Assourdi par l’oreille droite de sons roots des ghettos, de Fela, Mahmoud Ahmed, Big Tone et Neptunes, nourris au Detroit sound (Jay Dee, Derrick May) et autres partenaires locaux (le merveilleux DJ Assault-detroit grand pubahs), hébété par le pavillon gauche d’harmonies d’Europe (Kraftwerk, Cylob, Reich, Riley, Polansky, Dockstader (et sa technique), Dabrye a su matérialiser les différentes ascendances qu’ont eu ces musiques sur lui pour en faire un jeu personnel, une rixe intime à même de signifier ses diverses espérances.
La virtuosité de l’ensemble donne à réfléchir et compose un univers baroque (chargé de références) et onirique, évoquant une démarche parallèle à d’autres artistes, tel que The books (tomlab) dans un genre pourtant diamétralement différent.
Dabrye ne part pas en quête de vitesse absolue, de rythmique effrénée, il déroule sagement, le synopsis de ses petits court-métrages intimes, installe pesamment son rythme. La voix, quasi absente devient par instant instrument, soufflant une mesure, ricochant par échos.
Eastern developments exhale un renouveau sur le hip-hop et l’électronique et risque de rendre obsolète bon nombre de ses contemporains. Absolument recommandé.
JJ.

 
   
 
   

BIP-HOP Vol 5
 (Bleep 13/La Baleine)
[interview]
Conscient comme au premier jour des richesses encore à exhumer du patrimoine électronique mondial, le label Bip-hop [interview] prolonge et reconduit une fois encore sa sélection drastique d’auteurs et de compositions, polarisant pour cette salve son attention sur l’Amérique du nord et l’Europe. Pas moins de six nouveaux artistes viennent enrichir la déjà longue liste de participants, couronnés par des allocataires de génie tels que Si-cutDb, Tennis, Phonem, Marumari, Köhn, Atau Tanaka, etc.
Du brillant Français Julien Berthier (D’iberville) dorénavant expatrié au Canada dont les séquences de glitch spartiates ont secoué par le passé les fans de l’écurie ReoRec) et qui donne ici une leçon de musique concrète à Matmos avec ce Le souffle, c’est la vie énergique et suffocant,
Ce même Julien Berthier, dont on ne se lassera pas d’inaugurer intérieurement les lignes épures de graphisme du label Bip-hop (le hasard fait donc si bien les choses).
Dans un prolongement soyeux, Rechenzentrum (le joujou du pauvre) distille toujours à l’alambic et sous couvert d’un fort taux d’alcoolémie, ses déflagrations bancales, assez proche du Scumtron de Merzbow pour le coup.
Tonne, dont la discrétion est à l’égal de son imaginaire, inventeur zélé d’un procédé informatique offrant une causalité enchantée entre son et image. Paul Farrington, donc, qui anticipe ici l’image en faisant sonner son Auto Loader comme une B.O. imaginaire dont il serait le seul à détenir le synopsis
On n'oubliera pas le titre introductif d’Accelera Deck, magnifique et cristallin.
Andrew Duke, plus qu’à l’honneur (il sort en parallèle un album sur Bip-Hop), canadien de son état, explore habilement les fonds marins, semblant identifier pour un temps sa musique à la topographie largement dominée du Canada par les grands lacs.
Enfin Mickael Stavostrand, le roi de la musique ambiant environnementale, boss du label Mitek qui adopte à nouveau une tonalité minimaliste comme sur son précédent album. Que du très bon, donc.
JJ.

 
   
 
   

BELMONDO s/t  www.belmondo.be.tf
(autoprod/
www.collectifjauneorange.net)
S’il fallait en un mot résumer les sensations qui gouvernent l’écoute de cette première démo, ceux de félicité et de mélancolie tiendraient sans nul doute le haut du classement. Deux mots à décliner de préférence en espagnol, tant les sonorités allègres qu’elle révèle se mêlent à la tristesse retenue qui l’habite.
Belmondo habille les belles filles de délicates parures, maquille l’uniformité du quotidien de consonances bleu pastel, étire nos courts horizons par la justesse, la pertinence de leur vision musicale. Si cela ne suffisait pas, les cinq mélodies précieuses de Christian Nolf laissent éclater une mosaïque de fébrilité délicieuse, d’anxiété juste à propos et de beautés endormies.
L’existence "conditionnelle" du projet studio va prendre incessamment une tournure physique, par l’adjonction future, sous format live de gens de bonne volonté (parmi lesquels Gush & Boris Gronemberg, Grandpiano ou encore la délicieuse Francoiz Breut).
Proche de Migala, de Sr Chinarro et de Tom Sweetlove, avec quelques consonances Ovalienne (sur return flight), ce délicat objet est à nouveau distribué par le collectif jauneorange.
Quand le beau frappe à la porte, qui serait assez inconscient pour ne pas lui offrir le gîte ?

JJ.

 
   
 
   

O+A Box 30/70
(Tourette/import)

On apprécie sans mesure les labels qui osent franchir les frontières entre expériences musicales et performances artistiques. Tourette nous a déjà habitués dans ce domaine à de la haute voltige expérimentale en diffusant une session live tonitruante, Format 5 (à laquelle ont participé The berliner Theorie, Frank bretschneider, Carsten Nicolai et Golden Tone).
O pour Bruce Odland et A pour Sam Auinger, voilà pour les présentations. Il est à parier que leur collaboration ne se résume pas de manière simpliste à cette équation, qu’elle tisse sans doute de manière plus large dans les artères de l’amitié, du respect professionnel et de l’adhésion à une cause commune.
Fruit d’une installation ubiquiste puisque mobile et transposable, on découvre avec un plaisir ingénu dans le livret joint des photos de cette box 30/70, aux teintes myosotis, rectangle parfait chéri des grecs.
On peut sans fausse note interpréter cette installation comme la traduction acoustique d’une perception visuelle un peu floue : les comportements de trafic urbain : qu’il soit subi ou désiré, collectif ou individuel, à titre personnel ou professionnel, nocturne ou diurne, la boîte anonyme des deux condisciples renvoie, via quelques effets discrets (tubes à résonances, filtres, modulateurs) à l’identité sonore du lieu qu’elle visite (Berlin, Witten, Rotterdam, Düsseldorf, Dresden et Vienne), comme autant de nodules à une corde à linge.
Un début de cartographie acoustique superbe qui surimpose une dimension poétique à des lieux aussi désœuvrés que peuvent l’être ces carrefours de banlieues périphériques.
Les deux compères peignent les sites visités, mettent en perspective le bruit urbain cher à Murray Schaeffer, tissent en orientant les sources une trame mélodique inattendue, surgissant de nulle part, comme un détail enchanté qui révèle en un instant tout le charme d’une jeune femme.
Profondément environnementaliste, ces pièces dressent le profil d’un élément apparemment commun mais qui révèle au final une multiplicité de pratiques, de détails, d’architecture mélodique et de perceptions attenantes.
Complément sonore et prolongement auditif du collectif d’exposition mutation commandé l’an passé par le CAPC (Bordeaux) cette œuvre flotte et traverse l’esthétisme urbain et paysager de notre ère moderne.
JJ.

 
   
 
   

SHINSEI Nation sollipsiste remix
(Active Suspension/Chronowax)

Shinsei
a su faire sa fortune personnelle de ses écoutes (attentives) antérieures (Sonic Youth, Labradford, Reich, My Bloody Valentine), aimant et adulant ses références plus que de raison.
Préférant se mesurer à lui-même qu’à ces monolithes de la culture indé, il a patiemment déconstruit leur grammaire, autopsié la structure du genre avec une belle lucidité et su la convertir dans une forme contemporaine en empruntant aux traits de la syntaxe électronique.
Partis de ce postulat, les divers intervenants ont apposé avec grâce et aplomb leur personnalité et la nature profonde de leur essence musicale sur cette texture.
Si l’auteur semble déplorer ses nations "solipsistes", tournées sur elles-mêmes et ne connaissant d’autre réalité que la leur, cette collaboration croisée démontre bien tout l’inverse en sollicitant le savoir faire et les prédispositions créatrices d’un panel éclairé de la scène européenne. KPt Michigan engage la bataille rythmique avec la même douceur qu’on avait pu détailler en son temps sur le split avec Schneider TM, Aerosol engouffre ses dissonances féminine sur Variable alors qu’Isan lui donne un relief angélique et abrasif ; Quasar Ken & Datagrrl crachent leur symphonie de blip sur 1977 ;  Ultramilkmaid amenant une atmosphère onirique (Maeor Tri ?) a simple comme un coup de fil ; O. Lamm calibre Rhyme pour le dance floor tandis qu’encre balance des scories électro sur fond jazzy, etc.
Une belle aparté que cet album de remixes, qui donne envie de découvrir d’urgence le long courrier de Shinsei.
JJ.

 
   
 
   

ANT Uncontrolled environment
(Angström)
www.angstrom-records.net
Ant après un remarqué morceau sur la compilation Massage auditif #1 d’Angstrom revient à la faveur d’un ep. À bien y écouter, on peut considérer que Ant est le projet le plus abouti de ce jeune Toulousain, bien plus que ses précédents pseudonyme (Gentil Koala, 1040 stz). Les cinq compositions qui émaillent cet Uncontrolled environment correspondent à une lente montée serpentant quelques trente-cinq minutes de musique dark ambient. Des sons sibyllins, décousus viennent animer ce lent déroulement sonore, cette lente procession acoustique pour percer en fin de course sur l’énergique remixe de ce lightspaceconvuls. De l’introspection à la maturation pour finir sur l’exaltation.
On pense à Imminent Starvation, Column One pour la maîtrise des climats, la gestion des turbulences et des tumultes atmosphériques.
Le design, proche du graphisme de Norsq évoque la solitude latente de l’album, comme une fin de non recevoir au surpeuplement.
JJ.

 
   
 
   

SAVATH & SAVALAS The rolls & waves ep
(WARP/ pias)

La splendeur et l’engourdissement qui règnent sur cet ep sont à mettre en parallèle avec le précédent album de Scott Herren, Folk songs for trains, Trees & honey, produit par Hefty et sorti sous licence Warp deux années auparavant.
Conscient d’une certaine anémie créatrice dans la frange de la musique électronique, Scott Herren vient pourfendre cette inclinaison sur tous les fronts de la composition. L’Anglais, exilé à Barcelone, épanche sur cet ep son goût inconsidéré pour les belles mélodies et le jazz de Yussef Lateef et Pharoah Sanders. À l’instar de beaucoup de ses pairs, Scott Herren n’a pas d’angoisses à assumer sa fascination rationnelle pour les mélodies pop et les vertigo jazzy.
Une analyse qui ne se dément pas à l’écoute de ses titres, pour la plupart instrumentaux, empreints de folk, de jazz (Rolla & waves of ignorance), de hip-hop filtré (paths in soft focus) et où les harmoniques ont pignon sur rue. Ce song-writing attachant révèle une nouvelle facette du maître, élégante et douce. Un garçon décidément brillant.
JJ.

 
   
 
   

THE BISONS Compactor
(Primeros Pasitos/ Poplane)
www.primerospasitos.com
Loin de vanter les mérites du Corned Beef (si mérite il y a à le faire), The Bisons, formation rock débauchant à l’occasion l’électronique, nous livre un album énergique et sincère comme il n’est pas coutume d’en voir.
La voix saccadée scande des inepties punk avec la même désinvolture que Peachees ou le Tigre alors que la musique, plus proche de la frange Power Pop, lâche ses conclusions rythmiques dans nos frêles oreilles.
On est enseveli sous une horde de slogans potentiels, qui de Chaser à Heartattack en passant par TV Beakdown ou Kickstart font de nous des guérilleros du branding musical.
L’énergie est palpable, ça sue, ça braille et ça nous renvoie quelques années en arrière. Comme si Playgroup, les Breeders, Pixies et le Tigre faisait la bringue à un concert de heavy.
Buffalo bill est un enfoiré d’avoir fomenté l’extinction de la race, quand on voit le plaisir que l’on prend à écouter ce chant du signe des derniers bisons.
JJ.

 
   
 
   

SSSD Home
(GROB/ Metamkine)

SSSD
est la contraction sibylline d’un quatuor dont les membres ont déjà fait couler beaucoup d’encre (Siewert / Stangl / Sigumoto / Dafeldecker)
Le plus célébré étant sans doute Taku Sigumoto, boss de son label Slub music, partenaire occasionnel de Gunter Muller (un récent album somptueux sur For 4 Ears) et des participations éparses ailleurs. Quant aux autres membres, beaucoup de sueur, d’impertinence et d’arpèges au sein d’Efzeg, chroniqué plus haut.
La bio note justement que le mot premier de chacun des titres s’ordonne autour de cette affirmation : "Home is where my hard disc was". Loin de signifier un clin d’œil au récent album de Pure sur Doc, ce cadavre exquis se veut être une approche des lieux par la composition, pour celle-ci. En résumé, peu importe d’où nous sommes, le lieu et la rencontre sont les seuls moteurs de notre création du moment.
Loin d'agencer par strates successives et dans un jeu de flux et de reflux leurs instruments (trois guitares, une basse), la motivation de ces six compositions est le champ libre, la déambulation sans contrainte, comme si chacun des musiciens se tournant le dos, entamait une marche libre au départ d’un carrefour. Les sentiers se mêlant par moment, chevauchant parfois leur balisage, bifurquant subrepticement avant de disparaître derrière un taillis. Le jeu d’ensemble évoque des passages abstraits d’œuvres folk, le jeu subtil de Sugimoto dictant un peu la direction d’ensemble des compositions. Une œuvre, belle, pastorale et apaisante. Une B.O. pour le Motels Chronicles de Sam Sheppard ?!?
JJ.

 
   
 
   

HU VIBRATIONAL Boonghee Music 1
(Eastern Developments/import Baked Goods)

Amateur averti et collectionneur enragé de raretés jazz, free, funk, roots & intrumentals hip-hop et autres dub plate (la pochette de l’album de Prefuse 73 en attestant), Scott Herren ne pouvait décemment pas limiter son seul activisme musical aux sphères de la création. Hu Vibrational signe l’entrée en matière du label de Herren, Eastern Developements d’une fort belle manière, rappelant sans vergogne les grandes heures d’Atlantic, ou RCA (jetez-vous sur les rééditions).
Les états de services des deux membres de Hu Vibrational ressemblent à une revue de détail des meilleurs musiciens jazz du siècle : Pharoah Senders, Yuseef Lateeef, Joseph Jarman, Bennie Maupin, Don Cherry, Lester Bowie, Kenny Cox, Bill Laswell, l’AACM, etc.
Le prestige de ces collaborations a nécessairement déteint sur leur jeu et leur approche de ce dernier. Pour autant, Adam Rudolph et Hamid Drake ont su pervertir ce lourd héritage en quelque chose de léger et d’intuitif, une musique presque juvénile.
Cette part de candeur est sans doute le fait du producteur Carlos Nino qui a su faire émerger la lumière chez nombre d’artistes, des Divine Stylers à DJ Shadow & Cut Chemist en passant par Blackalicious, Gil-Scott Heron ou Saul Williams…
Assemblage chaud de bass profondes, de résonances dub, d’échos lointain de hip-hop, de rock steady, et de groove urbain minimaliste, cet album de Boonghee music exerce une formidable attraction sur nos sens auditifs
Un magnifique phénomène de réverbération capturé en studio, prompt à ricocher dans vos enceintes jusqu’au prochain carnaval de Notting Hill.
JJ.

 
   
 
   

BEEF TERMINAL The grey Knowledge
(Noise Factory records/ import)

www.noisefactoryrecords.com
Alors même que les succès authentiques, tant artistiques que commerciaux de labels tels que Constellation ou Kranky semblent choses avérées en France, il se trouve encore des distributeurs pour traîner la patte devant des labels tels que Noise Factory records. Sans doute la touche esthétique des sus-nommés a marqué bien davantage les esprits que ne le font cette jeune génération de labels.
Découvert l’an dernier au détour d’une compilation éponyme où figurait déjà Do may say think, Beef Terminal creuse un peu plus profond le sillon des hypothèses pop atmosphériques déjà proposé sur 20 goto 10. Le travail sur le son permet une comparaison facile avec une superposition de voiles gonflées par le vent, laissant apparaître par instant des faisceaux de lumière. On pense a un Japanese Cake qui aurait sombré dans le côté obscur de la force, à du Silver Mont Zion, ou encore du Town & Country.
Avec une application monastique, il contorsionne nappes et drones, les plie et les contrit à sa volonté. Beaucoup d’espace et peu d’air. Sa connaissance du gris lui permet de maîtriser chacune des nuances, chaque tonalité sans jamais choir dans l’ébène ou l’ivoire.
JJ.

 
   
 
   

SPASM Iliam
(Musik experience)
www.musikexperience.com
J’aurais dû chroniquer il y a de cela plusieurs mois ce disque mais ma tendance fâcheuse à classer les disques par couleur de tranches m’avait fait perdre de vue cette œuvre majeure.
Spasm conjugue des subbass pondérales (Sofa Surfers ?!) à des climats maladifs et obscurs, puis change de cap et gouverne à la barre d’une électronica proche de Domotic ou Styrofoam.
Ainsi, Action est proche de Boards of Canada alors que Nova évoque les plus beaux moments de Spectre.
Imprévisibles, les séquences, boucles et élans électroniques se déchaînent, virevoltent puis s'ankylosent jouissivement avant d’émerger à nouveau. On est laminé et heureux devant cet exposé admirable, panorama clairvoyant de maints aspects de l’électronique contemporaine.
JJ.

 
   
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